Flottes d’entreprise : du diesel à l’hybride à chevaux forcés !

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D’ici à quatre ans, le diesel pourrait avoir disparu du catalogue des constructeurs automobiles. Pour les flottes d’entreprises qui gardent du gazole dans les veines, le sevrage risque d’être douloureux. À moins qu’avec leurs coûts d’utilisation inférieurs, les voitures hybrides rechargeables succèdent aux modèles diesel sans coup férir et opèrent en douceur la transition vers la voiture électrique.

Le taux de progression de 217 % enregistré fin septembre pour les ventes de voitures hybrides rechargeables à des entreprises traduit enfin le décollage tant attendu des ventes de véhicules « électrifiés » dans les flottes. Mais il cache aussi d’autres réalités. Comme souvent dans les statistiques de ventes, les taux de progression les plus élevés correspondent souvent à de faibles volumes. Ici, cette croissance des ventes de modèles hybrides rechargeables ne représente que 17 110 unités vendues depuis le début de l’année sur un total de 510 573 immatriculations.
De leur côté, les voitures électriques ont enregistré une progression de 16,6 %, soit un total de 17 113 véhicules. Quant aux voitures hybrides (non rechargeables) en croissance de 34 % sur les neuf premiers mois de l’année, elles représentent 25 390 immatriculations.

Des volumes de ventes encore faibles mais représentatifs désormais d’un retournement du marché en faveur des véhicules électriques ou « électrifiés » tels que le sont les voitures hybrides associant un moteur thermique, un moteur électrique et une batterie rechargeable ou pas. 

Une évolution du marché que l’on retrouve dans l’offre de modèles du groupe japonais Toyota. Ce spécialiste des voitures hybrides (non rechargeables) depuis 20 ans propose désormais son SUV compact, le RAV4, dans une version hybride rechargeable. Celui-ci dispose d’une autonomie électrique de 100 km en cycle urbain seul… Un record pour ce SUV familial dont les rejets CO2 se situent en dessous de 22 g/km, ce qui lui permet d’être exonéré de la TVS pour les voitures d’entreprises et même de bénéficier d’un bonus.

Cette poussée des ventes des modèles plug-in doit en effet beaucoup à la fiscalité automobile appliquée cette année.
Depuis le 1er juin, les véhicules hybrides rechargeables bénéficient d’un bonus de 2 000 euros si leur autonomie en mode électrique est supérieure à 50 kilomètres et si leur coût d’acquisition ne dépasse pas 50 000 euros. Dans ce cas, le montant de la TVS (taxe sur les véhicules de société) est limité à 107 euros contre des montants beaucoup plus élevés dans le cas de motorisations diesel ou essence. Sur ce point, l’observatoire du véhicule d’entreprise AMO (Arval Mobility Observatory) a comparé les TCO (coût d’usage total) des véhicules selon leurs motorisations thermique, hybride ou électrique.

L’hybride à l’épreuve des coûts

La Citroën C5 Aircross hybride rechargeable qui est commercialisée à un tarif (bonus déduit) supérieur de 4 650 euros à la version essence équivalente et de 2 200 euros par rapport à la version diesel se montre le modèle le plus compétitif à l’examen des coûts d’utilisation. L’AMO constate que la version hybride rechargeable de 225 ch gagne tous ses duels avec les moteurs thermiques. Pour un usage de 48 mois et 100 000 km, le C5 Aircross hybride rechargeable obtient un prix de revient kilométrique (PRK) de 0,43 euro/km contre 0,564 pour la version essence et 0,58 pour la variante diesel. Le bonus écologique accordé aux hybrides rechargeables joue ici à plein pour favoriser cette motorisation alternative. Les variantes essence et diesel, elles, sont pénalisées par une taxe sur les véhicules de société qui s’élève à 5 827 euros pour l’un et à 5 899 euros pour le second. C’est dire le rôle de la fiscalité dans le succès des hybrides rechargeables.

La même démonstration se vérifie avec le Peugeot 3008 Hybrid face à ses équivalents thermiques. Malgré un tarif catalogue nettement plus élevé, cette version hybride rechargeable du SUV de Peugeot dégage un coût d’usage nettement inférieur, quel que soit le kilométrage, à ceux des modèles essence et diesel. Comme l’indique l’AMO, « le total des charges fiscales et sociales explique cette différence. Elles correspondent à un poste de coût de 14 230 euros pour la version hybride rechargeable, contre 22 227 euros pour le 3008 diesel et 20 885 euros pour l’essence. Ici à nouveau, le bonus écologique de 2 000 euros joue en faveur de l’hybride rechargeable tout comme la TVS, laquelle s’élève à 107 euros pour l’hybride rechargeable contre 5 795 euros pour le diesel et 5 827 pour l’essence. Dernier exemple, en début d’année avec des règles fiscales différentes, le nouveau BMW X1 xDrive 25 e hybride rechargeable donnait déjà le tempo. Ce modèle de 220 ch homologué à 1,8 I/100 km de consommation et 48 g/km de CO2 affichait lors de son lancement un prix de revient kilométrique de 0,516 euros/km contre 0,606 euros pour les versions diesel et essence. Gain sur quatre ans d’utilisation en LLD : 9 000 euros.

