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Passé le traumatisme de la pandémie, quelles leçons peuvent tirer les chefs d’entreprise de ce cataclysme ? Comment leurs entreprises ont-elles réussi à se transformer, à expérimenter pour leur survie ? Découvrons comment cette période qui a imposé de revoir leur façon de penser, de s’organiser, de travailler, a été une opportunité rarement connue de se réinventer et d’innover.
Le 17 mars 2020, c’est le choc : la France s’arrête pour une durée incertaine, paralysée par un virus inconnu qui fait des ravages et terrorise.
« La pandémie est venue percuter les entreprises avec une force incroyable. Une violence inouïe ! » nous dit Nicolas Masson, PDG de RBL Plastiques à Chateaubriand (44), une PME spécialiste du thermoformage de 120 salariés.
David Arnaud Fouchard, Directeur de DLE Ouest, filiale du groupe Eiffage, souligne à quel point ses équipes et ses salariés ont souffert de l’incertitude économique mais aussi du télétravail, inimaginable jusqu’alors dans le monde des travaux publics.
« En période de crise, il y a toujours un effet loupe, les problèmes sont intensifiés et le temps se raccourcit. De nombreuses entreprises ne se posent plus la question de la stratégie à trois ans mais s’interrogent sur leur capacité à survivre ! » analyse Fabien Pelletier, cofondateur de Pléiade, un cabinet de consulting spécialisé dans l’accompagnement d’entreprises sur les aspects stratégiques et les ressources humaines.
C’est dans ces moments que le principe de l’effectuation prend tout son sens puisqu’il est fondé sur les ressources à disposition et sur les opportunités qui se présentent. « On passe d’une stratégie causale à une approche opportuniste, au sens noble. En période de crise, de nombreuses innovations naissent d’opportunités commerciales car il y a un besoin urgent de se protéger. Ce besoin incite les entreprises à changer de paradigme, de marché, à revoir leurs relations avec les différentes parties prenantes. »
Nicolas Masson, qui, en quelques jours et par instinct de survie pour RBL Plastiques, s’est lancé avec ses équipes dans la fabrication de visières de protection, parle de « fulgurance ». « Cette fulgurance nous a permis une remise en question très rapide. Elle nous a incités à mettre en œuvre des solutions inimaginables dans la normalité de notre train-train quotidien ».
Accélération et manque d’interaction
Pour le secteur de l’événementiel, l’un des plus impactés par cette pandémie, la question de continuer d’exister s’est immédiatement posée. Après l’annulation du salon Global Industrie (salons Midest, Industrie, Smart industries et Tolexpo), Sébastien Gillet, directeur de la division des Salons professionnels GL Events Exhibitions, s’est trouvé en première ligne pour la création de GI Connect en 6 semaines et demie. Pour ce premier salon totalement digital et dédié à l’industrie, « l’objectif était de laisser à nos exposants la possibilité de présenter une nouveauté en format pitch de 3 minutes, avec des échanges questions et réponses ».
Comme pour tout processus d’innovation, l’expérimentation ne s’est pas faite sans mal. « GI Connect a attiré 6 000 visiteurs, mais le matching et les rendez-vous d’affaires n’ont pas toujours bien fonctionné. Ce point sera amélioré », promet Sébastien Gillet.
Pour Vincent Coëtmeur, commissaire aux comptes dans un cabinet de 70 collaborateurs, « l’expérience du télétravail à 100 % a mis en évidence l’agilité et la mobilisation des équipes, mais elle a également montré ses limites dans les missions d’audit qui requièrent une grande interaction dans les échanges ». Ressenti également partagé par les collaborateurs du cabinet pour qui le présentiel est source d’efficience, de coordination et d’harmonisation.
La pandémie a été un grand accélérateur des changements engagés au sein de ces entreprises avant les événements. Si la gestion électronique des données et des dossiers était entamée et figurait dans les objectifs du cabinet de Vincent Coëtmeur, il a fallu mettre en œuvre une approche disruptive de la tenue des AG.
« Cette crise a permis de déployer des dispositifs de communication innovants pour compenser l’impossibilité du présentiel ».
Il reste qu’un des marqueurs les plus emblématiques dans cette période d’innovation et de réinvention a été la place centrale de l’humain dans les organisations. « Même les métiers des travaux publics sont en mesure de développer le télétravail pour une partie des effectifs et nous devons investir dans nos collaborateurs pour la recherche de nouvelles techniques ou procédés », affirme David Arnaud Fouchard. Pour Nicolas Masson, chez RBL Plastiques, cela s’est traduit par quatre accords sur le temps de travail avec les salariés, plus un à venir sur la qualité de vie au travail.
Pour beaucoup, cette crise aura été l’occasion d’expérimenter la destruction créatrice théorisée par Schumpeter en 1942, à un niveau jamais connu par nos générations. Reste à vérifier que cette extraordinaire dynamique de l’innovation perdurera au-delà de la pandémie.