EcoRéseau Business n°35

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Si Platon l’avait emporté sur Aristote…

Pour Platon il existe derrière le monde trompeur des sens celui parfait des idées et des âmes, qu’elles appartiennent aux hommes ou aux femmes. Dans « Les Lois » il affirme qu’une Cité qui n’éduque ni n’emploie les femmes est semblable à un homme qui ne se sert que de son bras droit. Le fondateur de l’Académie a une vision très positive des femmes pour son époque. Malheureusement celle de son élève, Aristote, est tout autre. Le natif de Macédoine n’était pas loin de penser qu’il manque quelque chose à la femme, cet « homme imparfait ». L’enfant n’hérite que des qualités de l’homme, et la femme est une terre qui se contente d’accueillir et de faire pousser la semence. L’homme donne la « forme », la femme la « matière », pour reprendre ses termes. Une erreur qui démontre à quel point il est dangereux de laisser les hommes entièrement souverains dans certains domaines, comme ici la philosophie et les sciences. Ce jugement d’un homme pourtant très intelligent est particulièrement désastreux dans la mesure où sa conception – et non celle de Platon – prévaut jusqu’au Moyen-Âge. L’église a ainsi hérité d’une conception de la femme qui ne repose aucunement sur la Bible. Jésus, lui, n’est pas misogyne dans les textes. Conditionnées par des siècles de patriarcat, nombre de femmes ont intériorisé un sentiment d’infériorité. Certaines d’entre elles, bien que surdiplômées et pleines de bonnes idées, n’ont pas encore assez aiguisé leur ambition entrepreneuriale et politique, ainsi que leur capacité à prendre la parole. D’autres ressentent même ce fameux syndrome de l’imposteur, décrit par Shéryl Sandberg dans son livre « En avant toutes » (éd. JC Lattès, 2013), alors qu’elle a officié au Trésor Américain et dans les directions de Google et Facebook. Une auto-censure dommageable pour l’entreprise. Ce n’est pas un hasard si EcoRéseau Business consacre ce numéro aux femmes d’influence et à la gestion du risque en entreprise, créatrice de valeur. Sans tomber dans les clichés sur Vénus et Mars, il semble bien que la gent féminine adopte une autre approche du risque, peut-être salvatrice pour les entreprises. Que les talons hauts résonnent sur les parquets des salles des Comex ou conseils d’administration semble une bonne nouvelle pour l’équilibre général et le « risk appetite ». Une étude publiée dans Scientific Reports démontre d’ailleurs que l’instabilité des marchés est en partie due aux traders masculins, dont l’état de stress et la testostérone encouragent à la prise de risque. Au même titre que des golden girls modèreraient la soif de paris de leurs homologues cravatés, l’économie a besoin de la vision des entrepreneures, prenant plus (mieux ?) en considération les périls éventuels. Ce qui ne signifie pas pour autant un amour de l’immobilisme, mais une attention redoublée aux scénarios de crise possible. Désormais les femmes sont suffisamment nombreuses dans les espaces de direction, de management et d’expertise pour s’autoriser à être et dire. Ce n’est pas Stéphanie Savel, dirigeante de la plateforme de crowdfunding WiSEED interrogée en Regard Digital, qui dira le contraire. Les réseaux d’entrepreneures décrits en Réseaux & Influence visent à changer cet état d’esprit. L’Electron Libre de ce mois, Clémentine Chambon qui a fondé Oorja pour produire de l’électricité en Inde à partir de déchets agricoles et panneaux scolaires, annonce que la génération Y compte bien bouger les lignes. Pour le plus grand bien des start-up et entreprises de toutes tailles, qui ont besoin de cette touche féminine pour parfaire leur créativité et leur approche du risque. N’en déplaise à Aristote…

Jean-Baptiste Leprince
Fondateur & directeur de la publication

Julien Tarby
Rédacteur en chef

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