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Les « Special Purpose Acquisition Companies » ou spac débarquent en Europe après avoir envahi Wall Street. Pour preuve, Accor a annoncé en mai son intention de parrainer un spac dédié « aux activités connexes à son cœur de métier hôtelier ». Bernard Arnault, première fortune française, et le banquier Jean-Pierre Mustier ont lancé à la Bourse d’Amsterdam leur spac dans le domaine des services financiers. Ces deux spac rejoignent ainsi leurs homologues apparus ces derniers mois en Europe et surtout aux États-Unis où l’on trouve même parmi les promoteurs de ces véhicules des stars comme le rappeur Jay-Z, la joueuse de tennis Serena Williams ou le joueur de football Ales Rodriguez. Mais de quoi le spac est-il le nom ? Un spac est une « coquille vide » qui va lever des capitaux par le biais d’une offre publique de vente dans le but de fusionner ultérieurement avec une société non cotée entrée en Bourse plus rapidement que par les procédures classiques. « L’essor des spac offre un moyen alternatif aux investisseurs d’accéder au private equity. C’est un moyen de profiter de la liquidité du marché coté et du potentiel de valorisation d’entreprises initialement non cotées qui seront acquises par le spac », explique Souleymane-Jean Galadima, DG d’Alphacap, une société d’investissement spécialisée dans le private equity. « Cependant, je nuance cette approche. En achetant des parts de spac, on signe un chèque en blanc à un ou plusieurs sponsors. On ne dispose que de peu d’informations sur les futures acquisitions à part la stratégie détaillée dans le prospectus d’introduction de l’AMF. La meilleure garantie reste le track record des associés et leur niveau d’engagement financier », souligne le professionnel.
En étudiant l’évolution des spac aux États-Unis depuis 2015, deux faiblesses sautent aux yeux. Premièrement, 37 % des spac n’ont toujours pas réalisé d’acquisition, soit parce qu’elles n’ont pas assez levé, soit parce qu’elles n’ont pas trouvé de bonnes cibles. Dans ce cas, l’actionnaire n’empoche aucune plus-value puisque la coquille reste vide bien qu’il puisse être remboursé de son investissement après deux ans sans acquisition. Deuxièmement, sur les 223 spac lancées depuis 2015, la performance moyenne est de -18,8 % contre +37,2 % pour les introductions en Bourse classiques sur la même période. « Je ne conclus pas que les IPO classiques sont plus intéressantes, mais les chiffres sont là », indique Souleymane-Jean Galadima. Plus globalement, certains observateurs aux États-Unis commencent à comparer le marché du spac à une bulle proche de celle des valeurs technologiques de 1999 où les investisseurs se précipitent à chaque levée de fonds sans même étudier la viabilité du projet. Un point de vue partagé par Vincent Boy, analyste marché chez IG France. « Aujourd’hui aux États-Unis, 75 % des IPO sont des spac. Je trouve ce type d’investissement risqué, comparable à la folie actuelle pour les cryptomonnaies. D’ailleurs, leur existence est très corrélée à la perception du risque. En 2009, au cœur de la crise, 15 spac ont été lancées, contre plus de 60 cette année », souligne l’analyste. Il est donc recommandé de ne pas se précipiter, de faire le tri et d’étudier avec soin les objectifs des spac et le track record de leurs fondateurs.