Affacturage, la fintech pour les TPE

Les fintechs entrouvrent une nouvelle voie pour les TPE.
Les fintechs entrouvrent une nouvelle voie pour les TPE.

Temps de lecture estimé : 5 minutes

Quand les fintechs ont rdv avec les TPE/PME

Se financer à court terme grâce à l’affacturage lorsque que l’on est une TPE s’avère parfois être un vrai parcours du combattant. Pour se faciliter la vie, pourquoi ne pas choisir l’option fintech ?

Fintech, blockchain, bitcoin… nos comptes Twitter et LinkedIn, notre boîte mail, tous débordent de contenus sur ces thèmes à la mode. A chaque fois, le même slogan : le secteur français de la fintech est « en ébullition ». A l’instar du crédit ou des services de paiement, le secteur de l’affacturage n’a pas échappé à l’appétit dévorant de ces jeunes louves de la finance. Il faut dire que le marché a de quoi séduire. Au total, sur l’ensemble du premier semestre 2017, le montant des créances prises en charge dans le cadre d’un contrat d’affacturage a grimpé de 6,2% à 139,5 milliards d’euros. Face aux filiales des grands groupes bancaires CA Leasing & Factoring ou BNP Factor, des fintechs telles que Finexkap, Créancio ou Edebex tentent de se faire une place au soleil en mettant en avant leur simplicité d’utilisation et leur rapidité. Finexkap par exemple propose aux TPE et PME un produit très proche de leurs besoins, à savoir une offre de financement ponctuel de créances commerciales sans engagement. La société se dit capable de financer des factures qui peuvent être très spécifiques et que les factors refusent bien souvent. Revers de la médaille, confie un courtier spécialisé, ces fintechs peuvent être selon les cas un peu plus chères que les acteurs traditionnels. D’autant que dans le même temps, les factors classiques ont réagi en lançant eux aussi des offres sans engagement proches de celles de leurs nouveaux concurrents. Mais les fintechs ne visent pas les mêmes entreprises clientes (plutôt des TPE, des PME ou des indépendants) que les sociétés d’affacturage (ETI, multinationales). A ce titre, elles répondent à un besoin non satisfait, et c’est déjà beaucoup.

Fiction : le financement dans la douleur

Christophe Jegu est un patron tendu. Sa jeune entreprise connaît une belle croissance, mais le cash peine à rentrer dans les caisses. La faute à ses principaux clients, des multinationales aux procédures de paiement tellement complexes qu’elles dépassent allégrement le seuil des 60 jours fixé par la loi. L’angoisse monte d’autant plus que les médias spécialisés ne cessent de répéter que 25% des faillites sont causées en France par des retards de paiement. Résolu à échapper au dépôt de bilan, Christophe Jegu étudie les solutions pour renflouer à court terme la trésorerie de sa société. Au détour d’un article, il découvre le système de l’affacturage. Ni une ni deux, il se rend à sa banque. Las ! Après plusieurs jours d’études de son dossier, la sanction tombe. Son établissement bancaire lui refuse ce service en raison de sa trop petite taille. Selon son conseiller, aucun factor traditionnel ne perdrait son temps et son argent à gérer un poste client d’aussi petite taille(1). En effet, assure le conseiller, la filiale dédiée de la banque ne dispose pas de la technologie susceptible de financer ses créances à moindre coût(2). La déception est grande pour le dirigeant. Son incompréhension l’est tout autant. Ce qu’il demandait était pourtant simple : percevoir dans les jours prochains des liquidités sans perdre trop de temps en paperasse en contrepartie de quelques factures émises par des entreprises au risque de défaut quasi-nul (3). Finalement, à force d’obstination, Christophe Jegu parvint à amadouer le conseiller qui accepta de faire pression sur sa filiale pour qu’elle lui rachète quelques créances… au prix fort(4). Quelques mois plus tard, en marge d’un colloque, il raconta sa mésaventure à un autre patron de ses connaissances. Ce dernier le contempla d’un air mi-gêné mi-amusé avant de lui faire découvrir le charme des fintechs. A ce moment-là, il comprit son erreur et jura qu’on ne l’y reprendrait plus (5) !

