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« You will never walk alone »
Ceux qui suivent ces formations (MS, MBA…) bénéficient-ils vraiment, en plus d’une montée en compétence, d’un véritable apport de réseau ?
Les réseaux des Business Schools offrent l’opportunité aux cadres expérimentés qui les intègrent de se constituer ou d’étoffer leur carnet d’adresses. Voilà pour la théorie. Mais se vérifie-t-elle ? Désirant se réorienter ou accélérer leur carrière, ceux qui reprennent les études s’insèrent aussi dans les communautés créées par les écoles. Intégration dès le départ dans le réseau des anciens (Alumni), pédagogie participative basée sur l’échange et le partage d’expériences, vie associative intense, formation pratique auprès de professionnels et participation aux écosystèmes locaux ou sectoriels, constituent le ferment de ces réseaux. « Tout est fait pour créer un esprit de corps parmi les étudiants et faire vivre le réseau », indique Xavier Gendron, Pdg fondateur de BeWe, diplômé de l’ESC Lille en 1996 et actuellement ambassadeur lillois de l’association Skema Alumni. Cela fonctionne « comme une vraie communauté », poursuit-t-il, dans laquelle « on trouve des profils variés, souvent dans de hautes positions : cela ouvre des opportunités et constitue peut-être un véritable accélérateur ». « Le réseau m’a aidé tout au long de mon parcours, aussi bien dans mes stages et mes emplois que pour des choses beaucoup plus simples, comme bien s’intégrer dans un nouveau pays », ajoute Guillaume Duranton, consultant chez EDGE Luxembourg, diplômé en 2014 de Skema Business School. « J’ai récemment trouvé le lieu pour installer nos nouveaux bureaux luxembourgeois grâce à un collègue de promo. »
Une diversité source de richesse
Au-delà des savoirs théoriques et des compétences techniques qu’elles permettent d’acquérir, ces formations misent ainsi sur le réseau comme support sur lequel bâtir des opportunités. Elles surfent sur la dynamique croissante du réseautage d’affaires, selon laquelle les échanges engendrés par la participation à différentes communautés aboutissent à la création de valeur. « Notre volonté, c’est de créer une dynamique au sein de chaque promotion et au sein de l’association d’anciens, les Alumni. On s’assure ainsi, dès le recrutement, que les participants ont la capacité d’être actifs et de s’engager dans le réseau », souligne Véronique Carresse, responsable « programme, admission et développement » de l’Excutive MBA de Skema Business School. Ingénieur qui accède à un poste de management, médecin qui devient actionnaire d’une clinique, cadre en reconversion, entrepreneur porteur d’un projet de création d’entreprise : ces formations accueillent une grande variété de profils, en termes d’âge (de 30 à 50 ans en moyenne), de nationalité, de parcours professionnel et d’expériences, mais aussi de secteurs d’activité. « Ce sont souvent des profils avec un parcours d’origine plutôt technique ou scientifique, sans expérience dans le management, mais qui occupent ce type de fonction », constate Véronique Carresse. En MBA, comme en MS, « l’objectif est d’acquérir une double compétence ou de se spécialiser dans un domaine afin d’accélérer sa carrière », explique William Hurst, responsable de l’Executive MBA d’Audencia Business School. « Quel que soit le programme choisi, MBA ou MS, full time ou part time, les enseignements sont adaptés aux expériences des participants », poursuit-il. « On travaille sur les compétences, mais aussi sur le sens politique, sur l’adoption d’une posture de leadership. L’intégration à un réseau participe à cet apprentissage. » Professeurs, enseignants et professionnels qui interviennent pendant la formation sont mis à contribution dans ce premier réseau des MBA et Mastères. « Tous sont des relais de compétences, d’expériences et de savoir-faire. L’ensemble forme une véritable communauté », précise Véronique Caresse. Au sein de Montpellier Business School, la démarche est similaire. « La formation est ponctuée de travaux, comme la réalisation d’un audit, qui nécessitent de rencontrer des entreprises. Notre mission et celle de nos enseignants, très impliqués dans l’écosystème industriel local, est d’ouvrir des portes, de partager des contacts », souligne Magdalena François-Thurin, responsable du MBA à Montpellier Business School. « Il s’agit d’aider les participants à donner du sens à leur réseau, mais aussi de les en rendre courtiers, c’est-à-dire d’avoir le réflexe de mettre en contact les membres de son réseau, d’être créateur de démultiplication, de travailler en arborescence. »
Il résulte de cette approche un « vrai bouillon de culture », témoigne Sandrine Zwiller-Panicz, en cours de diplomation à Montpellier, après 27 ans dans l’industrie pharmaceutique. « Au cours de ma carrière, j’ai eu accès à des formations de haut niveau dans mon secteur d’activité. L’intérêt et la richesse du MBA, c’est la rencontre et la confrontation avec d’autres milieux, d’autres secteurs professionnels, d’autres points de vue. » Selon elle, « ces rencontres permettent de créer des liens directs. On sollicite ensuite plus facilement le réseau, parce qu’on le connaît. Cela ouvre de nouvelles et nombreuses possibilités ».
