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Retraites réforme clé sur terrain à déminer
Le point Le chantier des retraites ? Voilà un serpent de mer de la politique française qui n’a de cesse de susciter la grogne. Et la réforme portée par le gouvernement actuel ne fait guère exception ! Après plusieurs semaines de contestations à foison, les syndicats fustigent toujours ce projet de régime de retraite universel par points à compter du 1er janvier 2025 pour la génération née après 1975. Les 42 régimes actuels sont donc appelés à disparaître ! Si la fin annoncée des régimes spéciaux a suscité la pomme de la discorde, le nouveau système se veut pourtant plus simple et juste avec les mêmes règles de calcul appliquées à tous. Exit les trimestres de cotisation, les droits seront donc évalués en fonction du nombre de points accumulés tout au long d’une carrière. Si la réforme annonce une valeur de point de 0,55 euro pour dix euros cotisés, son mode de calcul reste flou. Uniformisés, les taux des cotisations seront les mêmes pour tous les salariés, fixés à 28,12 % jusqu’à 120 000 euros de revenus. Avec toutefois l’abandon de la règle des 25 meilleures années pour le calcul de la retraite de base afin de mieux prendre en compte les aléas de carrière. Seul point clé de la réforme encore en suspens : l’âge « pivot » fixé à 64 ans, contre 62 ans actuellement. Le Premier ministre Édouard Philippe, par ruse ou réalisme, semble en abandonner le principe, quoique… Un hiatus de taille tant les seniors – précaires pour nombre d’entre eux – peinent déjà à retrouver un travail : un sur deux était au chômage début 2019, un tiers chez les 60-64 ans…
Un lycée réformé pour mieux préparer à l’université ?
Le point Vers un lycée à la carte, où chacun compose son cursus, sur le modèle de l’université… Très ambitieuse, la réforme du lycée concoctée par le ministre Jean-Michel Blanquer, associée à celle du bac, entend mieux préparer les élèves à la rigueur de l’enseignement supérieur. Un enjeu de taille alors qu’on déplore « 60 % d’échecs au bout de quatre ans à l’université ! », selon le ministère de l’Éducation nationale. Finies les séries du bac général, L, ES, S – en première depuis la rentrée 2019 et en terminale dès la rentrée 2020 –, place à un parcours par modules. Qui allie un tronc commun, avec les mêmes matières pour tous (histoire-géo, enseignement scientifique, deux langues vivantes, philo, sport, éducation civique) et deux spécialités obligatoires au choix en terminale (contre trois en première), parmi une liste de douze modules (si, si, on finit par comprendre…). Autre grande nouveauté : le contrôle continu, désormais au premier plan, comptera pour 40 % de la note globale au bac, dès 2021. Dont 10 % via les bulletins scolaires de première et terminale, et les 30 % restants se joueront lors d’épreuves communes à tous les bacheliers : deux sessions en première et une en terminale. De quoi en finir avec le bachotage à un mois du bac : les élèves vont devoir plancher toute l’année pour décrocher de bons résultats…
Agriculture, la PAC répondra-t-elle à la reconversion bio ?
Le point « La réforme des retraites sera très bénéfique pour le monde agricole », jure le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, Didier Guillaume, vendredi 10 janvier, dans La Dépêche.
Les agriculteurs, avant bien d’autres professions, attendent beaucoup du projet du gouvernement, en particulier de la promesse d’une retraite minimum égale à 85 % du Smic, à partir de 2025. Pas un « luxe » : le montant mensuel de leur retraite plafonne à 953 euros pour les hommes et 852 euros pour les femmes…
Une bouffée d’oxygène pour une profession qui souffre en plus, actuellement, d’un « climat d’agribashing », relancé lors de la consultation publique sur les distances minimales d’épandage, en septembre 2019. Et tout récemment par la démonstration que les « intensifs » usent toujours plus d’engrais chimiques tueurs de terre. Plus de 80 communes prennent alors des arrêtés municipaux anti-pesticides et près de 850 000 personnes signent la pétition nationale du collectif Nous voulons des coquelicots.
Dans ce contexte douloureux qui oblige nombre d’agriculteurs à changer leurs méthodes pour sortir de l’agriculture intensive, cette bouffée d’oxygène est bienvenue. Suffira-t-elle à relancer les vocations ? Dans ce même entretien, Didier Guillaume veut le croire, il insiste sur les 14 000 chefs d’exploitation installés en 2018, et la progression des effectifs agricoles « pour la première fois depuis 10 ans ». Reste au ministre à conserver les 8 milliards d’euros d’aides de la PAC obtenues en 2019 dans le cadre des négociations cruciales de la future Politique, pour ne pas décevoir cet espoir retrouvé.
Hôpitaux crise financière, crise de sens
Le point Après une cinquantaine de chefs de service des hôpitaux publics de Marseille, plus de mille cent médecins parisiens présentent leur démission administrative à cause du manque de moyens dans les hôpitaux, mardi 14 janvier. « Le cauchemar a commencé quand on nous a demandé de produire du séjour, alors qu’on avait l’habitude de prodiguer des soins. On a commencé à avoir comme chef de service des tableaux Excel », pointe lors de cette retentissante annonce une responsable du service diabète de La Pitié Salpêtrière.