1 – Les fintechs comblent un manque

Certes, les dernières études de la Banque de France sur le crédit aux entreprises sont rassurantes. Grâce à la politique des taux bas mise en œuvre depuis plusieurs années en zone euro, les banques prêtent plus facilement qu’au cœur de la crise de 2009. Toutefois, trop de TPE, de créateurs d’entreprise, se voient encore refuser une ligne de crédit ou un contrat d’affacturage en raison d’un manque de capitaux propres ou de perspectives jugées incertaines. C’est à ce marché de « laissés pour compte » que s’adressent les fintechs. « Finexkap répond à un manque. Le marché de l’affacturage traditionnel n’est pas accessible à tout le monde. Beaucoup de factors sont encore réticents à financer des créateurs d’entreprise, des jeunes TPE-PME et des sociétés qui ne cèdent que de faibles volumes de factures », confirme Cédric Tessier, CEO de Finexkap. Un point de vue partagé par Edebex qui vient en aide aux TPE et PME en manque de liquidités grâce à la revente de factures. Cette société belge est en effet une place de marché qui permet aux entreprises de vendre des créances commerciales à des investisseurs. « Aujourd’hui, Edebex est la seule entreprise d’aide à la trésorerie qui finance ses clients sans vérifier leur santé financière. Cela leur permet d’accepter des entreprises qui sont refusées partout ailleurs, et de leur apporter une vraie aide », indique Xavier Corman, CEO. Le groupe ne s’intéresse qu’à la qualité de la facture. « Nous avons développé un algorithme qui nous permet d’évaluer quel est le risque lors du rachat d’une facture. De plus, un assureur crédit indépendant assure chaque facture individuellement, détaille le dirigeant. Résultat, notre service est beaucoup plus accessible que celui d’un factor classique. »

2 – Une avancée technologique

Les fintechs ne s’appelleraient pas fintechs si elles n’étaient pas « tech ». Finexkap, Edebex ou Creancio s’appuient sur des plateformes digitales de pointe pour commercer avec leurs clients. En quelques clics, ces derniers peuvent percevoir plusieurs milliers d’euros grâce à un processus extrêmement simplifié. Chez Edebex par exemple, le processus d’inscription est 100% digital. « En premier lieu, l’entreprise nous livre quelques informations de base, telles que l’identité du dirigeant, un RIB et son K-Bis. Une fois les vérifications effectuées, en général en 30 minutes, nous invitons la société à s’abonner à nos services moyennant 150 euros. Ensuite, le client n’a plus qu’à nous proposer une facture. En quelques heures, nous lui disons si nous la prenons en charge (15% de refus en moyenne). Quand elle est acceptée, nous la vendons à nos investisseurs. Tout compris, l’opération aura pris moins de 72 heures », indique Xavier Corman. Chez Créancio, le poste client est totalement dématérialisé : le chargement des factures se fait en un clic sur une appli. Son circuit court et rapide lui permet enfin de financer en 24 heures une facture ou, mieux, le jour même pour les demandes effectuées avant 11 heures. En somme, les entreprises peuvent profiter grâce aux start-up des nouvelles opportunités offertes par le développement des technologies numériques, en termes d’optimisation de processus, de frais financiers et de trésorerie. Une demande difficile à satisfaire pleinement par les partenaires financiers traditionnels.

