Gabriel

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Le Premier ministre a une méthode bien à lui pour séduire les Français. Observons-là avec attention : elle est révélatrice d’une manière de faire de la politique en vérité assez différente de celle d’Emmanuel Macron.

Comment Gabriel Attal parvient-il à s’attirer la relative bienveillance des Français ? Anatomie d’une méthode déjà bien rodée.

« Gabriel Attal, comment ça marche ? » aurait scandé le journaliste scientifique Michel Chevalet. Oui, aujourd’hui, soulevons un peu le capot de ce nouveau Premier ministre, à la découverte de ses secrets de fabrication, de ses « trucs et astuces ». Intéressante manière de mieux comprendre comment, au-delà d’une « popularité » sondagière qui reste à éprouver, Gabriel Attal parvient à susciter chez ses compatriotes un a priori plutôt positif. De cette manière nous pourrons mieux « décrypter », comme disent les mauvais journalistes, son discours de politique générale, prononcé le 30 janvier prochain dans l’enceinte survoltée de l’Assemblée nationale.

Éviter les procès en « déconnexion »

Prenons en guise d’étude de cas l’exemple de son récent déplacement dans le Rhône, à la rencontre des agriculteurs. De prime abord, cela pourrait ressembler à un rendez-vous du troisième type : Gabriel Attal n’a jamais vécu en dehors de Paris, il est élu d’une circonscription urbaine et aisée (Issy-les-Moulineaux/Vanves) où l’on ne croise pas de tracteurs tous les matins. Principal enjeu : ne pas apparaître « déconnecté ». « Rien ne vaut le terrain », répète t-il à qui mieux mieux.

Alors, pour mieux faire passer la pilule, Gabriel Attal se veut le contre-exemple d’Emmanuel Macron. Le président se targue souvent d’être omniscient lors de ses déplacements, au risque de l’arrogance. On a parfois l’impression qu’il expliquerait à un pêcheur breton comment se servir d’une canne à pêche…

La posture du bon élève qui a tellement envie de mieux comprendre

Gabriel Attal adopte pour sa part la posture du bon élève, sage, curieux et humble, tellement désireux d’en savoir davantage. C’est qu’il prendrait presque des notes ! Le stagiaire idéal en somme. Une bonne idée car les gens sont toujours ravis de parler d’eux-mêmes. « Moi je suis venu pour mieux comprendre les enjeux » ; « C’est important pour moi de palper le pouls de la France, de ne pas préparer mon discours de politique générale dans un bureau avec mes conseillers mais de m’appuyer sur du vécu et du concret » ; « Nous les politiques on doit comprendre que les solutions elles sont bien souvent sur le terrain », constituent pour lui autant de phrases types.

Ensuite, Gabriel Attal utilise une méthode vieille comme le monde : la flatterie. Ainsi, devant des professeurs, il louera « l’extrême importance de cette mission : enseigner et former les consciences de demain » et reconnaîtra « l’extraordinaire qualité du travail réalisé au quotidien ». Devant les agriculteurs, là encore, ce fut la câlinothérapie générale : « Notre agriculture est vitale pour la souveraineté de la France » ; « Garantir qu’on puisse vivre de son travail quand on est agriculteur, c’est aussi être soutenu pendant les crises ».

Caresser les Français dans le sens du poil

Pour se défaire d’une image peut-être trop urbaine et cosmopolite, il insiste avec intelligence sur quelques formules « à l’ancienne » qui sonnent très « bon sens populaire près de chez nous ». « Les agriculteurs, ils aiment leurs bêtes » ; « J’ai bien conscience qu’on doit aussi arrêter avec les normes et j’espère que vous nous aiderez, parce que c’est pas depuis un bureau à Paris qu’on doit régler les problèmes » ; « Les agriculteurs sont des écologistes parce que la terre est leur outil de travail et moi, je vous le dis franchement, j’ai envie de tordre le cou à un discours négatif qu’on peut parfois entendre chez certains ».

S’adressant directement à un éleveur, il lance une phrase du genre : « Moi j’ai vraiment envie de vous remercier, parce que je n’oublie pas que ce sont les agriculteurs qui nous nourrissent, et je ne veux plus que l’agriculture soit un sujet de second ordre, c’est clairement une priorité de mon action ».  Voilà aussi un autre point important de la méthode Attal : faire de tout une priorité.

La sensibilité et l’empathie : des valeurs féminines qu’il incarne

Et puis vient la cerise sur le gâteau… L’incarnation d’une expérience générale. Le passage du rationnel à l’émotionnel. Ainsi pouvons-nous être à peu près persuadés que lors de son discours de politique générale, le Premier ministre nommera par leurs prénoms quelques Français lambdas pour illustrer son propos. Il se souviendra avec émotion de cette « rencontre avec Gertrude, qui l’a beaucoup marqué » ou quelque chose dans le genre. Ainsi peut-il se targuer d’être l’un des très rares hommes à incarner la valeur sondagière de « l’empathie », d’habitude réservée à des profils féminins comme Marine Le Pen ou auparavant Ségolène Royal.

Aux termes d’un déplacement, Gabriel Attal tire les marrons du feu devant la presse, livrant la substantifique moelle de ce qu’il a appris ce jour-là, un peu à la manière de l’émission « Vis ma vie ». Voici quelques phrases qui peuvent à l’envi être complétées. « Ce qui ressort de mes échanges c’est que [XX] » ; « J’ai demandé au ministre de [XX] de bien vouloir accélérer sur ce dossier parce que clairement il y a un sujet et l’administration doit aussi le prendre en compte parce qu’à un moment donné, le pas de vague ça va bien ».

Amusant de constater que le jeune Gabriel Attal est en réalité assez « old school » dans sa méthode. Il y a quelque chose d’assez chiraquien dans cette manière de dire à tout le monde « Vous êtes formidables ». Après tout, même si c’est assez démago, cela vaut mieux que le mépris tant de fois affiché par les petits marquis de la macronie…


Les perles de la politique

Le retour de Najat Vallaud-Belkacem · Après quelques années de disette médiatique, l’ancienne ministre de l’Éducation nationale de François Hollande, Najat Vallaud-Belkacem, opère un retour dans l’espace public. Face aux déboires d’Amélie Oudéa-Castéra, celle qui est aujourd’hui présidente de France Terre d’Asile fustige une « logique de sédition bourgeoise » et s’insurge contre l’établissement catholique Stanislas. Dans l’émission Sens politique, sur France Culture, elle attaque de front Emmanuel Macron, dont elle semble réprouver jusqu’à la personne. « Je sais que le président a fait du théâtre mais je suis très mal à l’aise quand je l’entends jouer. C’est insupportable pour moi. ». Dire qu’ils étaient hier membres du même gouvernement.

crédits : shutterstock

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