Les formations professionnelles courtes

Les formats courts : un moyen de pallier les freins de votre carrière ?
Les formats courts : un moyen de pallier les freins de votre carrière ?

Temps de lecture estimé : 4 minutes

En quête de profondeur…

Régulièrement réformée, la formation professionnelle fait parler d’elle. Pas toujours dans un sens positif. Pour autant, les formats courts peuvent enrichir un CV.

Un post sur LinkedIn à la recherche de témoignages, 832 vues… et aucun retour. L’intérêt des formations courtes professionnelles ne semble pas patent. Pourrait-on parler d’un certain embarras. De prime abord. Pourtant, de quelques heures ou de quelques jours, ces cursus constituent un marché d’envergure. En France, aujourd’hui, ce segment compte 60000 structures agréées – dont 8000 pour activité principale – pour un volume de 25 millions de formations et 17 millions de bénéficiaires en 2014, selon les dernières données connues. La durée moyenne est de 27 heures. Un chiffre qui tend à se réduire. De cinq jours il y a dix ans, une formation s’étale aujourd’hui sur deux jours. La raison ? Plus le temps, et pas plus de moyens non plus. « On veut former de plus en plus de salariés, d’indépendants, de chômeurs… avec des financements stables, s’agace Jean Wenaëre, président de la Fédération de la formation professionnelle (FFP). Or on peut parler de nécessité économique. Le capital humain est le premier facteur de production. Dans 20 ans, 50% des métiers actuels auront disparu, autant dire l’urgence de la question. »

Pas de révolution, des ajustements

Sécurité incendie, gestion de l’agressivité, de la maladie d’Alzheimer ou de la fin de vie… tous les ans, Estelle Perello, cadre administratif de la maison de retraite médicalisée Beauregard de Nanteuil-le-Haudouin (Oise) arrête son programme de formations. « Ces séquences apportent à chacun, explique-t-elle, et à l’équipe. L’effet de cohésion est perceptible. C’est un temps d’échange apprécié de tous. » Son budget : 25000 euros pour 40 salariés. Stéphane Cotard, grossiste à son compte en loisirs créatifs, Azimut créatif, est plus partagé. Le catalogue de la Chambre des métiers rend accessibles des mises au point toujours utiles sur le droit du travail, les fiches de salaire… La tonalité est différente en matière de technique. « Si un module ne colle par directement à ton actualité, ta problématique, tes outils… on en retire moins. C’était le cas à propos des newsletters, par exemple. Pas facile de répondre aux attentes de tous les participants qui baignent dans des environnements professionnels totalement différents. Mon activité n’avait rien à voir avec celle de la coiffeuse, du gérant d’un garage… » Le sentiment de gâchis est prégnant.

Les formations courtes ne font pas l’unanimité… Sans application immédiate et durable, le bénéfice est nul. Et gare aux ambitions démesurées. « Faire de nous des as de la vidéo en 14 heures était mission impossible », confie Isabelle, journaliste dans une maison d’édition. Jérôme Fauquembergue, il y a peu encore manager d’EuraTechnologies, pôle d’excellence économique dédié aux technologies de l’information et de la communication à Lille, s’interroge : « Un ou deux jours ? Tout juste bon pour acquérir un vernis, mais ces parenthèses sont beaucoup trop courtes pour apporter quelque chose de palpable. De quoi développer un périmètre intellectuel, mais pas de savoir-faire, ni d’opérationnalité. Et les entreprises ont tendance à avoir une vision court-termiste dans leur gestion du personnel, renforçant des compétences déjà présentes, créant des hyper-spécialistes quand elles devraient les ouvrir sur l’ensemble de l’activité. Tout le défaut des politiques en silo. »

Un atout sur le CV ?

Les diplômes, Thierry Boukhari, directeur délégué de Gifi ne leur accorde pas (beaucoup) d’intérêt. En revanche, son attention se porte précisément sur les formations courtes, suivies dans les deux ou trois dernières années. « Elles révèlent parfois davantage les traits de la personnalité que l’entretien, comme la pugnacité… La capacité à se remettre en cause, à suivre l’évolution de son métier… Autant de points positifs ainsi mis en lumière. » Aucun doute pour lui : le CV ne doit pas faire l’impasse dessus.

Pourtant, l’opération n’est pas gagnante systématiquement. « Décrocher une certification Microsoft pour l’informatique ou Sosie ou MBTI (évaluation de la personnalité et des motivations) pour les ressources humaines constitue un atout indéniable pour différencier une candidature, afficher la maîtrise de son secteur, explique Jamila Braik, responsable du centre Apec (Association pour l’emploi des cadres) d’Evry. Et ce n’est pas tant la durée que le contenu qui compte… Mais une formation ne peut pas amener à revoir son projet. C’est bien l’inverse. Le projet est-il réaliste ? Y-a-t-il un marché en face ? Se lancer dans une formation sans objectif bien ficelé serait une erreur : vous n’aurez pas un nouveau financement de si tôt ! »

Actuellement, les sessions linguistiques, l’informatique avec l’impact du digital, le socle de compétences de base (cf. encadré) et les formations comportementales, où comment manager des hommes… sont de loin les plus demandés. Toujours en rapport direct avec l’activité de la société. On ne peut pas tout demander à son entreprise.

Air du temps

Les formations dédiées au français cartonnent !

Sujet tabou il y a quelques années, les focus sur la grammaire et l’orthographe françaises se démocratisent. Cadres ou pas, tous les publics sont concernés. Il en va de l’image de marque de l’entreprise.