Une communauté visible
Ainsi, le parcours en MBA et MS permet d’accéder, explique William Hurst, à « un premier cercle de réseau, constitué par les étudiants et les intervenants. Le second cercle, c’est le réseau des anciens de l’école que tous intègrent dès leur premier jour ». Pour Martin Barbier, de la direction de l’association EDHEC Alumni, qui regroupe 40000 membres, dont 22% vivent à l’étranger dans 123 pays, « les associations d’anciens sont une communauté que l’on intègre à vie. Nous avons coutume de dire « EDHEC un jour, EDHEC toujours » » s’amuse-t-il. « Le réseau n’est pas seulement une chose vers laquelle on se tourne quand on est dans le besoin, mais un investissement régulier et constant », ajoute l’ancien de Skema, Xavier Gendron. Conscientes de la valeur ajoutée de ces réseaux, les écoles investissent dans leurs associations d’anciens. Ces communautés « Alumni » accompagnent la carrière de leurs membres, animent des « clubs » sectoriels ou géographiques (locaux ou internationaux), recrutent des ambassadeurs et soutiennent l’organisation d’évènements pour multiplier les occasions de rencontres et d’échanges entre les membres. À titre d’exemple, l’association Skema Alumni (40000 membres dont 20% d’internationaux issus de 140 pays) se compose d’une équipe de sept personnes chargées d’animer le réseau. Une trentaine de « clubs » organisent ainsi avec son soutien plus de 150 évènements chaque année. « Le réseau de l’école reste ainsi un vivier de contacts, qui peuvent être de futurs partenaires, de futur recrues, ou de futurs conseillers », résume Magdalena François-Thurin.
Témoignages
« Un véritable accélérateur »
« L’association Alumni de Skema Business School fonctionne comme une vraie communauté, même si ce formidable réseau reste trop peu exploité. On y trouve des profils variés, souvent dans de hautes positions. Cela ouvre des opportunités et peut être un véritable accélérateur », constate Xavier Gendron, fondateur de BeWe, et ambassadeur lillois de l’association Skema Alumni. « Quand je reçois par ce biais une sollicitation ou une demande de mise en relation avec mon réseau, je prends toujours le temps d’y répondre. » Aujourd’hui à la tête de la société BeWe, une entreprise de services du numérique, spécialisée dans la socialisation des systèmes d’information (réseaux sociaux d’entreprise notamment), il n’hésite pas à faire bénéficier ses pairs de son expérience. Après l’obtention de son diplôme à l’ESC Lille (intégré ensuite à Skema Business School) en 1995, il travaille d’abord en Côte d’Ivoire au sein du groupe Axa, avant de rejoindre la PME Absys, basée à Lille et spécialisée dans le développement et l’intégration de solutions de gestion. Il y développera pendant près de six ans les activités de cette société en Belgique et au Luxembourg. Quand la PME devient Absys Group en 2006, il finit par administrer une joint-venture basée au Danemark et devient ensuite directeur d’une filiale au Brésil. De retour en France, il fonde BeWe, avec un ami rencontré à l’ESC Lille. Aujourd’hui ambassadeur du réseau Alumni, il organise chaque année quatre tables rondes avec l’écosystème entrepreneurial lillois. Un « moyen de partager des expériences avec ses pairs et de faire vivre la communauté », explique-t-il.
« Un vrai bouillon de culture »
« Le réseau, c’est la richesse de ces formations », témoigne Sandrine Zwiller-Panicz, étudiante à Montpellier Business School. « On y rencontre une grande variété de profils et d’expériences parmi les participants et les intervenants, mais aussi en réalisant nos travaux pratiques, comme les audits d’entreprise. C’est une formidable ouverture, qui aide à adopter d’autres angles », poursuit-elle. « On côtoie également, dès le départ, les anciens, notamment par le biais de conférences. Ces rencontres permettent de créer des liens directs. On sollicite ensuite plus facilement le réseau, parce qu’on le connaît. Cela ouvre de nouvelles et nombreuses possibilités », poursuit-elle. Aujourd’hui en reconversion dans le conseil, cette cadre qui a passé 27 ans dans l’industrie pharmaceutique sollicite régulièrement ce réseau acquis pendant le MBA pour faire avancer ses projets. « On trouve toujours quelqu’un pour nous renseigner », assure Sandrine Zwiller-Panicz. Elle, qui souhaite développer son projet en Afrique, a ainsi noué des contacts au Maroc, par le biais de l’antenne de Casablanca de l’école, et répondu à un appel d’offres. « L’intérêt, c’est qu’on partage une formation commune et, ainsi, des valeurs, une vision et une même façon de travailler. Cela facilite les contacts et les collaborations. »
« Une approche du réseau horizontale plus que hiérarchique »
En intégrant le MBA de Montpellier Business School (MBS) il y a deux ans, Stéphane Escalier voulait « comprendre le marché et ses évolutions, avoir une vision plus précise du monde de l’entreprise et du monde entrepreneurial ». Il en est ressorti avec « un projet de création d’entreprise et un Business Angel prêt à (le) financer et (l’) accompagner ». L’expérience « a également été une réelle ouverture sur l’innovation, et notamment sur l’innovation managériale et ses potentialités », poursuit Stéphane Escalier. Cet ingénieur de formation, qui a fait carrière dans l’aéronautique, notamment chez Safran, a rejoint le sous-traitant américain du secteur, Triumph Group, il y a cinq ans. Il est aujourd’hui Business development manager du groupe, et « seul représentant français de la société », s’amuse-t-il. Selon lui, la force d’un MBA repose sur la diversité des profils rencontrés, tant parmi les étudiants que les intervenants et le réseau de l’école. « À Montpellier, l’écosystème est orienté vers le médical et le numérique, des univers très innovants et collaboratifs. L’approche du réseau y est horizontale plus que hiérarchique et donne la base d’une relation fructueuse », témoigne-t-il. Cette vision du réseau, faite d’échanges, se retrouve dans le projet d’association qu’il porte avec ses camarades de promo. « Notre idée, c’est de créer un espace de partage sur les problématiques des entrepreneurs de tous horizons. » Un nouveau réseau à venir…
Elsa Bellanger