L’électrique, compétitive selon l’usage

La voiture hybride rechargeable représente-t-elle dès lors le futur automobile ou simplement une technologie de transition en attendant que l’autonomie des batteries des modèles électriques progresse ? L’AMO apporte un élément de réponse dans un dernier exemple qui compare les performances d’un même modèle disponible avec trois technologies d’électrification différentes. La berline Hyundai Ioniq est proposée en version hybride et hybride rechargeable, mais également en version 100 % électrique. Selon les calculs de l’AMO, quel que soit le kilométrage parcouru durant son utilisation, la version électrique est toujours la plus économique à l’usage. Dans le cas d’une utilisation portant sur 48 mois et 120 000 km, la berline électrique de Hyundai domine avec un prix de revient kilométrique de 0,26 euro, tandis que la version hybride rechargeable affiche un PRK de 0,33 euro et la variante hybride non rechargeable un PRK de 0,32 euro.
Ici, indique cet observatoire, « malgré de moins bonnes valeurs de revente que les versions hybrides et hybrides rechargeables, la Ioniq électrique profite de nombreux atouts fiscaux tels que le bonus de 5 000 euros, une TVS nulle, mais également un montant d’amortissements non déductibles particulièrement réduit ».

La bonne technologie pour un bon usage

En attendant, face à la variété de nouveaux modèles électriques et hybrides et devant la complexité des règles fiscales, la plupart des loueurs longue durée auxquels font appel les flottes pour le financement et la gestion de leur parc automobile développent une activité de conseil. Comme l’explique Gilles Bellemère, directeur général du loueur ALD Automotive, « si la politique fiscale a poussé les entreprises à commander des véhicules électriques et hybrides, des raisons stratégiques ont également conduit nos clients à vouloir “verdir” leur parc automobile, notamment au moment où l’offre des constructeurs commence à se montrer pléthorique. Dans ce domaine, notre conseil de loueur est important car il faut évaluer l’usage qui sera fait du véhicule et être certain qu’il correspond aux besoins du client. Pour l’hybride rechargeable par exemple, il est essentiel de s’assurer que ce véhicule circule bien avec sa faculté à rouler en énergie électrique ». Ce loueur a également développé un programme (ALD Electric) qui comprend l’audit chez le client pour le choix et l’attribution des véhicules, la mise en place d’applications de suivi des consommations, l’évaluation et l’installation des bornes de recharge nécessaires et l’attribution de cartes de recharge pour les collaborateurs.

Même orientation des services chez le loueur Alphabet avec son programme Alpha Electric. « L’orientation fiscale a encouragé les commandes de véhicules électriques ou hybrides rechargeables. Elles représentent aujourd’hui 17 % de nos commandes. C’est colossal au regard de la barre des 10 % qui paraissait une étape inaccessible il y a peu », explique Stéphane Crasnier, PDG d’Alphabet. Toutefois, dit-il, « cette évolution va certes entamer la supériorité du diesel, mais nous avons la responsabilité de proposer le meilleur véhicule à nos clients en tenant compte de sa loi de roulage. Pour cela, il y aura toujours un besoin spécifique de véhicules diesel à destination des gros rouleurs sur des distances auxquelles ni l’électrique ni les modèles hybrides ne peuvent répondre ».

Vers une mixité énergétique

Même constat du côté du loueur Athlon où Gérard de Chalonge, son directeur commercial et marketing, constate « l’appétit » des flottes d’entreprises pour les modèles plug-in (hybrides rechargeables). « Au-delà de la fiscalité favorable, les ventes de modèles hybrides rechargeables décollent en raison de l’arrivée des marques françaises. De quoi démocratiser le plug-in dans les flottes. Renault, par exemple, supprime le diesel sur certains modèles, ce qui va favoriser les ventes de ses versions hybrides essence. Ce n’est pas la mort du diesel, mais le commencement d’une mixité énergétique selon les usages des véhicules. À terme, le diesel pour les gros rouleurs sera progressivement remplacé par l’hydrogène pour des autonomies de plus de 400 kilomètres. »

Pas certain cependant que l’on attende la mise au point de véhicules « hydrogène » pour chasser définitivement le moteur diesel sous le capot des voitures neuves. Comme Renault, de nombreux autres constructeurs font le ménage dans leurs gammes pour en supprimer certaines versions diesel.

Diesel : clap de fin en 2025 ?

Chez PSA, des mesures plus radicales ont été prises. Comme l’annonce Laurent Planchet, directeur Produits de Peugeot, « PSA a arrêté le développement de ses moteurs diesel. D’ici à 2025, il n’y aura plus de moteurs de ce type proposés sur les véhicules neufs du groupe PSA ». En attendant, Peugeot réduit déjà la voilure en matière d’offre diesel. Sur la nouvelle génération du Peugeot 3008, la motorisation hybride rechargeable de 225 ch remplace le moteur diesel de 180 ch présent jusqu’ici sur ce SUV. Seule une version 130 ch diesel reste au catalogue sur ce modèle. « Nous voulons accélérer la transition vers les motorisations alternatives, insiste Laurent Blanchet, et c’est dans cette perspective que le nouveau Peugeot 3008 en version hybride rechargeable 225 ch est proposé aux mêmes loyers de location que la version diesel équivalente. »

Même opération sur les segments supérieurs où figurent le grand SUV 5008 et la berline 508 en versions hybrides. Du côté des citadines, la Peugeot 208 disponible en versions électriques ou essence ne dispose plus que d’une seule proposition diesel de 100 ch. « D’ici à 2025, des progrès auront été accomplis sur le plan de l’autonomie des modèles électriques et en matière d’implantation de bornes de recharge. Dès lors, annonce Laurent Blanchet, pour les gros rouleurs des flottes d’entreprises, le diesel sera remplacé par l’électrique. »

Une tendance que suit également Renault chez qui son nouveau directeur général, Luca de Meo, vient d’annoncer qu’en 2022 tous les modèles de la marque compteront des versions électriques et hybrides. Et pour mieux illustrer son propos, il a dévoilé le concept de la nouvelle Renault Mégane, laquelle sera à l’avenir un élégant crossover 100 % électrique doté de 450 kilomètres d’autonomie dont la silhouette devrait inspirer l’ensemble de la gamme Renault.
Adieu diesel ?

Jean-Pierre Lagarde

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