Temps de lecture estimé : 3 minutes
Le recours au télétravail devrait s’installer durablement. Bonne nouvelle pour les salarié·es et les entreprises…
Évolution majeure dans le monde des entreprises : le télétravail. Imposé aux salarié·es durant les divers confinements, il a bouleversé la vie les Français·es, jusque-là, peu préparé·es. Pour le pire diront certain·es. Pour le meilleur selon le Conseil national de productivité. L’heure est à l’analyse et au croisement de données. Et soyez-en convaincu·es, le télétravail n’a pas nui à la productivité des entreprises.
Les allergies semblent avoir chassé la covid de nos préoccupations printanières. Les chiffres produits par Santé publique France ne cessent de chuter et l’espoir de voir la crise sanitaire prendre fin s’immisce dans tous les cœurs. Vient alors l’heure des bilans. Et en voilà un qui pourrait réunir les espoirs des employeurs et des employé·es. Le télétravail subi durant la pandémie n’a pas eu d’impact négatif sur la productivité des entreprises. C’est en tout cas ce que rapporte le troisième rapport du Conseil national de productivité (CNP) en s’appuyant sur de nombreuses études ainsi que sur les données de la Banque de France, de l’Insee et de l’OCDE. De quoi pérenniser la pratique ?
« La crise soudaine liée au contexte sanitaire, risque auquel beaucoup de pays étaient peu préparés, a eu un effet d’hystérèse sur le recours au télétravail en révélant son potentiel même au-delà du contexte de crise », rapporte le CNP. Dites-vous qu’hystérèse signifie décalage et rappelez-vous, c’était il y a deux ans. Le monde basculait dans ce qu’il croyait impossible et les politiques n’avaient d’autres choix que de bousculer les codes préétablis pour juguler la pandémie de la covid-19. Le télétravail a donc fait son apparition dans une France où triomphait le « présentiel ». Le rapport note qu’en 2019, seul·es 4 % des salarié·es télétravaillaient au moins un jour par semaine, principalement les cadres. Le chiffre explose en janvier 2021 selon l’étude Tracov de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), puisqu’il atteint 27 % (dont 56 % de cadres). Le secteur de l’information communication est le plus concerné (plus de 70 %). Imposé, il ne remporte pas tous les suffrages, et pourtant… Huit travailleur·ses sur dix souhaitent désormais que la pratique s’installe dans la durée.
Réduire les risques psychosociaux
Difficile de ne pas satisfaire ce désir. Car le CNP note : « Assez paradoxalement, à la différence de crises antérieures qui conduisaient à un ralentissement de la productivité tendancielle, l’accélération du recours au télétravail lié à la crise sanitaire pourrait finalement aboutir à un gain durable de productivité. » Mais de souligner que le travail à distance ne peut pas s’appliquer de manière homogène à tous les secteurs. Le gain de productivité n’est pas le même selon le métier ou la tâche à accomplir : « On le retrouve plus souvent dans les pays développés, dans les professions les plus diplômées, dans les métiers où le présentiel n’est pas indispensable et dans les grandes organisations. »
Et parce que le changement de notre mode de travail a été brutal, il doit, une fois la crise sanitaire passée, s’organiser pour atteindre un certain degré d’efficacité. « Une mise en œuvre future et pérenne du télétravail dans de bonnes conditions implique une politique managériale adaptée afin de réduire les risques de dégradation des conditions de travail », fait savoir le Conseil. Le tout dans l’objectif de réduire les risques psychosociaux, particulièrement importants ces deux dernières années. L’étude Tracov de la Dares relève notamment que le télétravail à l’heure de la covid pouvait engendrer des horaires de travail décalés, un temps de travail plus important ou encore des soucis de santé.
Deux ou trois jours par semaine
Précautions prises, le Conseil national de productivité observe que le recours au télétravail pourrait engendrer un impact significatif sur l’économie des entreprises. Moins de monde dans les bureaux, moins de place nécessaire : « La Banque de France note que le loyer d’une entreprise locataire médiane représente environ 8 % de sa valeur ajoutée. » Le télétravail « offrant ainsi une marge de manœuvre pour réduire l’empreinte foncière des entreprises ».
S’ajoutent « les temps de trajets économisés » qui peuvent « être mis à profit tant en accroissement de la marge extensive du temps de travail qu’en amélioration du cadre de vie individuel ». Mais l’on précise que l’éloignement des collaborateur·rices pourrait s’avérer négatif du côté des « flux informationnels », soit « une composante importante du capital organisationnel et du capital humain, notamment vis-à-vis de la formation des salarié·es ». En conclusion, il apparaît nécessaire, tant sur le cadre juridique applicable au télétravail qu’à l’échelle des moyens mis en œuvre par les entreprises, de trouver un juste équilibre. À ce propos, les gains d’efficacité « peuvent être plus élevés lorsque les salarié·es ne télétravaillent pas pendant l’intégralité de la semaine et qu’ils sont libres de choisir volontairement le travail à distance ». Deux ou trois jours de télétravail par semaine, voilà ce que recommandent les études.
Pour aller plus loin : le rapport du Conseil national de productivité |
Selon une enquête de l’OCDE, citée par le Conseil national de productivité, « environ 63 % des managers et 74 % des travailleurs ont établi une évaluation globalement positive de leur expérience de télétravail respectivement du point de vue des performances de l’entreprise et du bien-être subjectif des travailleurs ». Et comme nous ne cessons de le répéter dans nos divers articles, le bien-être des salarié·es est un facteur déterminant pour la réussite d’une entreprise. Le télétravail pourrait offrir – entre autres – une réelle plus-value pour les employeur·ses. Les managers interrogés par l’OCDE relèvent que les travailleur·ses sont plus concentré·es chez eux·elles et commettraient, ainsi, moins d’erreurs.
« On s’attend donc, en termes d’effet net, à ce qu’il y ait un accroissement potentiel des gains de productivité par un recours plus important au télétravail, même lorsque la crise sanitaire se résorbera », conclut le CNP. Télétravail et productivité apparaissent compatibles lorsqu’il sont consommés avec modération, raison et humanité.