L’IA, un petit plus pour chercher le job de vos rêves.
L’IA, un petit plus pour chercher le job de vos rêves.

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Match Day

L’innovation dans l’emploi et le recrutement est porteuse de promesses : accélération du recrutement, algorithmes de matching entre candidats et entreprises, offre géolocalisée, assessment à distance… Encore faut-il capter la promesse de valeur de cette jungle de jeunes pousses et en faire bon usage. Analyse.

L’emploi et le recrutement ont entamé leur valse de l’innovation. Le monde des petites annonces et du papier a été bouleversé par celui des premiers sites emplois. Souvenez-vous, le site Monster Worldwide a été fondé en 1999. La plateforme Indeed, elle, naquit en 2004. Puis l’accélération des usages numériques a créé de nouveaux services tels que les jobboards. L’émergence des social media a redessiné de nombreux usages notamment avec la possibilité de postuler rapidement et plus finement sur des plateformes telles que LinkedIn où une recommandation du réseau aujourd’hui vaut presque autant qu’une recommandation dans le monde réel. Et dernièrement, le traitement du Big Data et l’intelligence artificielle se sont également immiscés dans la danse. Les bots ont ainsi envahi les process de recrutement notamment pour réaliser un premier tri par mots clés ou compétences sur des postes très convoités. Un procédé tellement dans l’air du temps que désormais, pléthore d’articles RH indiquent comment agencer intelligemment son CV pour mieux taper dans l’œil des algorithmes. En 2017, les services s’affinent pour désormais se pencher sur une expérience recrutement proche d’une expérience client, pour dénicher les fameuses offres du marché caché de l’emploi ou pour encore aider le mammouth Pôle Emploi à se moderniser. « Dans 85% des cas, les entrepreneurs qui ont fondé une start-up dans l’emploi ou le recrutement n’ont jamais travaillé dans les RH. Ils ont souhaité créer des solutions qu’ils auraient aimé avoir au moment de postuler ou de changer de carrière. Ce n’est plus seulement orienté entreprise, c’est un positionnement nouveau sur l’expérience vécue », introduit Jérémy Lamri, président du Lab RH, association qui regroupe les acteurs innovants dans le domaine des RH et fondateur de la start-up Monkey Tie. Et Patrick Bonnin, directeur de Ouest France-Emploi de préciser : « Aujourd’hui, trois offres sur dix sont pourvues parce qu’elles sont publiées. Les sept autres le sont par d’autres biais : cooptation, réseaux, etc. Notre plateforme, comme l’arrivée de nouveaux acteurs, structurent de plus en plus ce marché caché pour qu’il devienne plus visible à la fois pour les entreprises et les candidats ». Tout un programme pour l’emploi.

Revisiter les classiques

« Nous souhaitons contextualiser au mieux les offres d’emploi et en cela nous sommes plus qu’un jobboard », explique Jérémy Clédat, co-fondateur de Welcome to the Jungle avec Bertrand Uzeel, actuellement en phase d’internationalisation. Un dépoussiérage en règle du jobboard grâce à un site qui se revendique aussi en tant que média numérique assorti de ses publications papiers. Outre des offres d’emploi et des articles de presse professionnelle, Welcome to the Jungle propose ainsi des portraits d’entreprise sur mesure pour savoir où l’on met vraiment les pieds. Actuellement, l’entreprise de 36 personnes compte un millier d’entreprises clientes et monétise sa plateforme via abonnements professionnels individuels. Dans un autre registre, Qapa continue sa croissance sur le marché de l’intérim en ayant levé récemment 11 millions d’euros avec Index Ventures et Partech en janvier dernier. Stéphanie Delestre commente : « Nous sommes les premiers à avoir digitalisé les process de l’interim et disrupté le marché, en développant des algorithmes de matching qui utilisent une base de données de cinq millions de profils. Tout se passe en quelques clics. Notre record est de 36 minutes entre le dépôt de l’offre et le début de la mission ». Une modernisation qui décoiffe.

Hors intérim, une offre similaire recourt au traitement du Big Data. Riminder, fait « matcher » offres d’emploi non pourvues et candidats à partir de l’analyse de plusieurs millions de parcours types pour fournir les bonnes recommandations. L’algorithme suggère alors aux recruteurs des profils ciblés par pertinence en estimant un taux de compatibilité entre l’offre et le candidat.

