Ce rapport sénatorial fustige la gestion Le Maire

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La mission d’information sénatoriale sur la dégradation des finances publiques vient de rendre son verdict. Il n’est pas fameux pour le gouvernement sortant.

Un rapport cinglant (250 pages) explique les raisons de l’inédit dérapage budgétaire (hors crise) observé lors de l’exercice 2023.

Bruno Le Maire. En voilà un qui occupe le devant de la scène de l’actualité économique depuis sept ans. Fort probable qu’il ne soit plus notre ministre dans quelques semaines. Le Sénat vient de fustiger sa gestion des deniers publics dans un rapport peu amène : « Prévisions imprudentes », « rétention d’information », « déni de démocratie » … Les sénateurs Claude Raynal (président socialiste de la Commission des Finances) et Jean-François Husson (rapporteur-général du Budget, ex-LR) n’ont pas de mots assez durs pour qualifier la politique du gouvernement, face au dérapage inédit des finances publiques.

Voilà pourquoi ils ont tenu – malgré la suspension des travaux du Sénat – à présenter tout de même leurs conclusions à la presse. ÉcoRéseau Business était évidemment dans la boucle. Notons que notre journal alertait, dans un précédent article, sur une possible  censure du gouvernement à l’automne, sanctionné par les LR au nom d’un déficit excessif. De toute évidence, Emmanuel Macron a préféré agir préventivement en dissolvant lui-même l’Assemblée nationale. Ainsi l’état du déficit n’est-il pas pour rien dans la crise politique que traverse actuellement notre pays…

crédits : Sénat
crédits : Sénat

La croissance n’était pas en cause

Entrons, comme aime dire Emmanuel Macron, « dans l’intimité du dossier ». Le rapport Raynal/Husson est conséquent (250 pages). Comme toujours, les équipes du Sénat – où la qualité du travail est bien plus soignée qu’à l’Assemblée – se sont proposées de résumer tout cela en une dizaine de pages, à l’attention des citoyens. Salutaire effort de pédagogie.

D’abord, il apparaît que le dérapage incontrôlé de l’exercice 2023 (5,5 % du PIB en 2023, loin des 4,9 % prévus par le gouvernement) n’est pas dû à une baisse imprévisible de la croissance. « L’écart de 0,6 point de PIB entre les prévisions et le solde exécuté est inédit : sur les 25 dernières années, un tel écart n’a été observé qu’en 2008, lors de la crise financière. » En effet, la croissance en 2023 fut de +0,9 % contre une prévision initiale de 1 %, soit un résultat assez similaire.

Un dérapage de 8 milliards d’euros, inédit hors crise financière

La Commission des Finances poursuit : « Le déficit budgétaire de l’État, prévu à 164,9 milliards d’euros par la loi de finances initiale pour 2023, puis à 172,4 milliards d’euros en loi de finances de fin de gestion, a finalement été de 173 milliards d’euros en exécution, soit 8 milliards de plus que prévu initialement. »

Comment expliquer un pareil écart ? Il faut regarder du côté des recettes fiscales, bien moins importantes que ne l’imagina le gouvernement, dans sa prévision d’un déconcertant optimisme. Ainsi, les équipes de Bercy tablèrent sur une augmentation supposée des recettes de l’IS (impôt sur les sociétés) de + 12 milliards… Par quel miracle ?

« Aucune justification économique n’a pu être apportée pour expliquer ce niveau, pourtant unique dans l’histoire récente », analyse le rapport qui conclut de manière cinglante : « Il est ainsi permis de se demander si le gouvernement n’a pas cherché coûte que coûte à maintenir ses objectifs de déficit public. »

Évolution des prévisions et exécution
de l’IS en 2023 (en milliards d’euros) – crédits : Sénat

« Optimisme déraisonné »

Pis, le rapport Raynal/Husson pointe une dérive par rapport au quinquennat précédent. « Au début du premier quinquennat, l’exécutif se montrait plus prudent dans ses prévisions, ce qui lui permettait, le cas échéant, d’afficher ex post des niveaux de déficit meilleurs que prévu. Désormais, le gouvernement semble porté par un optimisme déraisonné, peut-être pour attester de l’efficacité de la politique économique menée depuis sept ans ou pour afficher un prétendu volontarisme qui ne convainc plus que lui-même. »

En bref, la rigueur initialement observée entre 2017 et 2019 – et qui permit de passer temporairement sous la fameuse barre des 3 % en 2017 et 2018 – a depuis été abandonnée. Comme si le gouvernement avait renoncé, par habitude et lassitude, à s’attaquer vraiment au déficit public.

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