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Cocktail créatif
Un lieu, un verre, un pitch… et tout peut commencer. Les apéros des jeunes pousses, « the place to be » pour accélérer son business.
«On vient, on écoute, on se lance et on présente… À chaque fois, j’ai trouvé des gens qui trouvaient l’idée fort intéressante. A chaque fois il s’agit d’une communauté passionnée qui partage des valeurs fortes sur l’état d’esprit de la pratique, le respect des autres et de la nature. J’ai aussi eu des feedbacks sans concession, intéressants, notamment sur le business plan et les difficultés à concurrencer ceux déjà en place comme clickandboat, boaterfly ou Samboat qui se lançaient. Et bien sûr quelques avis sur ma capacité à faire grossir cette niche face aux généralistes comme Zilok et E-Loue qui drainent aussi un public de non spécialistes. » Il y a trois ans, en fin d’études d’école de commerce, Louis a fréquenté quelques petits déjeuners, start-up week-ends et apéros numériques à Bordeaux dans le cadre de la création de sa société de locations de bateaux et planches de paddle entre particuliers sur la côte Atlantique. Windloc n’a pas abouti mais le jeune homme est ressorti des 18 mois d’expérience plus affûté pour son prochain projet autour d’une offre locavore dans le Sud-Ouest. « Vraiment, ce que je retiens, c’est ce “share spirit” avec d’autres entrepreneurs, certains beaucoup avancés dans leur projet d’entreprise, qui n’ont jamais hésité à partager leurs expériences, leurs réussites comme leurs échecs. J’ai toujours senti que les gens avaient envie que je réussisse et ça a été un bon moteur. » Bordeaux, Lyon, Marseille, Paris, mais aussi Nantes, Strasbourg… le format du pitch convivial fait recette, sans doute parce qu’il accorde autant de bienveillance aux projets en « early stage » qu’il apporte de l’efficience pour les faire avancer.
Être identifié
19h30, 2 novembre, rue de la Victoire – ça ne s’invente pas ! –, dans le 9e arrondissement de Paris. Le Studio, lieu d’expo et d’art, accueille la soirée mensuelle des Apéros Entrepreneurs. Comme tous les premiers jeudi du mois, ils sont 80, dont quelques pitcheurs autour d’un verre. Il y a là Kitchen Up, Boo Shopping, Jungle-Crisps, Blacksmith… Cannelle Magdane, avocate en droit des affaires et spécialiste des levées de fonds, est membre du bureau de l’association qui gère ces apéros pour startuppers. « Elle a été lancée il y a huit ans, on prend le lead chacun notre tour, présente la jeune femme. L’idée est de créer du lien autour d’un verre. On vient ici avec son projet, plus ou moins avancé. Beaucoup ont commencé seuls, certains arrivent avec une idée, d’autres avec une première version bêta sous le bras. D’autres encore ont déjà effectué une première levée de fonds. Certains recherchent un associé business ou davantage un CTO, la denrée rare. Tout le monde est le bienvenu, certains sont même encore dans des entreprises classiques et rêvent d’entrepreneuriat, d’autres hésitent encore sur une idée… » Chaque pitcheur a dix minutes pour exposer la sienne, souvent un premier pas important pour être identifié.
Dialogues constructifs
À 30 ans, Pauline Ronez est consultante en assurances et en protection sociale auprès des Axa, Covea, MMA et autre Humanis. Elle fréquente les Apéros Entrepreneurs parisiens depuis quelques mois. Après un premier projet abandonné autour du big data, elle a lancé sa start-up dans un secteur inattendu : le deuil. « “Une Rose Blanche” est une plateforme de soutien aux personnes qui perdent un proche. Pas sur la partie obsèques, mais sur du conseil pour gérer ces moments et les mois qui suivent. » Ce qu’elle cherche en fréquentant ces soirées ? « À m’entraîner, à parler de mon projet dans un environnement bienveillant mais affûté, qui n’a pas peur de poser des questions. Par exemple, j’ai compris en interrogeant certains développeurs sur le référencement que je devais d’abord lancer un blog éponyme, avec des conseils, des réponses aux questions que l’on se pose. Cela constitue, du coup, la partie gratuite de mon service qui sera lancé en janvier. Il va consister en un espace réservé au défunt pour recueillir des photos et des témoignages, aider d’un point de vue moral, faciliter les démarches, gérer les réseaux sociaux, organiser une cagnotte, mettre en place des actes symboliques pour honorer la mémoire d’un disparu… » Il n’y a en fait pas vraiment de questions sur le business plan, mais plutôt des retours éclairants, des réponses à des questions : est-ce que j’utiliserais ton service en tant que client ? Ce qui me gêne ou me touche dans ton pitch… « Des conseils adaptés à la situation aussi, différents de la vision des structures d’accompagnement que je fréquente, comme Les Premières, ou les incubateurs, dont c’est le métier d’accompagner des dizaines de projets », ajoute Pauline Ronez. Des « bêta » venus chercher des « only users », des retours directs pour ceux qui ont un projet B to C… « Certains se sont rencontrés lors de ces soirées et on voit les projets évoluer », se félicite Cannelle Magdane, qui fixe un nouvel objectif : « Certains de nos rendez-vous sont déjà un peu plus gros, comme celui organisé au printemps dans l’École 42 de Xavier Niel, mais nous allons accentuer l’information sur les levées de fonds et faire intervenir des fonds VC. » Vous reprendrez bien un drink ?
Olivier Remy