3 – Simple, rapide et efficace

La technologie n’est pas une fin mais un moyen. Elle permet de répondre au plus vite aux besoins des clients. Ces factors 2.0 peuvent facilement financer une facture unique, même pour un client qui travaille avec eux pour la première fois. Le temps de faire les vérifications, un premier financement interviendra en 48 heures ou 72 heures. Lorsque la relation est devenue régulière, cela prend moins d’une journée. « Les sociétés qui nous font confiance apprécient notre délai de réactivité et notre système à la carte. Nous comptons actuellement 550 clients. Parmi ces clients, 80% sont récurrents et 55% ont fait de Finexkap leur première source de financement court-terme. Par ailleurs, la moitié de nos clients cèdent l’intégralité de leurs factures », se félicite Cédric Tessier, CEO de Finexkap. Autre atout des fintechs, l’absence de contrainte. Elles peuvent financer une facture comme la totalité du poste client tout en s’engageant sur des montants dépassant les limites standards de banques. « Chez Edebex, nous n’imposons pas de limite au montant de chaque facture. Une petite TPE peut très bien nous proposer une facture très importante, nous la prendrons en charge pourvu qu’elle soit acceptée par notre algorithme », explique Xavier Corman, CEO d’Edebex.

4 – Des prix attractifs

Les sociétés d’affacturage elles-mêmes le reconnaissent. L’arrivée des fintechs sur le marché a tiré les prix vers le bas, les factors étant obligés de s’adapter à cette nouvelle concurrence. Toutefois, moins agiles que les fintechs, lestées de coûts fixes plus importants, les banques restent globalement moins disantes sur le marché privilégié des start-up : l’affacturage a la carte. « Questions coûts, les factors qui proposent des services à la carte proches des nôtres sont globalement 30% plus chers avec un coût de 3,5% de la valeur faciale de la facture, contre 2,4% pour nous. En revanche, il se peut que nous soyons légèrement plus chers si l’on se compare avec une offre traditionnelle », explique Cédric Tessier, CEO de Finexkap.

Effectivement dans le cadre d’un contrat d’affacturage classique, les prix pratiqués par les leaders du secteur tels que CA Leasing & Factoring, BNP Factor, ou ABN Amro Group sont globalement inférieurs à ceux des fintech pour un service plus complet (financement, gestion du recouvrement, relances).  Chez Edebex, les coûts sont plus complexes à estimer mais compétitifs assure son CEO, Xavier Corman. « Une fois la facture acceptée, nous proposons un prix de vente basé sur la maturité de la facture et la qualité du débiteur », explique-t-il. Si un investisseur (établissement de crédit ou fonds commun de titrisation) achète la créance, l’entreprise est libérée de son suivi et créditée du montant dans les 72 heures. «Une fois la vente finalisée, nous prélevons des frais de services (à partir de 1,45% du montant de la facture). »

5 – Un marché sous-exploité

Les fintechs spécialisées dans l’affacturage se développent, mais elles sont encore loin de concurrencer les factors. Le marché de l’affacturage est en effet soutenu par l’offre, qui croît de plus en plus vite. Il représentait, en 2016, 270 milliards d’euros en termes de volume mais ne concerne que 40000 entreprises, dont 80% sont des multinationales et des ETI. Ce marché  entre les mains des factors comme CA Leasing & Factoring, BNP Factor, est donc en réalité nettement sous-exploité. « Ainsi, 75% de nos clients ne connaissaient pas l’affacturage », révèle Cédric Tessier, CEO de Finexkap. « Nous ne sommes pas là pour voler des clients aux banques mais pour séduire de nouveaux clients », ajoute-t-il. Raison pour laquelle la fintech a développé récemment une offre commune avec le fournisseur de logiciels de comptabilité Sage, baptisée « Clic and Cash ». Le comptable d’une PME peut solliciter un financement à partir de son logiciel de gestion en cliquant sur un bouton dédié. Finexkap a également noué un partenariat avec la société de gestion Acofi devant lui permettre de monter en puissance en finançant des entreprises de plus grandes tailles. Edebex de son côté a signé des partenariats avec une soixantaine de cabinets de courtage. De même, Créancio a signé l’an dernier un partenariat avec Baker Tilly France, un réseau de cabinets d’audit indépendants.

Pierre-Jean Lepagnot

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