« L’examen médical » par Guillaume Ouattara de l’Université de technologie de Compiègne

Temps de lecture estimé : 3 minutes

L’examen médical

L’examen ne prit que quelques secondes. Une minute tout au plus. Le scanner émettait un vrombissement qui devenait presque apaisant.

Allongée sur un long fauteuil molletonné, la jeune femme passa une main derrière sa nuque. Elle sentait rouler sous ses doigts la boule qui l’angoissait tant depuis plusieurs jours.

– Ce n’est plus qu’une question de minutes pour connaître les résultats de votre examen, lança le docteur sur un ton léger.

Le regard de la jeune femme parcourut distraitement le cabinet. Il y avait là tout l’attirail d’un cabinet de médecin. Écrans dernier cri, appareils pour prendre toutes sortes de mesures et surtout le Tensunil qui trônait au beau milieu de la pièce.

Les yeux rivés sur son écran d’ordinateur, les doigts du médecin tapotaient fébrilement sur le clavier. Au fond de la pièce, une machine se mit soudain en marche.

– Eh bien voilà, nous en avons bientôt fini Mademoiselle.

Le son de la machine était strident et un léger parfum de plastique se mit soudain à embaumer la pièce. Le médecin se leva et alla près de l’engin. Il revint au bout de quelques secondes avec un petit objet translucide, à peine plus grand qu’un comprimé.

– Comme vous l’avez sans doute compris, notre Tensunil nous a permis de localiser précisément la zone où agir. L’adjuvant que je viens d’imprimer est parfaitement adapté.

Il saisit le poignet de la jeune femme et vint y déposer l’objet translucide. Après quelques secondes de pression, celui-ci vint se fondre dans la peau de la patiente.

Il avait fallu des années de recherche pour arriver à un tel résultat. La clef avait été le travail d’un jeune chercheur suédois qui avait le premier eu l’idée de faire analyser près d’un siècle de littérature médicale par des algorithmes de deep learning. La suite avait été d’une rapidité impressionnante.

Le médecin lança un regard satisfait vers la patiente.

– Voilà, votre tumeur devrait se résorber dans les prochaines heures. Avez-vous pensé à amener votre carte Vitale ?

Avis d’expert : Pascal Alberti, Professeur à l’UTC, consultant spécialisé en innovation et créativité

« L’ingénieur contemporain, ce n’est pas simplement quelqu’un qui va gérer des sciences pour utiliser une nouvelle techno mais celui qui en perçoit l’impact »

Comment encouragez-vous la créativité au sein de vos enseignements ?

Le président fondateur voulait former des têtes bien faites. Dès les origines de l’UTC, les enseignements ont été pensés en ce sens pour construire des parcours polyvalents à la croisée des sciences de l’ingénieur et des sciences humaines. On s’est aperçu que cela crée une forme de souplesse intellectuelle, un ferment pour la créativité. Ensuite on a créé des parcours, des spécialisations et des domaines pour encourager la créativité.

Je suis chargé de piloter par exemple le cursus de spécialisation management des projets innovants. C’est un cursus ouvert à l’ensemble des départements. Dans ce cadre, nous poussons les étudiants à la créativité à partir d’un constat simple : nous ne pouvons pas mener d’actions sans y apporter une réflexion. Nous y prodiguons des enseignements théoriques spécifiques à la créativité et ensuite les étudiants sont confrontés à des mises en pratique par une mixité des approches : on les pousse à combiner les savoirs avec les pairs et à sortir des champs dans lesquels on les met en action. L’enjeu est de comprendre un maximum le contexte qui les entoure pour les encourager à développer un maximum une démarche de divergence et de mettre en œuvre la démarche de convergence le plus tard possible.

Quid de l’entrepreneuriat ?

Il y a des étudiants qui arrivent en tant que porteurs de projet. On a un parcours entrepreneuriat Elite qui découle du programme Sport Elite. Mener de front le sport de niveau et le cursus ingénieur demande des aménagements. Sur ce principe, nous avons développé la déclinaison entrepreneuriale. Le dernier exemple en date est celui

d’un étudiant qui voulait créer une société spécialisée dans le dessalement d’eau par osmose inverse. Nous avons fait en sorte que l’étudiant obtienne son diplôme tout en le mettant sur les rails de l’entrepreneuriat. Aujourd’hui, il a créé sa structure au Maroc. Nous avons structuré son projet en le « challengeant » dans les différents enseignements qui lui étaient proposés. Pour ceux qui n’ont pas d’idées, nous leur demandons de porter des projets associatifs ou industriels. Souvent ces problématiques font émerger des idées. Si elles nous semblent viables, nous prenons alors la décision de faire rentrer les étudiants dans des cursus adaptés pour aller le plus loin possible dans la concrétisation de leur projet.

Quel est selon vous l’avenir du métier d’ingénieur ?

Avec un confrère, nous sommes en train d’écrire un article sur la perception de la fonction d’ingénieur selon l’école où l’ingénieur a réalisé ses études. La perception du métier varie du tout au tout.

Pour certains la profession se résume à être un expert technologique dans un domaine restreint. A l’UTC, notre vision diffère. L’ingénieur est un acteur à l’interface du monde et de la technologie. Il doit comprendre l’évolution du monde et sa complexité. Nos ingénieurs doivent apporter cette valeur ajoutée. Le principe est celui de s’apercevoir qu’introduire de nouvelles solutions change la façon de voir le monde, cela change même la compréhension du monde. Selon nous, l’ingénieur contemporain, c’est celui qui sait se projeter vers l’avenir. Ce n’est pas simplement quelqu’un qui va gérer des sciences pour utiliser une nouvelle techno mais celui qui en perçoit l’impact. C’est une vision particulière qui n’est pas partagée par toutes les écoles d’ingénieurs.

Propos recueillis par Geoffroy Framery

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