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Les grandes écoles sont à pied d’œuvre pour adapter leurs programmes, sur des parcours spécialisés ou généralistes, car les recruteurs ont un besoin criant.
La digitalisation est devenue un enjeu de taille pour les entreprises comme en attestent les nouvelles formations présentes au QS World Grad School Tour en escale à Paris le 11 mars 2017. Selon les secteurs d’activité, elle peut recouvrir un nombre très important d’aspects, et donner le vertige aux chefs d’entreprise. Pour accompagner au mieux cette digitalisation, ils ont tout intérêt à recruter les bons collaborateurs. Et pour cela, les grandes écoles sont à l’écoute constante de leurs besoins. Et certaines ont vraiment pris le sujet à bras le corps, à l’image d’Audencia Business School, dont l’Institut pour l’Innovation, le Design et l’Entrepreunariat, structure créée en 2015, travaille notamment sur la digitalisation des enseignements et du contenu des formations. « Internet a bousculé le paysage économique mondial et a créé de nouveaux métiers. Le rôle de l’Institut est un rôle transverse pour accompagner ces changements au sein de nos établissements », indique Valérie Claude-Gaudillat, directrice d’Audencia Innovation. Pour être au plus près des attentes des entreprises, les grandes écoles proposent de fréquentes collaborations avec le monde professionnel. « Nous proposons des projets d’entreprises aux étudiants, et nous avons par exemple co-organisé dernièrement un hackathon qui a réuni les élèves de trois écoles à Nantes, avec pour objectif de développer des applications pour répondre à des problématiques d’entreprises », ajoute Valérie Claude-Gaudillat. « Les entreprises étaient complétement intégrées dans les groupes de travail, de manière à recueillir au mieux leurs besoins. » Bien sûr, toutes les écoles assurent une veille continue sur le sujet du digital et se créent, comme à l’IPAG (Institut de préparation à l’administration générale), des réseaux d’anciens élèves qui travaillent au sein de grandes entreprises dans le numérique ou non, et qui donnent leur avis régulièrement sur les programmes. Ils peuvent disposer, comme à l’EMSI (Ecole de management des systèmes d’information à Grenoble), d’un comité scientifique qui imagine les besoins de demain. « Il faut avoir un coup d’avance dans ce domaine, nos programmes doivent pouvoir évoluer rapidement », estime Isabelle Aimé, responsable du département marketing de l’IPAG Business School.
Métiers pointus, sujets transverses
Pour coller aux besoins des entreprises à l’heure de la digitalisation, les grandes écoles doivent miser sur des formations très pointues. Il y a d’abord des métiers particulièrement touchés par ce besoin de digitalisation, comme ceux du marketing. « De nombreuses entreprises sont entrées dans la digitalisation en commençant par le marketing, en créant un site internet ou en se lançant dans le e-commerce », note François Trouillet, directeur de l’EMSI. « Le métier, et donc nos formations, ont évolué rapidement en intégrant les nouvelles technologies. La digitalisation a aussi créé de nouveaux métiers, pour lesquels il faut des formations très pointues », ajoute-t-il. Le mastère spécialisé en Digital Marketing de l’EM Lyon, le master Marketing Digital & Communication de l’IPAG Business School ou encore le mastère spécialisé Stratégies Marketing à l’Ere Digitale d’Audencia Business School sont autant d’exemples de formation qui répondent aux besoins spécifiques des entreprises en termes de marketing. Cependant, les formations spécialisées ne sont pas la réponse unique aux besoins des entreprises, comme le note Guillaume Moreau, directeur des formations de Centrale Nantes : « Il faut des formations à l’innovation et à la rupture, sous peine de reproduire en version numérique l’entreprise d’origine. Mais ce ne sont pas forcément les formations spécialisées aujourd’hui qui répondent complètement à cette demande : elles sont souvent axées soit sur l’informatique elle-même, soit sur la culture numérique et l’expérience utilisateur ». La digitalisation doit se faire dans le cadre d’un projet d’entreprise. « Elle ne va pas être portée par une seule personne au sein de la société », insiste François Trouillet. L’objectif n’est donc pas de former des candidats ultra-digitalisés, mais plutôt d’intégrer le numérique dans toutes les filières. « Nous avons par exemple intégré le sujet des réseaux sociaux dans plusieurs de nos modules », évoque Isabelle Aimé. « Nous devons doter tous les diplômes d’un minimum de connaissances sur ce sujet, avec l’objectif de montrer l’impact du numérique sur toutes les composantes de l’entreprise, ajoute François Trouillet. Les entreprises n’ont pas besoin d’un super-expert du digital, mais de personnes aux connaissances pointues qui pourront être des acteurs-clés de la transformation, tout comme des personnes accompagnant cette mutation dans toutes les composantes de l’entreprise. » Au-delà des compétences techniques, les grandes écoles apprennent surtout à leurs étudiants la manière de se comporter dans ce nouveau monde numérique. « Ils doivent apprendre à être agiles, ouverts et constructifs, estime Thierry Picq, directeur académique de l’EM Lyon. Ce qui signifie le mode agile, avec un comportement collaboratif, en étant ouverts à la complexité et à la contradiction, dans un monde où rien n’est prévisible à l’avance. » Les étudiants de l’EM Lyon qui suivent le programme Grande Ecole ont bien sûr des cours spécialisés dans le digital, qui sont plutôt axés sur la culture numérique, mais chaque matière intègre également cet aspect, et la formation passe aussi par l’expérience. « Nos étudiants ont par exemple dernièrement travaillé sur un projet de ruches connectées, qui les a aidés à acquérir les comportements de travail adéquats dans un environnement incertain », ajoute Thierry Picq.
Emilie Massard