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Etudiant brillant passionné d’informatique, Boris Golden a créé et échoué. Des acquis que le directeur d’investissement de Partech Ventures met désormais à profit…

A seulement 31 ans, Boris Golden a déjà un profil LinkedIn long comme deux bras. Et encore, il n’y a pas indiqué toutes ses expériences ! Il faut dire qu’en l’espace de quelques années, le jeune homme est passé du statut d’étudiant/start-upper inexpérimenté à celui de pointure du venture capital. Un chemin qui a ressemblé bien plus à un parcours du combattant qu’à une voie royale. Avec son lot de plantages, parfois difficiles à avaler. « Il ne faut pas « romantiser » l’échec : sur le moment, c’est dur, reconnaît Boris Golden. Mais bien géré, bien appréhendé, c’est une belle opportunité de se construire. Malheureusement, nombreux sont ceux qui en sortent frustrés. »
Pour le jeune homme, les tâtonnements ont commencé dès les études. Passionné de mathématiques, il intègre la prépa maths sup/maths spé du prestigieux lycée Henri-IV à Paris. Il se destine alors au « noble métier » de la recherche. Il poursuit donc naturellement à Normale Sup, à Lyon. « C’était un univers qui m’étouffait car je le trouvais trop fermé, se souvient Boris Golden. Et puis travailler pendant six mois pour rédiger un article scientifique qui ne serait publié qu’un an plus tard, c’était une temporalité qui ne me correspondait pas. » Il prend donc une année sabbatique, joue les DJ en boîte de nuit en Espagne (!), et revient les neurones rafraîchis pour s’orienter vers un master 2 en intelligence artificielle et théorie de la décision. Bien que déjà piqué par le virus de l’informatique, il ne trouve pas son bonheur et ressort « groggy de tout ce travail en solitaire ». Le jeune homme sent que son salut se trouve dans le secteur privé et embraye sur un master en management de l’innovation (Polytechnique/HEC). « Là les choses ont commencé à prendre une certaine cohérence, analyse Boris Golden. Je me suis rendu compte que tout ce que j’avais fait tournait autour de la création et de l’innovation. »
Business model « pourri »
Ce premier virage pris, l’étudiant fonde en 2010, avec deux amis, Anthony Simon et Nicolas Lemonnier, la start-up FGT network. « J’avais envie de donner corps à mon désir de créer », note Boris Golden. L’idée : mettre au point un système de consultation d’experts via un process automatisé de recherche sur les réseaux sociaux professionnels (LinkedIn, Viadeo, etc.). Le bug, c’est qu’ « aucun de nous n’avait approché le besoin de l’utilisateur. Nous n’avions pas parlé à un seul client ! Du coup, nous avons passé une année à faire toutes les erreurs possibles : un produit peu intéressant, un business model pourri, un tout petit marché… Tous les matins, je me rendais compte que ce que l’on faisait n’était pas bon. » Une rencontre avec un expert vient confirmer le diagnostic. C’est le déclic : une nuit, Boris Golden décide de refondre tout le projet et passe de co-fondateur/étudiant au statut d’entrepreneur à temps plein. Pealk nait de ce nouveau virage. « Le système de recherche que nous avions conçu était intéressant, explique le jeune dirigeant. Nous savions qu’il s’agissait d’un produit qui avait du sens. Nous en avons fait un outil de « chasse » sur les réseaux sociaux. Ce que les gens font mal de manière artisanale, nous en proposions un système automatisé qui pouvait intéresser les chasseurs de têtes, les commerciaux B2B, les journalistes, etc. » Un autre associé, Yann Hourdel, rejoint l’aventure et le produit est lancé début 2012. « Là, j’ai eu l’impression que tout ce que j’avais fait auparavant avait un sens », résume Boris Golden.
Mais l’euphorie est de courte durée. La start-up, qui cherchait à se greffer à LinkedIn, premier réseau social professionnel dans le monde, mise tout sur une collaboration avec le géant californien. Elle commence donc à utiliser l’API (interface de programmation) de LinkedIn, sort une version bêta de sa solution de recherche et contacte la direction du réseau social. Au départ, l’accueil est très positif. En dix semaines, alors que le produit n’est pas compatible avec Internet Explorer, Pealk compte déjà 2700 utilisateurs dans le monde. Les médias en parlent, les utilisateurs apprécient… bref, tout roule. Mais rapidement, le vent tourne et la start-up française, alors en discussion avec LinkedIn en vue de mettre en place un partenariat, se fait planter au dernier moment par la direction du réseau social. Sur un simple coup de fil, c’est la douche froide. Sans explication. S’ensuit un bras de fer par communiqués de presse interposés. L’affaire fait le buzz au bénéfice des jeunes Français, qui passent pour David face à Goliath. « A l’époque, nous étions naïfs mais de bonne foi, assure Boris Golden. Aujourd’hui, je prendrais un billet d’avion et j’irais les voir directement. Car cela avait largement du sens d’envisager un rachat. »
Contacts de la Silicon Valley
Finalement, Pealk signe fin 2012 avec Viadeo, le challenger français de LinkedIn. « Les négociations ont été très compliquées. Nous n’avions aucune expérience dans ce domaine, souligne le jeune homme. Il y avait beaucoup de tensions. C’était assez angoissant. » A la clé : un joli lot de consolation qui propulse Boris Golden directeur de produit de Viadeo. Il y restera plus de deux ans, entre Paris et San-Francisco. « Au départ, j’ai cru que je ne retrouverais plus de boulot parce que LinkedIn nous avait traités de menteurs. En réalité, cela a eu l’effet inverse : j’ai eu des contacts de toutes parts de la Silicon Valley. »
Le dernier virage en date, Boris Golden l’a négocié en rejoignant au mois de février le géant du capital-risque Partech Ventures en tant que directeur d’investissement. Le coup n’était pas prémédité. « Je ne pensais pas faire du venture capital, mais parallèlement à Viadeo j’avais deux années d’expérience dans le mentoring. J’avais notamment été mentor au Camping (accélérateur de start-up, ndlr) et à Microsoft ventures. Au départ, mon envie était d’aider bénévolement des first-time entrepreneurs, car c’est un sujet passionnant. Mais j’ai croisé Romain Lavault (associé chez Partech ventures, ndlr) qui m’a convaincu de les rejoindre. C’est un métier qui catalyse à la fois l’aide, l’enseignement et l’innovation. Tout ce que j’aime. »
Yann Petiteaux