Les enfants du mariage entre innovation et artisanat

Des savoir-faire qui perdurent mais qui dans l’ombre se modernisent…
Des savoir-faire qui perdurent mais qui dans l’ombre se modernisent…

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L’artisan, le maker et le startupper

L’artisanat n’est pas en reste en matière d’innovation. Les initiatives se multiplient et accouchent de nouveaux procédés qui dépoussièrent nos savoir-faire ancestraux.

Auvergne, mai 2013. Sous l’impulsion des Etats généraux de l’Industrie, le Comité stratégique de filière régional (CSFR) Cuir/Luxe voit le jour. Il regroupe certains services régionaux de l’Etat (Direccte, Dreal) et surtout les professionnels du secteur, avec pour but de « répondre aux évolutions économiques auxquelles sont confrontés les industriels du domaine ». Une manière de donner un coup de fouet à des savoir-faire qui rassemblent près de 2 000 salariés. L’heure est depuis à l’innovation et au regroupement des forces et spécificités de chacun. Pour parvenir à redonner au cuir son plein éclat, plusieurs axes de travail ont été définis parmi lesquels l’amélioration de la qualité des peaux et le développement de synergies entre acteurs.

A l’image de cette filière auvergnate, aux quatre coins de l’Hexagone, on cherche désormais à dépoussiérer l’artisanat sous toutes ses coutures. En Bretagne, l’agglomération de Saint-Brieuc et la Chambre de métiers et de l’artisanat des Côtes d’Armor ont récemment lancé un appel à projets destiné à encourager les artisans à innover. Ce sont les métiers de bouche en particulier qui sont concernés par l’initiative, à savoir les pâtissiers, les boulangers, les bouchers, les chocolatiers et restaurateurs. « Lorsqu’on évoque l’innovation, on pense spontanément à de grands projets industriels. Or, il est également essentiel d’aider les artisans à prendre place dans l’évolution économique rapide dans laquelle ils sont intégrés », estime Béatrice Herrou, responsable du service Recherche et Innovation de l’Agglomération de Saint-Brieuc. A la clé, une enveloppe de 15 000 euros apportée par la ville et un accompagnement fourni par la Chambre de métiers et de l’artisanat.

Le numérique omniprésent

La filière vinicole cherche elle aussi à se draper d’une image 2.0 pour trouver un nouvel essor. Il y a 18 mois, une fédération originale a vu le jour dans le but de rapprocher le vin du grand public. Il s’agit de la WineTech qui a rassemblé dès son lancement environ 20 start-up, positionnées au carrefour des technologiques numériques et des vins. On y dénombre aujourd’hui une soixantaine de jeunes sociétés membres. La Gironde, cœur mondial des vins de qualité, est largement représentée parmi les acteurs de la fédération : on peut notamment y trouver Mabouteille.fr, spécialiste de la personnalisation de bouteilles et caisses, Wine Funding, qui œuvre dans le financement participatif du domaine, On s’occupe du vin, positionnée sur le stockage et la logistique en zone urbaine, ou encore Wine Tour Booking, spécialisée dans l’œnotourisme. « Nous avons eu l’idée d’un label commun, en essayant de surfer sur l’esprit de la French Tech, avec l’objectif de devenir plus visibles et porter ce sujet de l’innovation par le numérique dans le domaine viticole », indique Vincent Chevrier, porte-parole et animateur du mouvement. Cette fédération permet aux membres d’accélérer leur business et d’améliorer leur communication avec des stands communs à l’occasion d’événements de grande portée. L’utilisation du label WineTech pour la communication sur les réseaux sociaux est également un levier précieux.

Quand on parle de PIA, on pense généralement au Programme des investissements d’avenir qui soutient les grandes mutations industrielles et leurs innovations. Mais l’artisanat dispose elle aussi de son PIA : Pôle d’innovation pour l’artisanat. Il s’agit d’un label mis en place par le gouvernement, dont la vocation est de favoriser l’émergence de nouveautés artisanales, de renforcer leur lisibilité. 16 centres de ressources sont étiquetés «PIA» à l’échelle nationale, dans toutes sortes de domaines.

Des accompagnements en guise de tremplin

Parmi ceux-ci, le Centre européen de recherche et de formation aux arts verriers (CERFAV), en Lorraine, se distingue par une approche innovante où les technologies numériques sont désormais mobilisées pour concevoir des créations en verre d’un nouveau genre. Certains cours peuvent par exemple porter sur la création d’un programme sur ordinateur destiné à mettre au point un verre intelligent capable de signaler que le liquide qu’il contient est à la température souhaitée. « On imagine parfois que les métiers du verre sont uniquement traditionnels, anciens, archaïques. En réalité, il n’en est rien. Notre but est de faire en sorte que les jeunes créateurs puissent utiliser toutes les techniques actuelles pour inventer et créer de nouvelles formes, de nouveaux produits », explique Denis Garcia, directeur du CERFAV. L’impression 3D est également utilisée pour certaines réalisations. Quelques heures suffisent aujourd’hui pour passer de la conception 3D à la fabrication du produit fini.

De nombreuses initiatives notables ont également été prises en Île-de-France, à l’image du FabLab Ici Montreuil, consacré spécifiquement aux artisans en recherche d’espaces et des équipements singuliers dont ils ont besoin pour leurs créations. Les fraiseuses électriques pilotées par ordinateur et découpeuses laser sont quelques-unes des machines installées. Qu’ils soient ébénistes, stylistes, maroquiniers, luthiers ou encore bijoutiers, les artisans de tous horizons peuvent y trouver leur bonheur. Plus de 60 savoir-faire différents y sont proposés. En plus d’un large parc de machines, les résidents ont à leur disposition des espaces collectifs de travail. Un abonnement de 400 euros par mois leur est demandé pour bénéficier de l’ensemble. Ce lieu atypique propose également des formations pour différents types de profils. Des modules d’introduction, d’initiation ou de perfectionnement aux outils de production numérique et aux techniques artisanales sont disponibles. Des formations de longue durée permettent de se réorienter vers de nouveaux métiers en pleine mutation.

Mathieu Neu

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