Transformation digitale : s’adapter ou mourir ? Par Lancelot Bosques

Temps de lecture estimé : 3 minutes

Thomas Cook, Forever 21, Subway, Kodak, toutes ces grandes entreprises ont une chose en commun : elles n’ont pas su se réinventer et tirer parti de la révolution numérique. Toutes ont dû affronter de graves difficultés. La plupart ont fait faillite. Face à ce phénomène, les grandes entreprises se doivent d’évoluer. Se transformer pour survivre est devenu le mot d’ordre. S’adapter est devenu la norme. Mais jusqu’où va cet impératif d’adaptation ? Qui en est à l’origine ? Et comment les cabinets de conseil réagissent-ils à ce nouvel environnement ? Un ex-employé de Google peut nous aider à répondre à ces questions.

Il travaille désormais chez EY Wavespace Japan – un centre d’innovation – où il a pour mission d’accélérer les projets des consultants en apportant une expertise numérique et des techniques d’innovation. Celles-ci permettent au centre d’approcher les problématiques du client avec un regard neuf. De telles techniques sont essentiellement issues d’entreprises de la Silicon Valley, où la devise consiste à « aller vite, expérimenter, faire des erreurs et recommencer » pour abattre « en un ou deux jour(s) le travail que des consultants peuvent produire en trois à quatre mois », indique-t-il.

 

Start-up : le principal levier de la révolution numérique

Ayant travaillé pour l’une des plus importantes sociétés technologiques au monde, ce consultant ne peut manquer de voir dans les start-ups un moteur clé de la transformation digitale qui s’opère dans le monde de l’entreprise. Les faits sont parlants. Amazon, 1994. Google, 1998. Tesla, 2003. Facebook, 2004. Airbnb, 2008. Uber, 2009. Comme nous pouvons le constater, la date de création de ces géants du numérique n’excède pas vingt-cinq ans. Et pourtant leur jeune âge ne les a pas empêchés, et ne les empêche toujours pas, de bouleverser l’économie mondiale ainsi que nos modes de vie.

Ces anciennes start-ups possèdent indubitablement le pouvoir de transformer le monde tout autant que de nouvelles sociétés technologiques. Elles poussent les grandes entreprises à se réinventer et à innover pour pouvoir « survivre ». Le vocabulaire que nous utilisons témoigne de ce phénomène. Les termes liés au champ lexical de l’adaptation fleurissent dans les articles de presse, les publications universitaires et les communiqués de presse des entreprises elles-mêmes : agilité, polyvalence, flexibilité, interdisciplinarité, innovation ouverte, mutualisation des réflexions, etc. Mais si l’adaptation devient la norme, quels sont les impacts concrets sur l’activité des cabinets de conseil ?

 

Les cabinets de conseil à la rescousse des entreprises

Le contexte d’incertitude et de complexité qui règne de nos jours pousse naturellement les grandes entreprises à se tourner vers les cabinets de conseil. Leurs peurs alimentent les activités de ce secteur. Toutefois, si l’adaptation devient un impératif quasiment vital pour les entreprises, combien d’entre elles osent transformer fondamentalement leur business model ? Selon le consultant interrogé, les projets les plus ambitieux représentent tout au plus un tiers des demandes de leurs clients. Le plus souvent, il s’agit moins de transformation digitale que de numérisation (d’un service, de quelques points de vente ou d’une poignée de processus).

Les cabinets de conseil tentent de réagir à ces changements en diversifiant leurs offres de valeur. Parmi les développements les plus récents se dégage une tendance en faveur de l’excubation. Pourquoi les cabinets de conseil incuberaient-ils des start-ups pour les recommander ensuite à leurs clients ? Peuvent-ils réellement concurrencer des accélérateurs tels que Y Combinator ?

Selon la personne interrogée, les cabinets de conseil visent un marché différent de celui des structures traditionnelles d’accélération de start-ups. Ils poursuivent une approche commerciale adaptée à de « grands comptes » qui cherchent à se diversifier ou à gagner en agilité. « Pour de nombreux professionnels de grandes entreprises, les start-ups, les incubateurs, etc., c’est un peu la cour de récréation », pourrait-on dire. Par leur sérieux, les cabinets de conseil peuvent faire le lien entre ces deux univers antagonistes.

 

Les cabinets de conseil eux-mêmes en danger ?

Si les start-ups sont la force matrice qui anime la révolution digitale, si les grandes entreprises traditionnelles doivent se réinventer pour maintenir leurs performances, qu’en est-il des cabinets de conseil ? Sont-ils durement affectés par les effets de cette révolution ?

En effet, elle n’épargne personne. Prenons la question du recrutement des jeunes talents. Les étudiants fraîchement diplômés des meilleures écoles exigent des méthodes de management plus collaboratives, horizontales ou flexibles. Un baromètre Ipsos-BCG de 2018 indique sur quels critères les étudiants français de 20-25 ans fondent le choix de l’entreprise qu’ils aimeraient intégrer à l’issue de leurs études. Ces facteurs sont : le sens donné à son travail, le style de management, la RSE et les questions environnementales. Sur ce dernier point, le Manifeste étudiant pour un réveil écologique est le signe le plus parlant de cette tendance émergente. Ils sont nombreux à ne pas vouloir d’une carrière rectiligne au sein d’un grand groupe, et à opter plutôt pour l’agilité de start-ups plus en phase avec leurs valeurs et leurs attentes.

Dans ce contexte, il est assez logique que les cabinets de conseil rencontrent également des difficultés pour attirer de jeunes talents. Comment devenir plus attractifs ? Selon l’ex-employé de Google, il est impératif de proposer des environnements plus inclusifs, plus agiles, moins hiérarchisés, d’apporter de la stabilité aux jeunes couples sur le point de fonder une famille, etc. Quoi qu’il en soit, cette problématique ne peut recevoir de réponse simple et univoque puisque les spécificités culturelles de chaque pays peuvent conduire à des conclusions différentes.

À la fin de l’entretien, nous avons abordé le thème de l’automatisation. Sa position sur l’impact des nouvelles technologies est nuancée. Il est indéniable que les machines prendront le relais pour des tâches aujourd’hui exécutées par des hommes et des femmes. Mais l’adoption de ces outils numériques a des limites. Notamment en temps de crise. Selon lui, en pareille circonstance, « nous devons nous connaître les uns les autres et nous faire confiance. » Le facteur humain est en effet irremplaçable dans le monde de l’entreprise. Nous devrons toujours nous réunir, discuter, réfléchir ensemble, débattre et prendre des décisions communes. Pour toutes ces raisons, l’avenir du conseil est garanti. Les entreprises continueront de rechercher une aide extérieure et du contact humain. Si une mission échoue, il ne suffira pas de blâmer les machines. Elles ne répondront pas. Seuls des humains pourront faire face.

Lancelot Bosques
Étudiant Audencia Business School

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