Réveillez-vous
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Voilà qu’Emmanuel Macron fait des ETIncelles

« Réveillez-vous ! ». Emmanuel Macron a sermonné les chefs d’entreprise (directement) et les syndicats (indirectement). En oubliant cependant de rappeler l’État, qu’il est censé diriger, à ses propres obligations…

Cela faisait longtemps. Emmanuel Macron a renoué avec son habitude des petites phrases. Le locataire élyséen n’y est pas allé avec le dos de la cuillère : « Je vois avec inquiétude, je vous le dis franchement, le discours ambiant. Et j’ai l’impression, quand je regarde ces derniers mois, bah qu’on serait arrivés. J’écoute les grands débats, où l’on dit qu’avec l’assurance chômage, les retraites, on peut redistribuer. On peut revenir en arrière. Les réformes, on pourrait mettre sur pause. C’est le moment de savoir comment on va être plus gentil, comment on va engager… Réveillez-vous. Je vous le dis en toute sincérité : réveillez-vous ».

Il poursuit, sur le même ton catégorique et sentencieux : « On est à 7 % de taux de chômage. Il y a en ce moment des restaurateurs qui n’arrivent pas à ouvrir en pleine saison parce qu’ils n’arrivent pas à embaucher. Donc, quiconque pense que le temps est au repos, au mauvais compromis, celui qui se fait contre l’énergie de l’État, de la société civile, de notre tissu économique ; quiconque pense qu’on pourrait, dans le moment que nous vivons, où je vois certains de nos voisins entrer en récession, où les tensions économiques mauvaises pour l’économie, nous ralentir… On vit pas dans le même monde ».

Syndicats et patronat : des métabloquants unis pour ne rien changer ?

Ce coup de gueule présidentiel paraît évidemment justifié. Comment pourrait-on relâcher la bride et prendre du bon temps dans l’univers ultra-concurrentiel de l’économie mondiale, face à la dette, au chômage, à l’inflation et aux immenses révolutions technologiques qui se profilent ? Comment pourrait-on ne serait-ce qu’envisager la création de nouvelles dépenses ?

Dans cette sévère mise au point, Emmanuel Macron vise d’abord le patronat, devant lequel il intervenait, à l’occasion du lancement de l’ingénieux programme ETIncelles – destiné à développer les entreprises de taille intermédiaire (ETI). C’est vrai que le Medef n’a pas été au rendez-vous des grands défis, notamment sur l’emploi des seniors et des jeunes. Les promesses sur les hausses de salaires n’ont pas été tenues. Mais cette mise en garde macronienne, elle vaut aussi pour les syndicats qui continuent de s’ériger en opposants quasiment systématiques. La rumeur d’une grève éventuelle à la SNCF pour les vacances de Noël témoigne d’une grave absence de prise de conscience.

Contrer l’épouvantail du chômage

En vérité, Emmanuel Macron craint – à juste titre – de ne pas parvenir au plein-emploi en 2027, comme il s’y est engagé lors de la dernière campagne. Pour favoriser l’emploi, il veut notamment mettre un terme à la pratique – désormais monnaie courante – qui consiste à négocier une rupture conventionnelle de contrat pour les salariés âgés ; quelques années ou mois avant la retraite. En vérité, patronat et syndicats sont cette fois main dans la main pour appliquer ce tour de passe-passe. L’assurance chômage est alors détournée, utilisée comme une pré-retraite qui ne dit pas son nom. Désastreux pour les finances publiques.

Ainsi, l’objectif fixé pour les seniors est ambitieux : faire en sorte que 60 % des 60-64 ans aient un emploi en 2030. Autre enjeu, et cela vaudra cette fois pour tous les salariés : la réduction de l’indemnisation chômage de 18 à 12 mois. Bruno Le Maire porte depuis longtemps cette mesure. Il semble avoir convaincu l’Élysée.

Emmanuel Macron doit à son tour se réveiller

Si Emmanuel Macron a raison de rappeler à l’ordre le patronat et les syndicats, il oublie toutefois d’appliquer sa diatribe à lui-même. Oui, lui aussi doit « se réveiller ». Et avec lui, toute la machine étatique qui continue, malgré quelques réformes plus cosmétiques que structurelles, à fonctionner comme avant. La dégradation des finances publiques (3 000 milliards de dette) est affligeante. Quant au fardeau fiscal, celui-ci est toujours plus asphyxiant pour les entreprises et les particuliers. Aucune révolution copernicienne ne se profile à l’horizon.

En clair, la puissance publique ne balaye pas assez devant sa porte. Emmanuel Macron devrait s’inspirer de Francis Mer, ancien ministre de l’Économie et des Finances de Jacques Chirac. Récemment disparu, cet homme venu de l’entreprise avait l’habitude, lorsqu’il menait des réunions, de s’intégrer dans le lot des critiques. Il disait : « je nous rappelle » et pas « je vous rappelle ». Parce que donner des leçons, c’est formidable, mais faut-il encore se les appliquer à soi-même. Faute de quoi on risque assez vite de passer pour un rigolo ; voire un Tartuffe. Alors oui, réveillons-nous, réveillons-nous tous !

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