Gagner en visibilité grâce aux communautés et à la géolocalisation

En janvier 2016, Pôle Emploi dans une de ses études expliquait qu’« avec un taux d’utilisation d’Internet et un niveau d’équipement très proches de celui de l’ensemble de la population, les demandeurs d’emploi sont des «habitués» d’Internet et des nouvelles technologies : 96% d’entre eux les utilisent dans leur quotidien et 73% sont inscrits sur les réseaux sociaux ». Dans la même étude, Pôle Emploi évoque que les canaux en ligne ne remplacent pas ceux hors ligne qui restent le moyen le plus utilisé et le plus efficace pour retrouver un emploi tels que la sollicitation du réseau personnel et professionnel qui représente 37% des retours à l’emploi par exemple. Ce faisant, les outils numériques selon Pôle Emploi jouent un rôle complémentaire aux moyens de recherche traditionnels. Les nouvelles technologies permettent ainsi de maximiser les chances de retour à l’emploi. La géolocalisation, entre autres, est au service désormais des profils souhaitant changer de métier ou désirant trouver un emploi comme le propose JobAroundMe, créée en 2011, qui géolocalise les offres tout en permettant de postuler directement depuis un smartphone, un ordinateur ou une tablette avec un CV embarqué. De même Cojob met en relation demandeurs d’emplois et employeurs présents au sein d’un même territoire, d’une même ville ou d’une région.

D’autres applications se sont spécialisées dans des niches sectorielles ou d’activité. Bonanza vient en aide aux étudiants et propose de postuler en dix secondes pour des offres de stage, d’alternance ou de VIE tandis que la plateforme Maintenant s’attaque aux activités saisonnières via la mise en relation des entreprises qui connaissent des pics d’activité (restauration, hospitality, activités de récolte agricole…). Autre tendance à souligner, celle du collaboratif où des start-up choisissent d’animer des communautés dont les membres sont rétribués par rapport au nombre d’offres d’emploi qu’ils mettent en ligne.

Moderniser Pôle Emploi ?

Patrick Bonnin alerte : « L’essor des start-up est indéniable mais faut-il rappeler qu’il existe deux France dont l’une des deux est composée non pas de Bac+ mais de Bac-. Une France des cols bleus qui n’a parfois pas de lettre de motivation à présenter ». Cela explique pourquoi d’autres jeunes pousses décident de s’attaquer plus largement aux racines du mal directement et s’unissent main dans la main avec Pôle Emploi. L’institution serait en pleine cure de jouvence via les différents partenariats liés en BtoB. Le service simulateur d’entretien virtuel de Pôle Emploi a été développé par Bizness Conseil. Le serious game de Pôle Emploi, lui, a été conçu par la jeune pousse Manzalab tout comme Mémo, le tableau de bord interactif de Pôle Emploi a aussi été externalisé chez une autre jeune pousse. Fin 2016, quatre autre start-up ont signé un partenariat avec le ministère du Travail pour participer au plan NET – numérique, emploi, travail – supposé accompagner la digitalisation du marché de l’emploi. Ce plan, outre la formation d’un consortium composé d’acteurs publics et privés, permet à WeTechCare, ClicnJob, Mind Matcher et Monkey Tie de sortir leur épingle du jeu. L’idée étant de faire acquérir à M. Tout-le-monde les codes de la recherche d’emploi et d’aider les publics en difficulté à utiliser le numérique pour trouver de nouvelles opportunités. Si WeTechCare possède une posture plus généraliste en souhaitant rapprocher tous les Français des opportunités offertes par le numérique, la start-up ClicnJob, réseau social et plateforme d’outils pour la recherche d’emploi, propose des quiz, des vidéos, etc., et se destine aux jeunes sans emploi, ni formation, pour leur mettre le pied à l’étrier avec un site ergonomique et ludique. D’autres partenariats explorent même la voie de l’intelligence artificielle comme le projet mené par Paul Duhan avec son assistant intelligent Bob Emploi.

La révolution dans le développement de carrière

Après avoir fait ses armes dans le dating amoureux en ayant fondé Attractive World, Ludovic Huraux a décidé de révolutionner le networking professionnel en utilisant les ingrédients qui ont fait le succès de son site de rencontres. « Il n’y a rien de plus inspirant que de faire de nouvelles rencontres pour échanger des conseils, trouver des mentors, développer de nouvelles compétences. Shapr ne consiste pas en du networking transactionnel. Il est lié à l’inspiration et à l’échange humain comme cela se fait plus naturellement aux Etats-Unis », explique le fondateur de Shapr qui a levé 16,5 millions d’euros après plusieurs tours de tables. Aujourd’hui, la plateforme de networking fédère 700000 membres dont 25% en France avec 2500 inscriptions par jour en moyenne. L’application est gratuite en attendant la sortie des premiers packs premium. « En France, les personnes réseautent au plus mauvais moment, lorsqu’elles ont besoin de quelque chose, d’un investissement ou d’un emploi. La plateforme, elle, rentre dans la logique inverse : créer une première relation qui apportera ses fruits plus tard », analyse Ludovic Huraux, qui décrit son application, plus axée sur la réputation professionnelle, comme un complément à LinkedIn, réseau plus généraliste.

