Les prochaines énergies renouvelables

La vague de l’éolien off-shore monte en puissance…
La vague de l’éolien off-shore monte en puissance…

Temps de lecture estimé : 3 minutes

Et si notre avenir énergétique se jouait au large, au milieu de la Grande Bleue ou dans les eaux bretonnes ?

La vague de l’éolien off-shore monte en puissance…
La vague de l’éolien off-shore monte en puissance…

L’Hexagone, eldorado du renouvelable ? Il y a loin encore, tant le nucléaire reste l’alpha et l’oméga du modèle énergétique français. Et même si Berlin fait pression pour la fermeture des centrales tricolores de Fessenheim et de Cattenom (et Genève pour celle du Bugey, dans l’Ain), l’atome s’est pour longtemps fait une place au soleil de France, pesant encore 77% du mix national, contre 12,6% pour l’hydraulique, 5% pour les centrales thermiques à combustibles fossiles, 3,1% pour l’éolien et 1,1% pour le photovoltaïque selon RTE (réseau de transport de l’électricité). Part qui devrait tomber « à 48% en 2030 selon les perspectives de Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) », précise Didier Mayer, directeur du département Énergétique et Procédés à Mines ParisTech. Malgré tout, « le pays des Lumières reste scotché sur le nucléaire », déplore-t-il. Les énergies renouvelables ne représentent ainsi que 14% du mix, loin encore des objectifs de 23% en 2020, fixés par Bruxelles. Alors… La France, mauvaise élève ? Pas si sûr. Car de sa transition énergétique, le pays organisateur de la Conférence climat 2015 en a fait une priorité ; un fil rouge… éminemment politique. « C’est de fait un sujet fortement lié à la parole gouvernementale qui soutient ces filières, en particulier le solaire », estime Didier Mayer. Et ce alors que les prix des panneaux photovoltaïques – crise de surcapacités qu’a subie ce marché oblige – ont fondu de 80% en moins de dix ans (cf. encadré).

 

Puissance maritime

Mais c’est aussi (et surtout) en mer et au milieu des vents marins que technologiquement cette transition se met en marche. Techniques éoliennes et énergies marines renouvelables (EMR) ont en France le vent en poupe. La raison ? L’incroyable potentiel et l’inépuisable réserve que représente le domaine maritime tricolore, classé deuxième mondial derrière les Etats-Unis, avec 11 millions de kilomètres carrés (et bientôt plus, cf. Grand Angle) ! Une véritable mine d’or, si l’on considère la présence possible dans ces fonds marins d’hydrocarbures, de terres rares ou encore d’incroyables ressources biologiques. « C’est aussi un formidable terrain de jeu pour la recherche, en particulier celle qui concerne les EMR », souligne Jean-Frédéric Charpentier, responsable du groupe « Énergies Renouvelables Marines » à l’institut de recherche de l’Ecole navale. Pour ce chercheur, une chose est certaine : « La Mer a de l’avenir ». Mieux, « elle est source d’innovation et de développement économique ». Seul (vrai) hic : la France a vis-à-vis de ce trésor maritime « une vision encore réduite », dixit. « Politiquement, cette France maritime a toujours été dirigée et encadrée par des gens qui n’ont aucune culture… maritime. » A cela s’ajoutent des problématiques d’ordre économique et technologique. « Le développement des EMR – mais c’est vrai aussi pour le solaire et l’éolien terrestre – coûte cher. Et certaines de ces énergies renouvelables sont par essence diffuses et intermittentes. » Se pose alors le problème du stockage de l’énergie produite mais aussi la prise en compte du dimensionnement de certaines installations. Exemple : l’éolien off-shore. Chacun de ces « monstres marins », pouvant dégager une puissance nominale de 5 MW, plantés dans l’eau à l’aide d’immenses trépieds, peuvent ainsi mesurer jusqu’à… 160 mètres de diamètre. Gigantesque. Malgré ces freins, la France de l’énergie veut néanmoins croire aux forces du vent, de la houle et des courants marins. « En termes de puissance installée, l’éolien offshore devrait être au même niveau que l’éolien terrestre en 2030 et atteindre 25 GW dès 2020 », précise Jean-Frédéric Charpentier. L’année dernière déjà plus de 3 MW supplémentaires ont été installés au large du Vieux Continent selon l’Association européenne de l’énergie éolienne.

