Merci pour le cadeau

Julien Féré
docteur en sciences de l’information et de la communication au CELSA Paris Sorbonne et partner marketing communication pour onepoint.

Temps de lecture estimé : 2 minutes

A l’approche des fêtes de fin d’année, je m’interroge sur la générosité des marques : points fidélités, remises immédiates ou cashback. Cependant rien ne remplace le cadeau qui transforme la relation symbolique en lien tangible…

Certains voient dans Noël une fête mercantile. La figure du père Noël que nous connaissons a été mise en image par Coca-Cola au début du XXe siècle1 et est devenue un patrimoine mondial que nous partageons quelles que soient nos valeurs ou notre religion. Derrière cette figure tutélaire, un principe simple : l’idée d’une liste de souhaits, d’une attente jusqu’au jour fatidique et d’un cadeau-récompense pour les enfants les plus sages qui obéissent aux règles.

Dans le monde marchand, dans le domaine du luxe ou de la grande consommation, le cadeau est partout et suit ces mêmes règles. Chez McDonald’s, on le trouve dans le « Happy Meal » – où il tente de se donner un fondement éducatif – et dans son programme de fidélité au travers de points qui donnent accès à une trousse ou une serviette. Ces objets « sans valeur affichée » ont une grande valeur symbolique : ils se méritent et ne peuvent être obtenus que par des actes marchands annexes. Arborés ou collectionnés, ils expriment l’attachement à la marque et une connivence culturelle. Dans le domaine sportif, le sac Basic Fit2 fait également office d’étendard, tandis que les marques de luxe offrent des T-shirts ou des trousses dans la parfumerie, ou des accessoires quand il s’agit de leurs clients modes. Pendant longtemps, le cadeau Bonux (désormais relancé par son propriétaire) a fait office d’expression courante pour désigner un objet superflu et évident – dépassant la notoriété du produit d’origine (la lessive). Le cadeau traduit la capacité pour une marque à dépasser la situation transactionnelle et le coeur d’activité qui lui est reconnu par la société. Une marque dont les cadeaux sont désirables atteint le Graal de l’icône – c’était ma chronique d’octobre – mais joue également avec le feu : comment être sûr que les céréales pour enfants ne sont pas plébiscitées uniquement pour leur jouet ? L’attachement risque d’être malmené s’il n’est lié qu’à cet argument ajouté.

Côté consommateur, ces cadeaux de marque traduisent une sorte de fétichisation et une volonté de rendre la relation à la marque plus profonde. Souvent liée à la collection, cette possession fait l’objet d’un trafic de seconde main où l’on troque – ou vend – ce qui a été obtenu gratuitement mais au prix d’efforts de consommation. Si vous voulez en faire l’expérience, tapez « magnet père dodu » dans l’application Leboncoin…

1 Voir le chapitre consacré à cette
saga publicitaire par Frédéric Aubrun
dans « Les dessous de la publicité »
paru aux Editions Ellipses en 2024.
2Voir le mémoire d’Emilien Schnur
sur cet objet soutenu au CELSA Paris
Sorbonne en septembre 2024.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

J’accepte les conditions et la politique de confidentialité

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.