Considérer autrement le candidat

Eviter les clones et dénicher les profils atypiques, fidéliser les talents, limiter les pertes d’argent sur les recrutements ratés. Pour répondre à ces enjeux, nombre de start-up décident de considérer le candidat à l’aune de nouveaux outils numérique. Si les mentalités évoluent doucement en France et que l’on commence à recruter plus sur la compétence que sur le logo d’un établissement prestigieux, les jeunes pousses de l’emploi ont clairement choisi leur camp en mettant en avant les compétences peu mises en valeur sur un CV. Ce faisant, Monkey Tie, start-up retenue par Pôle Emploi, propose des logiciels RH pour aider les entreprises à repenser le recrutement, l’engagement et la gestion de leurs talents. « Grâce à notre solution de matching JARVIS, Monkey Tie optimise la pré-qualification des candidats lors d’un processus de recrutement, en intégrant des critères de compétences, personnalité et moteurs de motivation dès le processus de pré-sélection », explique Jérémy Lamri qui nous précise également que Monkey Tie est très active sur les questions de la mobilité interne, la GPEC et l’engagement des collaborateurs. MindMatcher analyse les textes, leur sémantique, et établit une cartographie des compétences à partir de tous les documents professionnels qui vous concernent : CV, mémoires, thèse, articles, rapports de stage, profil sur les réseaux sociaux… La proposition de valeur de la start-up s’explique par l’extrapolation des compétences y compris sociales par l’analyse du Big Data. Whire, elle, surfe également sur ces fameuses compétences cachées qui n’apparaissent pas dans le CV. L’essor de la vidéo est également à souligner dans cette chasse à la compétence. Le recours à ce média permettrait aux recruteurs de détecter plus facilement les soft skills et les profils atypiques. PitchmyJob, propose ce faisant de répondre à quelques questions proposées par les employeurs par vidéo pour mettre en évidence sa personnalité et sa motivation auprès des recruteurs. La démarche concerne aussi les mises en situation comme le promeut Coxibiz qui propose des assessments vidéo, mais pas seulement. L’autre qualité de la plateforme réside dans le retour fait au candidat sur sa performance quelle que soit l’issue du jeu de rôles. Enfin MeetnMake se destine aux profils que les entreprises s’arrachent. Le site prend la démarche de recrutement à rebrousse-poil en exposant les attentes du candidat sur des sujets parfois peu explicités dans les entretiens traditionnels tels que les horaires, la culture d’entreprise, la qualité du travail…

Les assistants intelligents pour booster le retour à l’emploi

Jobijoba est connu du grand public pour son agrégateur d’offres. Toutefois, l’entreprise, à l’ADN très « tech », est moins célèbre pour ses collaborations BtoB avec les collectivités et les entreprises. Pourtant, elle fait partie de ces acteurs qui font progresser la visibilité des offres. « Nous développons des plateformes en marque blanche dans 48 collectivités. Ce service est né d’un constat dressé par ces mêmes collectivités : la rubrique emploi est la plus consultée des différents sites, mais cette dernière ne présentait pas l’offre du secteur privé. Nous avons également un autre volet pour les entreprises qui recrutent et les cabinets à qui nous proposons des outils qui se pluggent sur les outils de carrière qui permettent l’analyse du CV via nos algorithmes. C’est notre technologie CV Catcher qui pousse des offres auxquelles n’aurait pas toujours pensé le candidat mais toujours en lien avec ses compétences. Une solution qui a déjà séduit Michael Page, Adecco pour Spring, Manpower pour la partie aéronautique, Sopra Steria, le réseau Adequat… », détaille Thomas Allaire, CEO et fondateur de jobijoba.com.

Autre manière d’exploiter les machines apprenantes, Braincities a développé une intelligence artificielle qui analyse la personnalité d’un actif et l’accompagne dans la réalisation de ses objectifs professionnels. Enfin, Bob Emploi, développé par Paul Duhan, l’entrepreneur qui ambitionnait de tuer le chômage grâce aux algorithmes, a été lancé depuis fin 2016. Cet assistant numérique croise les données du marché du travail avec la situation du chômeur tout en s’appuyant sur des millions de parcours chômeurs enregistrés dans les archives de Pôle Emploi. Chaque jour, Bob Emploi suggère cinq actions pour avancer dans la recherche et permet un accompagnement quotidien qui s’enrichit via le machine learning. Malgré de très bonnes intentions, la technologie est loin de faire l’unanimité. L’assistant numérique a effectivement provoqué une levée de boucliers des syndicats opposés au tout numérique. Et à l’heure où nous écrivons ces lignes, l’actuel papa de Bob Emploi n’est pas encore en mesure de dresser un premier bilan sur l’efficience de sa technologie. Le miracle n’a pas encore eu lieu…

Geoffroy Framery

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