Avec le sourire, Laura Desmarez parle de son parcours. Sans avoir recours à l’anonymat – ce qui pour la thématique, n’est pas chose commune. A 51 ans, un Certificat d’aptitude professionnelle (CAP) vente en poche, cette ancienne directrice de magasin Gifi, aujourd’hui superviseur d’inventaires dans les Pyrénées Orientales, toujours pour cette enseigne de produits à bas prix, a repris récemment les bases du français. « Sur proposition de son supérieur hiérarchique, explique-t-elle. Le sujet a été abordé lors de l’entretien annuel. Je l’ai bien pris. Il n’y a pas d’âge pour évoluer et progresser. » Même entreprise, et même décontraction par rapport au sujet, avec Mickael Perodeau. Ce préparateur de commandes a décroché assez tôt du système scolaire. En fin de sixième exactement. « Pas facile de demander une formation sur le sujet, note-t-il, même si j’avais conscience d’avoir des lacunes. C’est gênant lors des mails à transmettre aux collègues et aux chefs. Travailler le français a ôté un peu de ma timidité. J’ai repris confiance en moi. » Deux trajectoires professionnelles à l’image des stagiaires en demande de formation en français.

Un marché qui fait florès

Même avec un taux de réussite de 91,4% au Baccalauréat général à la session 2016, les fautes d’orthographe s’étalent dans les mails et autres courriers professionnels. Les entreprises en ont pris conscience et aident leurs salariés à les chasser. Les lacunes en orthographe, un tabou ? C’est de moins en moins vrai. Pour preuve le boom des séminaires qui y sont consacrés. « Se réconcilier avec l’orthographe » pour Cegos et « S’entraîner à éviter les pièges de la langue française » ou « Rédiger des courriers et des e-mails efficaces et professionnels » chez Demos ou bien encore les ateliers proposés par les groupements d’établissements publics locaux (GRETA), les remises à niveau se multiplient. Le nombre de stagiaires de Cegos a bondi de 38% en un an, passant de 180 à 250. « La tendance devrait se poursuivre, souligne Pia Martin, responsable de cette gamme, comme ces stages vont être référencés pour le Compte personnel de formation (CPF), né de la dernière réforme de la formation professionnelle. » Et c’est sans compter la certification Voltaire qui a fait une percée notoire en quelques années – depuis 2008 exactement. « Plus besoin de faire son coming out dans l’entreprise, analyse Pascal Hostachy, fondateur et dirigeant de Woonoz, à l’origine du projet Voltaire. Avec dorénavant une plateforme et un coaching par mails et Skype, fini les complexes ! » Pas moins de 100000 certificats ont déjà été validés. 700 entreprises sont partenaires, 1500 établissements de formation associés, dont 300 à 400 dans le supérieur. Je parle français, tu écris français, nous dévorons le français. Et demain, peut-être, les mathématiques de la même manière, c’est le défi que s’est lancé Woonoz pour les mois à venir.

Pourquoi un tel business avec la langue de Molière ? « Tout le monde écrit, souligne Bernard Fripiat, auteur belge, à l’origine d’un site dédié (www.orthogaffe.com) mais aussi formateur pour différents organismes de formation. Les conditions de travail, le stress, la rapidité exigée… ne sont pas non plus étrangers à la poussée des fautes… Comme les secrétaires ont disparu, cadres et dirigeants alimentent aussi – depuis une dizaine d’années – les effectifs de ces stages. Ce segment assurément ne connaît pas la crise, même mieux on profite complètement de l’évolution technologique. » Selon Line Sommant, ancien membre du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) pour le respect de la langue française, ancienne prêtresse des dictées de Bernard Pivot, 25% des stages sont proposés par la hiérarchie, les autres sont volontaires. « Une condition sine qua none pour monter dans les strates de l’entreprise. »

Le dipositif CLéA

Développer l’employabilité de ses salariés peu qualifiés

On connaissait le Droit individuel à la formation (DIF), passé à la trappe avec le Compte personnel de formation (CPF). Dans la famille des sigles de la formation professionnelle, voici venu CLéA, nom du socle commun de connaissances et de compétences. Ce dispositif intéresse les collaborateurs sans qualification aucune, les décrocheurs, pour amorcer un cercle vertueux.

« Tout salarié de plus de 16 ans doit avoir un niveau de classe de troisième, explique Pia Martin, manager à la Cegos. Une stratégie pour aider les bas niveaux de qualification à se repositionner sur le marché du travail. Respecter les consignes, savoir s’organiser, communication orale, compter… 28 domaines sont à respecter. Le valider permet de prouver la maîtrise de l’ensemble des savoirs communs à tout secteur d’activité et de le faire figurer sur un curriculum vitae pour rebondir. » Au regard des 2,3 millions d’actifs non qualifiés que devrait compter l’Hexagone en 2020 – c’est-à-dire demain –, selon la Fédération de la formation professionnelle (FFP), l’information a son importance. « Les bas niveaux de qualification ont eu – souvent – une expérience malheureuse dans leur parcours initial, commente Jean Wenaëre, président de la FFP, aussi ont-ils du mal à se motiver, à repartir dans ce circuit. Ce travail incombe alors aux entreprises. »

http://www.moncompteformation.gouv.fr/mon-compte-personnel-de-formation/ma-liste-de-formations/clea-socle-de-connaissances-et-competences

Murielle Wolski

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