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La région nantaise fait figure de bon élève de l’Hexagone grâce à des atouts industriels choyés par les décideurs locaux et façonnés pour devenir les filières à succès de demain.
Qui a dit que l’industrie française est mourante ? Pendant qu’économistes, politiques et écrivains philosophent sur le déclin de nos usines qui plient sous le poids de la concurrence étrangère, un territoire résiste à cette lame de fond. Nantes Métropole et ses alentours brillent par une vitalité économique qui fait des envieux. Le département de Loire-Atlantique a profité d’une croissance de ses emplois de 21 % entre 1999 et 2009, au moment où la moyenne nationale affichait péniblement une hausse de 12 %. L’un de ses secrets : l’industrie. « Nous avons de belles cartes à jouer. Le potentiel de nos filières irrigue tout le territoire local », se targue Jean-François Gendron, président de la CCI de Nantes Saint-Nazaire. Et la chambre de commerce compte bien faire du succès d’aujourd’hui celui de demain, puisque, de l’aéronautique aux constructions navales en passant par les énergies renouvelables, les filières industrielles championnes sont toutes au cœur de sa feuille de route destinée à assurer le développement des années à venir.
Le territoire a commencé à déployer l’arsenal sur lequel il s’appuiera pour gagner la bataille économique de demain. « Neopolia joue un crucial dans cet essor industriel », assure Jean-François Gendron. Ce réseau, qui regroupe quelques 150 entreprises et 13 000 salariés, est au cœur des projets aéronautiques et navals. Son influence s’est considérablement étendue au cours des dernières années. Il intervient également dans les chantiers offshore, ferroviaires et, depuis deux ans, dans les initiatives relatives aux énergies marines renouvelables. La mission de Neopolia : la maîtrise d’œuvre d’actions collectives dans ces secteurs florissants. « En se regroupant ainsi, les sociétés membres décrochent d’importants marchés à l’étranger. C’est une vitrine pour toute la région », se réjouit Jean-François Gendron.
Dans le prolongement des leviers d’activité comme Neopolia, les décideurs locaux veillent à soutenir la recherche scientifique et technologique, garante de la croissance de demain. L’IRT (Institut de recherche technologique) Jules Verne concentre de la matière grise utile à de nombreuses filières. Il travaille notamment à la conception de nouveaux matériaux composites pour l’aéronautique, le domaine naval, l’énergie. Son but est de répondre aux défis technologiques comme la longévité des produits, la sécurité, et surtout l’allègement de structures, un des grands impératifs de l’aviation, soumises à une nécessité toujours plus forte de diminuer les consommations de kérosène. Une exploitation plus écologique des matériaux guide l’ensemble des travaux. Une évolution qui rejoint les vastes projets de la région en matière d’énergie marine renouvelable, pour lancer toute l’économie locale sur les rails du « green business ». Le potentiel vert est immense, « mais les profits tirés des initiatives écologiques ne seront pas immédiats, loin s’en faut », relativise Nicolas Douchement, directeur du Salon des Entrepreneurs de Nantes Grand-Ouest. « Tant que les critères verts seront vus comme une contrainte et non comme un levier de croissance, le green business restera une idée lointaine. » Pour faire changer les mentalités au plus vite, les pouvoirs publics interviennent à grand renfort de communication. « Conscients des enjeux, la CARENE (Communauté d’agglomération de la région nazairienne et de l’estuaire), ou encore Nantes Métropole, n’hésitent pas à voter des budgets de sensibilisation », remarque Nicolas Douchement.
L’aéronautique
C’est l’un des moteurs de l’économie locale. La région accueille le deuxième site français d’Airbus et, dans le sillage de l’avionneur, quelques 370 entreprises sous-traitantes représentant 16 000 emplois. Deux sites de production majeurs animent la filière. A Nantes, Près de 2 000 salariés oeuvrent pour que les Airbus prennent forme (fabrication des caissons centraux de voilure, des poutres ventrales, des ailerons…). A Saint-Nazaire, 2 300 autres salariés se consacrent exclusivement à l’intégration des fuselages. Le destin économique des multiples fournisseurs est directement lié au carnet de commandes d’Airbus. Celui-ci n’a jamais été aussi rempli : le groupe livre désormais un appareil par jour et dispose de 4 à 5 ans de chiffre d’affaires garanti devant lui. Un rythme qui ne se tarira pas. Devant la demande étrangère, la flotte mondiale passera de 19 000 avions en 2012 à 36 000 entre 2015 et 2030. Avenir assuré pour les PME du secteur.
