Denis Jacquet : « L’ubérisation pulvérise la définition du travail dont nous avons voulu faire la référence absolue : le salariat ! »

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Par Denis Jacquet Président de Parrainer la croissance, association de PME de croissance en France, président de l’Observatoire de l’Ubérisation et entrepreneur.
Par Denis Jacquet Président de Parrainer la croissance, association de PME de croissance en France, président de l’Observatoire de l’Ubérisation et entrepreneur.

Ce dernier a lui même fait l’objet de tellement de distinctions selon qu’il est public ou privé, selon la branche ou l’accord qui l’encadre, que personne n’y distingue plus rien. Le droit du travail français est une fourmilière dans laquelle seuls les initiés parviennent à se diriger. Mais les dirigeants de PME restent à l’écart car ils n’ont pas les moyens de comprendre sa course folle. A l’heure où la plupart de nos PME sont au bord du gouffre (le taux de défaillance est élevé), il est encore des candidats pour trouver une raison de leur ajouter des obligations supplémentaires, comme une sur-syndicalisation. Certainement la clé de leur réussite ! Cette fourmilière fait « tache » au milieu de notre paysage vierge de mesures intelligentes et réfléchies destinées à développer la croissance et donc l’emploi des Français qui s’appauvrissent malgré les apparences. Ils en sont désespérés, prêts à voter pour le premier joueur de flûte venu.

Il faudrait définir ce qu’est un emploi en 2017. On a fini par confondre le statut, les droits et obligations qui le définissent, et l’emploi lui-même. Un emploi c’est d’abord une envie et une passion, et sa rencontre avec une offre disponible. L’envie de faire ce qui passionne, autant que possible, car tous les emplois ne sont pas épanouissants.

A force de vouloir encadrer et « intermédier » le travail, on a fini par le déconnecter de son contenu, de sa finalité. La forme l’a emporté sur le fond. Le droit l’a emporté sur la passion. Sa préservation sous une forme ancienne excite toutes les attentions de ceux qui ont fait de sa défense et la préservation du statu quo un fonds de commerce rentable qui alimente leur rente et leur paresse intellectuelle.

C’est la raison pour laquelle les « ubérisateurs » contournent l’obstacle. Enorme et indigeste, il est d’autant plus facile à éviter. Plutôt que de tenter de le maîtriser, les plateformes lui ont préféré le statut des indépendants. Ils tentent de donner au travail la relation originelle qui aurait du rester entre un employeur et un employé, libres de discuter leurs conditions de travail ensemble, libres d’en fixer les contours et le contenu. Et ils y réussissent plutôt bien. Nombre de Français découvrent ainsi le bonheur d’organiser son travail, de se faire rémunérer selon un nombre d’heures de travail qu’ils définissent eux-mêmes, et à la hauteur de la qualité de leur production intellectuelle ou physique. Car si l’on oublie un instant les plateformes VTC, la plupart des plateformes permettent à chacun d’augmenter ses tarifs en fonction de la notation, de choisir ses heures et son volume de travail. Et lorsqu’on prend la peine de s’éloigner des clichés d’une nouvelle économie de l’esclavage moderne, et que l’on prend le temps de sonder ces indépendants, on réalise avec « surprise » qu’ils préfèrent ce statut et ne l’échangeraient pas pour un CDI.

Bien entendu tout n’est pas parfait, mais cette forme plus libre du travail a libéré des activités et mis au travail des centaines de milliers de personnes au chômage ou en manque d’activité. Des hommes et des femmes qui choisissent la liberté, l’autonomie, la responsabilité et les préfèrent à l’encadrement qui n’a produit que chômage et pauvreté, conflit et blocage. Il suffit donc de relever le statut social de ces « indépendants » (un terme qu’il faudrait supprimer) et de faire en sorte que les droits fondamentaux à la formation, la santé et la retraite soient respectés. Et laisser le contrat faire le reste.

Il faudra donc tendre vers un statut de l’actif, ce que divers candidats ont enfin entendu de notre part (Observatoire de l’Ubérisation) afin d’unifier tous les statuts existants en un socle commun, lisible et compréhensible, géré par un seul organisme, sans régimes spéciaux, et laisser le solde au contrat. Le tout pourrait tenir dans un petit code, simple et lisible.

Dans le même temps des questions plus graves se posent. Nous considérons désormais que le travail coûte trop cher pour le laisser aux humains, afin d’accroître ou maintenir les profits des entreprises qui ont pourtant besoin que nous ayons les moyens d’acheter leurs produits ! En appauvrissant les hommes au profit de la productivité, on appauvrit les nations avant de condamner les entreprises. Un cercle vicieux.

Il est urgent de cartographier les emplois qui vont disparaître rapidement, y préparer les gens, afin qu’ils puissent retrouver demain l’emploi qui va les quitter et disparaître non seulement en nombre, mais en nature. 40% des emplois que nous connaissons vont certainement disparaître en moins de dix ans. Préparer, orienter, accompagner et former. On n’a pas le droit d’attendre les bras croisés et le cerveau au repos. L’Ubérisation nous pousse à poser le débat, ce qui restera un bénéfice de ce phénomène. Remettre nos sens en marche et nous obliger à réfléchir et agir. Vite.

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