 

Des marées très prometteuses

Dans cette course aux renouvelables, l’énergie hydrolienne (exploitation de l’énergie des courants) fait également une percée remarquée. En janvier, la Bretagne accueillait ainsi la première ferme hydrolienne au monde, développée par EDF et conçue par DCNS, avec l’installation d’une machine de 850 tonnes et 16 mètres de diamètre. « Nous en sommes encore sur l’énergie hydrolienne à la phase de pré-industrialisation, considère le chercheur de l’école navale. Mais la France est plutôt bien placée sur cette technologie. » Une source énergétique non polluante, gratuite et surtout inépuisable. Et qui présente un avantage sur l’éolien ou le solaire : « Elle est certes alternée mais elle est relativement prévisible sur de longues périodes. L’intégration au réseau des fermes hydroliennes n’est donc pas impacté par un caractère imprévisible de la ressource. » Idem pour l’énergie marémotrice, issue du mouvement de l’eau créé par les marées. Une source d’exception encore qui suppose l’implantation d’un barrage marémoteur sur des sites rares et bien particuliers. En France, c’est du côté de Dinard et de Saint-Malo que ce type de barrage est visible avec celui de la Rance, long de 750 mètres et en acticité depuis 1966. Un mastodonte – considéré comme le deuxième plus grand barrage marémoteur au monde (derrière celui de Shiwa Lake en Corée du Sud) – d’une capacité de 240 MW, soit la consommation annuelle d’une ville de plus de 200000 habitants. Quel en est le principe ? A marée montante, les vannes du barrage laissent passer les eaux qui viennent remplir un gigantesque bassin de retenue. « L’eau passe également par les conduits des groupes qui sont ouverts à ce moment-là. Lorsque la marée a atteint son plus haut niveau, les vannes et les conduits des groupes sont fermés, précise-t-on chez EDF qui exploite le site. On attend ensuite que la mer soit suffisamment redescendue pour avoir une certaine hauteur de chute d’eau entre le niveau. » Cette chute permet de faire tourner les turbines qui entraînent leur alternateur et créent ainsi de l’électricité. C’est aussi, à l’instar des surfeurs, sur la crête des vagues que les chercheurs puisent leur énergie. Une énergie dite houlomotrice, produite à partir de la houle et des vagues. Il existe dans ce domaine un vaste inventaire de solutions, certaines d’entre elles étant immergées, d’autres installées en surface, sur le rivage ou au large, relate France Energies Marines. Les systèmes de capture d’énergie varient d’un prototype à un autre : « Capture d’énergie mécanique en surface (ondulations) ou sous l’eau (translations ou mouvements orbitaux), capture des variations de pression au passage des vagues (variations de la hauteur d’eau) ou encore capture physique d’une masse d’eau (via une retenue). »

 

“Power-to-Gas”

Certes pléthoriques, ces innovations EMR représentent toujours une goutte d’eau dans notre mix énergétique global. En cause : la problématique de stockage. « Le développement des énergies renouvelables électriques intermittentes comme l’éolien et le photovoltaïque nécessite de trouver des solutions pour optimiser leur insertion dans les réseaux d’énergie. C’est tout l’enjeu du “Power-to-Gas” », relève Didier Mayer. Le “Power-to-Gas” est un principe de conversion qui repose sur le stockage de ces énergies renouvelables grâce à leur transformation en hydrogène ou en méthane de synthèse. Selon une récente étude (2014) de GrDF et de l’ADEME, « il permettrait de produire entre 20 et 30 TWh/an de gaz renouvelable injectable dans les réseaux existants, s’imposant comme une solution de stockage des excédents de longue durée. » De l’innovation à la production jusqu’au consommateur final… Les EMR – et plus globalement les énergies vertes – se cherchent elles aussi leur modèle économique. « C’est un business comme un autre… heureusement », rappelle Didier Mayer. Et assurément une filière d’avenir.

 

Pierre Tiessen

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