L’œil politique – Bruno Le Maire, l’homme du passif

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(Crédits : Shutterstock)

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« Vous avez tendance à reprendre le refrain d’il y a sept ans,  »l’homme du passé ». C’est quand même ennuyeux que dans l’intervalle, vous soyez devenu vous l’homme du passif » – François Mitterrand, lors du débat d’entre-deux-tours qui l’opposait en 1981 à Valéry Giscard d’Estaing.

Le locataire de Bercy vit des heures difficiles et se retrouve confronté à son bilan. « Le ministre est nu », si l’on veut dire… Malgré tout, voilà qu’il lorgne vers 2027 !

« Famille, je vous hais ! », disait André Gide. Bruno Le Maire peut entonner cette même rengaine à l’heure où son frère jumeau – également nommé Bruno, à la ressemblance frappante – arpente les médias avec son nouveau livre, La voie française (Flammarion) où la doublure propose un projet de redressement qui semble aux antipodes de celui décliné depuis sept ans par le ministre de l’Économie et des Finances.

Comme Emmanuel Macron pense tout le contraire de Macron Emmanuel, Bruno Le Maire semble avoir la capacité mentale de se dédoubler jusqu’à la contradiction totale. D’un côté, il y a l’homme politique dynamique qui dit ne pas avoir de tabou, prêt à tout réformer et à substituer dans une étrange formule « l’État-providence » à « l’État-protecteur ». Une posture qui vaut au moins pour ses livres et ses romans.

De l’inconstance à l’incompétence

Et puis il y a le réel, le vrai monde, où le ministre de l’Économie et des Finances se fait soudain bien plus prudent, partisan de l’inertie, énarque placide qui depuis sept ans laisse filer la dette et le déficit public avec une inconstance qui finit par ressembler à de l’incompétence.

Le problème des chiffres est qu’ils sont assez peu sensibles à la langue de bois. Ils disent une vérité que le maquillage des mots ne suffit plus à travestir. Bercy a tenté de les dissimuler mais les chiffres, les satanés chiffres sont là, comme le mal de tête survient après la gueule de bois. Le déficit public est à + 5,5 % du PIB. Un dérapage non contrôlé, très loin de l’objectif initialement attendu de + 4,9 %, plus loin encore des règles de convergence qui prévoient un déficit maximum autorisé fixé à + 3 %.

Il est assez probable que si son homologue britannique devait obtenir de tels résultats, celui-ci serait déjà sur le trottoir londonien avec son carton sous le bras, nanti d’un avenir politique tout à fait obstrué. Nul besoin de dire ce qui se passerait dans le privé, où l’on envisagerait sans doute le licenciement pour faute lourde assorti d’une mise à pied.

Pourquoi ne pas découvrir le monde de l’entreprise ?

Mais en France, les mauvais gestionnaires n’ont pas trop de mauvais sang à se faire… On ne change pas une équipe qui perd. Bruno Le Maire, après avoir un temps été raisonnable, envisage désormais de se porter candidat à la présidentielle de 2027. Sans doute parce que son premier choix, la Direction générale du FMI à Washington, semble s’éloigner au regard de ses mauvais résultats ministériels. Un comble pour l’auteur de Fugue américaine (Gallimard) ! En effet, difficile de faire la morale aux pays d’un tiers-monde devenu Sud global à propos de l’insolvabilité de leurs dettes… Cela lorsqu’on a soi-même « cramé la caisse » du « quoi qu’il en coûte ».

Bruno Le Maire peut se rassurer. S’il se porte candidat, il fera probablement moins pire qu’en 2017, où sa candidature à la primaire de la droite et du centre convainquit… 2,38 % des votants. C’est tout de même rageant car cette fois-là, il était bien sous la barre des 3 % ! Son slogan d’alors, « le Renouveau c’est Bruno », avait fait florès.

Mais comme l’indiqua Mitterrand à Giscard, l’homme du renouveau est depuis devenu « l’homme du passif ». Et quel passif ! Ne serait-il pas temps, à l’âge de 54 ans, de découvrir enfin le monde de l’entreprise ? Qui sait ? Il y aurait peut-être un beau rebond à la clef…


Les perles de la politique

crédits : RPR

Le RPR est de retour · C’est un nom oublié de la politique française qui refait soudain surface. RPR : Rassemblement pour la République, du nom du parti néo-gaulliste fondé par Jacques Chirac en 1976. Le député RN des Bouches-du-Rhône Franck Allisio s’est allié au maire LR de Marignane Éric Le Dissès pour recréer ce géant endormi. But de la manœuvre ? Faciliter la jonction de l’électorat de la droite classique vers celui du Rassemblement national. Le RPR et le RN tenaient d’ailleurs mardi 26 mars les « États généraux de l’immigration » en présence de Jordan Bardella et de sa nouvelle numéro deux aux européennes, l’essayiste Malika Sorel.

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