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Dans un marché de l’emploi paradoxal, les sirènes de la communication « marque employeur » parviennent-elles encore à séduire ?
Tous les géants de la tech qui, quelques mois auparavant, s’adonnaient à attirer les meilleurs talents et faisaient rêver les autres employeurs par leurs campagnes de recrutement, se relaient depuis fin de 2022 pour annoncer des plans de licenciements massifs.
Un effet « surenchère » qui entraîne le marché
La crise sanitaire de 2020 a créé un climat attentiste dans les grandes entreprises pour le recrutement. En parallèle, les besoins de certaines d’entre elles ont explosé avec la mutation des comportements (croissance du e-commerce, omnicanalité etc.). En conséquence, 2022 a été une année extraordinaire sur le marché de l’emploi : offre pléthorique et candidats qui pouvaient se permettre le luxe de refuser les (nombreuses) propositions qui leur étaient faites dans une grande partie des secteurs (tech, communication, marketing, retail etc.).
Cette situation conjoncturelle a entraîné une pénurie de profils, augmenté leur désirabilité et conduit les entreprises à réfléchir à l’amélioration des propositions qu’elles faisaient. Cela passe bien sûr par la rémunération, mais aussi par les conditions de vie au travail, remises en question par cette même crise covid : semaine de quatre jours chez Accenture notamment, journées blanches le vendredi chez Total ou 100 % télétravail pour certaines entreprises américaines. Toutes ont tenté de défier le statut quo et de proposer des offres plus alléchantes les unes que les autres…
Une « violence » communicationnelle qui tue les messages
2023 a débuté en demi-teinte avec un marché qui reste dynamique mais des entreprises qui semblent avoir eu les yeux plus gros que le ventre : Twitter d’abord, Meta, Microsoft, Salesforce et même Amazon, l’opération « réduction d’effectif » semble être un point commun pour tous les acteurs de la tech.
Ce qui frappe, c’est d’abord la violence des procédures : par exemple, les employés de Twitter ont reçu un mail les intimant de ne pas revenir dans l’entreprise le lendemain. Cette communication contraste avec la construction d’une culture « cool » à laquelle la Silicon Valley nous a habitués.
En même temps, certaines de ces entreprises affichent une santé insolente, tirée par la croissance du e-commerce. Cela crée une cacophonie dans l’espace public, où les mêmes émetteurs font des promesses, annoncent des licenciements « brutaux » et de bonnes perspectives financières. Difficile d’y retrouver la cohérence et la confiance pour s’engager en tant que talent…
Des actes (plus d’actes ?) et plus de cohérence avec les prises de paroles
Alors faut-il stopper les prises de paroles marque employeur qui viennent se percuter contre les coupes sévères d’effectifs ? Pas forcément. Cependant, essentiel de réconcilier temps court et temps long ! La logique de séduction ne doit pas créer un écran de fumée au travers de prises de paroles publicitaires oblitérées par les annonces en une des chaînes d’information en continu.
Peut-être commencer par déshabiller la communication « marque employeur » pour y remettre des actes concrets : plus qu’une course à la bonne idée et une surenchère traitée de façon léchée et publicitaire, valoriser les résultats : bien-être des talents, communication sur le turnover et la rétention, témoignages de carrières longues épanouies et en progression. Des actes et non des promesses !
Et d’un autre côté habiller ces annonces brutales et les accompagner de pédagogie : redonner du sens aux annonces de licenciements, les replacer dans une logique de business model, de temps long et de « protection » des talents.
Finalement il faudrait arriver à faire dialoguer les promesses de recrutement et les annonces de licenciements et leur redonner un sens global. Ce qui implique aussi une meilleure coordination interne entre les équipes financières, RH et communication sur ces sujets. Passer d’une logique « ressource » à une logique « humaine » en somme…