Le nouveau plan d’urgence, annoncé le 20 novembre 2019 par le gouvernement, n’a pas suffi à enrayer la crise qui couvait depuis huit mois à l’hôpital. Malgré la réduction d’un tiers des 30 milliards d’euros de dette des hôpitaux publics, une hausse de 1,5 milliard d’euros du budget de l’assurance-maladie pour le secteur hospitalier pour les trois prochaines années, le maintien des tarifs hospitaliers jusqu’à la fin du quinquennat et la création de diverses primes, la cuvette a débordé. À l’hôpital, le moral est au plus bas, selon un sondage Odoxa publié lundi 30 décembre : plus de la moitié des infirmiers et aides-soignants se sentent incapables d’exercer correctement leur mission. Et la réforme des retraites ne risque pas d’arranger les choses puisque 70 % des soignants s’estiment défavorisés par le projet.
Les démissionnaires exigent désormais des négociations avec la ministre Agnès Buzin. « L’hôpital doit être réformé, mais il n’y a pas de grande réforme possible sans moyens », écrivent les porte-parole du monde médical dans une tribune. Leurs exigences : « une revalorisation significative des salaires, en plus des diverses primes annoncées », une enveloppe supplémentaire de 600 millions d’euros pour les hôpitaux en 2020 et « une révision profonde de leur mode de financement ». Il est significatif de remarquer qu’aucun « expert » du domaine n’a souhaité trouver du « positif » dans le grand naufrage…
Budget de l’État : baisses d’impôts vs surtaxes
Le point Si la loi de Finance pour 2020 ne change pas fondamentalement avec la ligne de 2019, le gouvernement a entériné en décembre une baisse de 5 milliards d’euros d’impôt sur le revenu pour 17 millions de foyers. Héritage des annonces d’Emmanuel Macron au lendemain de la crise des gilets jaunes. Au-delà de cette baisse d’impôts, plusieurs taxes vont également disparaître. La taxe d’habitation pour les résidences principales, supprimée progressivement jusqu’en 2020 pour 80 % des foyers français, ne sera bientôt plus applicable du tout puisque les 20 % restants en seront progressivement exonérés également entre 2021 et 2023. Dans son sillage, une vingtaine de taxes à faible rendement disparaissent en 2020, même si une surtaxe a fait son apparition dans le projet de loi. Elle concerne les quartiers d’affaires en Île-de-France. But : le financement de la société du Grand Paris.
Côté fiscalité verte, l’huile de palme ne bénéficiera pas de fiscalité avantageuse malgré l’avis du gouvernement. Le Crédit d’impôt énergétique va progressivement devenir une prime, tandis qu’a été voté un supermalus automobile pour les SUV les plus polluants – jusqu’à 20 000 euros –, que les constructeurs reprennent souvent à leur charge au grand dam de la ministre de la Transition, Élisabeth Borne : l’effet dissuasif passe à la trappe.
Enfin, l’Assemblée a finalement amendé l’article qui autorise l’administration fiscale à récolter les données publiées sur les réseaux sociaux des personnes concernées, tout en restreignant le champ d’action de la loi sur les conseils de la Cnil.
Loi pacte : elle facilite vraiment la vie des entreprises
Le point « Mieux partager la valeur créée par les entreprises avec les salariés », voilà l’objectif affiché du gouvernement. Au-delà des privatisations qui ont défrayé la chronique en 2019, le gouvernement joue indubitablement la carte des entreprises, mais insiste sur leur responsabilité sociale. Avec la notion de RSE – Responsabilité sociale des entreprises – placée au cœur. Une façon de dire aux entreprises qu’elles ne peuvent plus envisager leurs profits sans penser à leur impact social. Adieu Code Napoléon.
Mais au-delà de ce changement de paradigme, le gouvernement veut alléger, non pas les obligations des entreprises, mais leur mise en application. La loi Pacte si bien nommée annonce la couleur par son sigle : Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises. Harmonisation des seuils sociaux, réduits à trois : 11, 50 et 250 salariés. La méthode de calcul de l’effectif des entreprises est réduite à la règle de la Sécurité sociale pour le calcul et le recouvrement des cotisations.
Si le volet retraites de la loi va sans doute connaître son lot d’aménagements, demeure la volonté du gouvernement de pousser les Français/es vers plus d’épargne-retraite, le financement des entreprises via l’assurance vie est, lui, encouragé. Par les fonds Eurocroissance, lancés en 2014, qui offrent une alternative aux fonds euro classiques pour financer les TPE et PME.
Parmi les autres mesures phares qui visent à rendre la gestion d’une entreprise plus agile, il sera désormais possible de créer sa boîte 100 % en ligne. La nomination d’un commissaire aux comptes dans les entreprises sera obligatoire seulement au-dessus d’un certain seuil.
Au Sommaire du dossier
1. 6 rendez-vous de la France en 2020 et au-delà
2. Métropoles : quel poids, quels projets ?
3. Comment prend-on sa retraite sur la planète, si on la prend…