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Entre la numérisation des échanges et des processus, l’arrivée des IA, les productions délocalisées et quantité d’autres innovations, la journée de l’entrepreneur de demain prendra l’allure des nouveaux outils, des nouvelles priorités, des nouvelles façons de travailler… Un entrepreneur de 2026 ou de 2030 a consigné son journal. Extraits.
9 heures. Suis aujourd’hui « au bureau ». Le mot ancien me ravit, il est resté. Mais « le bureau », c’est chez moi, là où je trouve de quoi poser mon ordi – l’organisation en open space même pour le boss existait avant mon arrivée –, des tiers-lieux que je loue ou l’avion. Partout, je suis accueilli par Gally, mon assistant virtuel personnel. Comme dans le si vieux film tourné par Apple dans les années 1980, la voix m’accueille et, comme d’habitude, me rappelle mon programme de la journée en surlignant chaque élément sur mon planning, affiché sur l’écran holo au-dessus de la table. Une journée standard : j’enchaîne les sessions quotidiennes obligatoires (car nécessaires) : sécurité des systèmes, e-réputation, gestion de la communauté et le brainstorming innovation. En fin de journée, rendez-vous avec un designer UX pour le nouveau projet – une nouvelle application pour programmer les personnalités et comportements des figurines.
10 heures. Je commence la session sécurité en lançant la conférence vidéo. Quelques secondes plus tard, en rapide succession sur l’écran holo, s’affichent Nolen, mon DSS – directeur de la sécurité des systèmes – et notre responsable chez SecuriWeb, notre prestataire. Point sur la sécurisation de nos réseaux et l’encryptage de nos paquets – quand je pense que certaines entreprises l’ont négligée. Bah, elles auront disparu sous peu. Quand j’ai commencé, il y a quelques années, à vendre des figurines mobiles interactives, j’ai fait ce que toute société de production de bien fait aujourd’hui : j’utilise le réseau de micro-usines disséminées dans le territoire (qui appartiennent aux territoires et sont mises à la disposition des entreprises), auxquelles nous envoyons – de façon donc cryptée – nos données de fabrication selon les commandes des clients, qui n’ont plus qu’à aller les chercher (dans certains cas, nous sous-traitons également une livraison par drone). On économise sur la logistique de livraison physique, mais la protection électronique de nos brevets est encore plus vitale pour nous – et j’ai dû me familiariser avec le domaine. Heureusement, tout est au vert, même si la mise à jour à venir d’une partie du réseau de micro-usines est à surveiller.
10 h 43. Fini le call avec un peu d’avance. J’attaque directement le suivant. Gally m’organise sur ma demande une mini-présentation interactive des derniers échanges sur les réseaux, sur notre e-réputation et les derniers mouvements de notre communauté. À première vue, tout a l’air d’aller bien là aussi, mais Gally me signale un post à surveiller, un léger défaut dans le vocalisateur dans certaines langues. Je vais appeler Abela, mon DC – directeur de communauté – mais sa réponse apparaît en regard du post. Elle m’appelle, me résume brièvement ce que je viens de lire. « Ah, et pour tout à l’heure, j’ai mis de côté quelques posts intéressants sur des nouvelles interactions que voudraient voir les clients », elle glisse. Les idées doivent être bonnes, elle ne l’aurait pas mentionné sinon. J’aime bien, l’après-midi s’annonce prometteur.
14 heures. Je tourne le sujet dans ma tête pendant le déjeuner, si bien que je bous d’impatience lorsque je retourne dans mon bureau et enfile mon équipement VR (sommaire : juste les gants et les lunettes). Cette semaine, les sessions innovation se déroulent dans une clairière paisible avec en arrière-plan sonore un bruit de ruisseaux et quelques chants d’oiseaux. Soupir. Je baisse le volume. Je préfère personnellement le bruit des vagues, mais ce n’est pas mon tour de choisir le décor. Toute l’entreprise, hors prestataires – c’est-à-dire moi, le DSS, le DC et… Gally – arrivent tour à tour dans leurs avatars. Abela ne perd pas une seconde, elle nous montre le post, plutôt technique, qui traite d’une façon d’ajouter des animations sur de toutes petites parties des figures. L’idée est brillante. En plus, ça complémenterait parfaitement l’arrivée de la nouvelle application. Nous décidons, au bout d’un moment, de contacter son auteur pour l’associer au développement. C’est désormais une pratique courante pour nombre d’entreprises, c’est de la grassroot innovation : le bénéfice est double, puisqu’on fidélise sa communauté et on bénéficie d’idées gratuitement.
17 heures. Gally, d’ailleurs, me fait signe depuis manifestement quelques minutes : je vais être en retard pour mon rendez-vous avec le designer UX. Je salue Abela et Nolen, ils vont continuer à discuter, me déconnecte et enlève les lunettes. Après la petite minute de réadaptation – la réalité virtuelle me fait toujours cet effet, bon sang –, j’ouvre la porte à mon ponctuel visiteur (bon point !) qui déroule directement sa présentation. Pour certaines choses – et ce d’autant plus que je reste un producteur d’objets –, j’insiste encore sur une rencontre physique. Il est enthousiaste, mais quelque chose dans son design d’interface me laisse sur ma faim. J’hésite du coup en le raccompagnant à programmer une nouvelle séance avec lui ou à demander un autre avis. Je déciderai demain.
Au Sommaire du dossier
1. Cette (r)évolution nommée disruption