La construction navale
La filière locale tient la dragée haute à bon nombre de concurrents. Après une relative accalmie conjoncturelle, les projets reprennent avec vigueur. STX, un des leaders mondiaux de l’industrie navale, commencera fin 2013 la construction du plus grand paquebot du monde : 360 mètres, 6 360 passagers, 2 700 cabines et une livraison prévue pour 2016. Un défi technique et une vitrine précieuse pour le marché international. Deux tiers des emplois nationaux relatifs à la construction navale, civile et militaire se situent sur l’estuaire de la Loire. Le territoire tend à focaliser son savoir-faire sur les produits haut de gamme et les navires de très grand gabarit. Un domaine prometteur, les voies maritimes étant toujours plus empruntées, même si la concurrence asiatique complique les paris sur le long terme.
Les énergies marines renouvelables
Ils représentent à terme 2 000 nouveaux emplois pour la région. Le pôle « Nantes Saint-Nazaire » constitue véritablement le cœur de l’émergence de cette filière d’avenir. Dans le cadre du premier appel d’offres pour la construction de parcs éoliens offshores, le territoire s’est vu attribuer deux projets titanesques : le parc du banc de Guérande et le parc des Deux Îles. Le plan de développement des énergies renouvelables issu du Grenelle de l’Environnement prévoit quelques 1 200 éoliennes à installer au large des côtes françaises. On parle d’une filière capable de créer plusieurs dizaines de milliers d’emplois durables à l’échelle nationale. L’éolien flottant et l’hydrolien concentrent également de nombreux espoirs.
L’agroalimentaire
18 % de l’emploi industriel du département de Loire-Atlantique provient de ce secteur. Nantes Métropole représente le deuxième MIN (Marché d’intérêt national) avec 1 260 salariés répartis dans 103 entreprises. Plusieurs grands noms apportent leur dynamisme, comme les plats cuisinés Tipiak, les biscuits LU, ou encore le groupe Nestlé dans le domaine laitier. Le PONAN (Pôle nantais Alimentation et Nutrition) constitue l’un des premiers pôles nationaux de recherche sur l’alimentation et accompagne les mutations et l’optimisation de la filière, notamment en matière de génie des procédés et de sécurité alimentaire. Un rôle central par rapport à la nécessité toujours plus grande d’intégrer des critères éco-responsables dans cette industrie.
Les TIC
Si les filières industrielles donnent à la région nantaise tout son éclat, les services ne sont pas en reste. Les technologies de l’information et de la communication emploient plus de 18 000 personnes au sein de 1 500 sociétés, en particulier dans le génie logiciel. Nantes Métropole concentre la grande majorité des entreprises. Cap Gemini, Bull, Alcatel, Logica, Sygma sont quelques uns des grands noms du secteur présents localement. Entre 2005 et 2008, le nombre d’emplois avait notamment connu un bond exceptionnel de 24 %. Environ 2 200 étudiants formés chaque année nourrissent le vivier de compétences nécessaires.
Les industries créatives
Directement liées aux métiers des TIC, les activités créatives (multimédia, audiovisuel…) jouent elles aussi un rôle moteur sur ce territoire pleinement ancré dans le potentiel technologique du 21ème siècle. Autour de l’Ecole de design Nantes Atlantique et de l’Ecole nationale supérieure d’architecture de Nantes gravitent une multitude d’entreprises. Une Cantine numérique a ouvert ses portes depuis 3 ans. Ce lieu d’échanges et d’innovation est le troisième du genre après les implantations de Paris et Rennes, et forme une vitrine de l’économie numérique. Le but de la Cantine numérique est de favoriser la vitalité de l’économie numérique locale par la mise en réseaux des acteurs et l’émergence de projets communs. Quelques 200 mètres carrés de « co-working space » sont disponibles dans ce but.
Les verbatims
« Des dispositifs d’incitation fiscale seraient intéressants de la part des pouvoirs publics pour que les enjeux du développement durable intègrent réellement les filières. C’est par ce biais que la région entrera de plein pied dans l’ère du green business », Nicolas Douchement, directeur du Salon des Entrepreneurs de Nantes Grand-Ouest.
« Le territoire contient de nombreuses PME, mais trop peu d’ETI. Favoriser les coopérations entre PME et grands groupes est essentiel. De cette manière, les PME sont tirés vers le haut, vers de nouveaux marchés », Nicolas Debon, directeur du développement économique de Nantes Métropole.
« L’évolution des filières industrielles demande à ce que les managers soient toujours plus polyvalents. L’offre de formation nécessite des savoir-faire plus transversaux, c’est pourquoi notre collaboration avec d’autres établissements comme l’Ecole Centrale ou l’Ecole d’Architecture de Nantes est de plus en plus étroite », Frank Vidal, directeur d’Audencia Group.
« Le département est également atypique en raison de sa dynamique démographique. Entre 2010 et 2040, la population de Loire-Atlantique augmentera de 355 000 habitants », Jean-François Gendron, président de la CCI de Nantes Saint-Nazaire.
Mathieu Neu