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Techniquement, ce sont des normes : 5G = cinquième génération de la technologie de communication sans fil (norme IEEE 802.11ac pour votre gouverne). Elle laisse sur place la vitesse et la couverture de la 4G avec des pointes jusqu’à 1 Gb/s pour des dizaines de connexions ou des dizaines de Mb/s pour des dizaines de milliers de connexions. Du coup, c’est une opportunité hautement stratégique. En France, des start-up pionnières cachent le retard des grands groupes industriels.
Cette 5e génération chahute le monde entier. En Europe, c’est la Finlande qui a dégainé la première. Mais les vraies batailles intéressent la Chine et les États-Unis, avec avantage pour la première, vraisemblablement opérationnelle dans le courant de l’année. L’Europe suit, les opérateurs du mobile français SFR, Bouygues et Orange expérimentent, même si la 4G n’est pas déployée partout ! Du côté des mobiles, certes, les premiers smartphones 5G existeront sans doute en 2019 (le chinois Huawei sera vraisemblablement le premier à en commercialiser). Mais la technologie dépasse largement la téléphonie. La technologie devient la promesse d’une dynamique économique dont les retombées sont estimées à près de 225 milliards d’euros par an d’ici à 2025. C’est une occasion en or pour les start-up, les PME, les grands groupes de proposer de nouveaux produits et services. Année de commercialisation plausible, 2020.
Une puissance nouvelle
« La cinquième génération de communications mobiles se présente comme une génération de rupture, affirme l’Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes (Arcep). Elle ne s’intéresse plus uniquement au monde des opérateurs mobiles grand public, mais ouvre de nouvelles perspectives et anticipe la cohabitation d’applications et usages extrêmement diversifiés, unifiés au sein d’une même technologie. » Car ce sont bien les entreprises et les collectivités qui vont changer de génération. De quelle façon ?
La vitesse, le volume seront multipliés par 10. Passeront dans la bande une grande variété des contenus. La consommation d’énergie des batteries se ralentira de plus de 100 fois par rapport à aujourd’hui. Le délai de réponse ou de latence sera extrêmement court. De quoi renforcer à la fois la sécurité et les vitesses d’interactions : le streaming vidéo 3D à 360 degrés, par exemple, sera fluide, de qualité supérieure à du 8 K avec des possibilités d’interactions quasiment en temps réel (moins d’une milliseconde). C’est la promesse, pour le grand public, de visionner à l’intérieur ou à l’extérieur des contenus immersifs ou en réalité augmentée depuis un simple appareil mobile.
Mais le véritable enjeu de l’infrastructure vise le développement économique des start-up, des PME et des structures publiques. Sa couverture étendue va connecter l’ensemble des objets éparpillés dans les territoires. Les communications ultrarapides (plus de
500 km/h contre 350 avec la 4G) et fiables garantiront la transmission des messages, critère majeur pour des secteurs sensibles, par exemple. De quoi, dans le secteur de la médecine (nouveaux services de télémédecine ou de chirurgie à distance), des collectivités locales, des services à la personne, de la sécurité, de l’informatique, de l’agriculture, des médias, de la finance, de l’éducation déployer l’aide ou l’assistance à distance, généraliser la télémaintenance, bouleverser les services de communications et de conseils…
La 5 G offre l’immédiateté des interventions dans tous les lieux de zones de réception. Y compris dans des secteurs aujourd’hui mal desservis (forêts, zones rurales, montagnes… ou en milieu fermé tels que les parkings, immeubles, réseaux ferrés). L’Arcep dessine le paysage : « [La 5G sera] un véritable “facilitateur” de la numérisation de la société en autorisant le développement de nouveaux usages : réalité virtuelle, véhicule autonome et connecté, ville intelligente – contrôle du trafic routier, optimisation énergétique –, industrie du futur – pilotage à distance des outils industriels, connectivité des machines… » Bref, une tout autre société mondialisée.
Les entreprises françaises ne s’emparent pas des enjeux
Depuis 2018, des expérimentations sont mises en place dans plusieurs régions de France, notamment dans les ports, les hôpitaux, les routes connectées. Par exemple, Ericsson a testé à Paris le pilotage d’un véhicule à 1 600 km de distance. À Nantes, avec La cantine, les start-up et SFR travaillent sur la sécurité ou les usages des objets collectés (IoT). À Rennes, b<>com et des partenaires (spécialisés dans les images du futur, les réseaux 5G, la cybersécurité ou l’e-santé) réalisent des briques technologiques et testent des cas d’usage dans le secteur médical ou la ville intelligente. L’ambition est de valider les nouveaux modèles économiques et l’ensemble des conditions de la réussite.
Mais hors ces entreprises de pointe, la France industrielle ne se réveille tous les matins à l’heure de la 5G. La construction, le transport, l’industrie… ne se sont pas encore saisis pleinement du potentiel claironnant annoncé par l’Arcep. L’Autorité, du reste, ne cache pas s’inquiéter du retard hexagonal. Une récente étude du cabinet Xerfi conclut dans le même (mauvais) sens.
Or, l’enjeu pour la zone euro est majeur. Le plan européen ? Compter en 2020 au moins une grande ville dans chaque pays d’Europe couverte en 5G. Puis en 2025 tous les centres urbains et infrastructures de communication.
En Asie, la Corée du Sud, dès les JO d’hiver en 2018, y est allée de sa démo 5G avec un bus autonome ou des dispositifs de réalité virtuelle (VR) ou de sécurité. En 2020, ce sera au tour de Tokyo. Les États-Unis et la Chine se livrent à une compétition comparable à la course à la Lune du temps de l’Union soviétique. Et pour cause, les deux hyperpuissances tiennent la 5G pour le levier vital de la croissance économique avec de gros impacts sur l’éducation, l’emploi, les transports, la robotique, etc. Vieux Continent, il est temps de te réveiller…
Patrice Remeur