Tourisme, du plein français au creux étranger

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Après un printemps catastrophique, le tourisme tricolore a rebondi pendant l’été grâce… aux Français·es

Jamais des départements comme le Jura ou la Lozère n’avaient séduit autant de vacancier·ères ! Assigné·es à résidence, nous avons contraint le secteur touristique à un printemps catastrophique. Puis sur le cœur de saison juillet et août, l’activité a repris jusqu’à dépasser les attentes prudemment chiffrées des professionnels. Enfin le soutien de l’État a soulagé le secteur touristique. À défaut d’une présence massive d’étranger·ères sur notre territoire, notre côté franchouillard aurait sauvé la mise des professionnel·les. Éclairage avec Christophe Marchais, directeur général adjoint chez ADN Tourisme, l’une des fédérations professionnelles scrutatrices de cette richesse nationale absolue qu’est le tourisme.

#CetÉtéJeVisiteLaFrance. Il semblerait que l’initiative lancée par le Collectif Patrimoine 2.0 porte ses fruits. Des frontières longtemps fermées, couplées à une incertitude-angoisse sanitaire, ont largement suffi à décourager plus d’un·e touriste à déposer ses valises sur notre sol. C’est à ses habitant·es trop content·es de sillonner le pays que le secteur touristique doit de s’être sorti d’un sacré bourbier, on dirait que personne n’a été gêné de « marcher dans la boue » ou de (re) découvrir des terroirs ! Même si seul·es 53 % des citoyen·nes français.es ont pu profiter de vacances cette année entre juillet et août, précise un rapport publié par ADN Tourisme. Bien moins qu’en 2019 où plus de 70 % d’entre nous étaient parti·es s’aérer sur la même période. Mais principal motif de satisfaction, la quasi-totalité (94 %) des vacancier·ères français·es « génération 2020 » ont séjourné… en France !

Un tourisme d’hyperproximité

Cet été 2020 ne ressemble sans doute à aucun autre. Oubliez les vacances au soleil à l’autre bout du monde, car cette année s’apparente à la revanche des territoires oubliés. Étranger·ères comme Français·es ont boudé « les grands espaces urbains pour découvrir la campagne, la montagne ou le littoral », souligne Christophe Marchais, directeur général adjoint chez ADN Tourisme, Fédération nationale des organismes institutionnels de tourisme.

Un délaissement des grandes villes – hormis Marseille – qui s’explique notamment par le bouleversement des secteurs de l’événementiel et de la culture en pleine crise sanitaire : annulations de spectacles, festivals, congrès ou séminaires. Si bien que les juillettistes et aoûtiens ont séjourné dans une forte proportion « dans un département limitrophe, voire dans leur propre département ! », constate Christophe Marchais.

Parmi les types d’hébergements, « l’hôtellerie a vraiment souffert de la crise, idem pour les voyages de groupes », tout ce qui pouvait induire une proximité avec autrui a rebuté un bon nombre de voyageur·euses. A contrario, « les activités de plein air, comme la randonnée, le vélo ou le canoë » ont clairement attiré, analyse le représentant d’ADN Tourisme. Sur le plan du comportement des touristes, cette année a été marquée par l’essor « de la réservation de dernière minute et le choix de séjours très courts », un phénomène expliqué par une attitude attentiste, dans la dépendante de l’évolution de la situation sanitaire. « Dès lors qu’un nouveau cluster apparaît, s’enchaîne alors une vague d’annulations », précise notre interlocuteur qui fut le directeur de la Fédération nationale des offices de tourisme.

Le relais des indigènes français a-t-il rétabli l’équilibre ? Pas sûr : « Les grandes villes et surtout la Côte d’Azur ont besoin de cette clientèle étrangère pour vivre », estime Christophe Marchais. Ne nous leurrons, pas, c’est la France entière qui « vit » du tourisme : 7,5 % du PIB !

L’État à la rescousse

Raison pour laquelle l’État-SOS s’est porté immédiatement au secours de la profession. Pour Christophe Marchais, le contrat semble plutôt bien rempli : « On a la chance en France d’avoir du soutien, les professionnels du secteur ont de la reconnaissance pour l’aide de l’État. » Aides intéressées, certes, du prêt garanti par l’État (PGE) au dispositif d’activité partielle. Jusqu’à la fin d’année. Pour la Fédération ADN, il n’est « pas impossible qu’on vienne à rediscuter de son prolongement avec le gouvernement » si la crise venait à perdurer, euphémise Marchais. Sans oublier le fameux « PGE saison » identique au PGE traditionnel mais propre aux professionnels dont l’activité demeure saisonnière, le tourisme en tête. Globalement, le plan de relance satisfait le secteur, même si, remarque Christophe Marchais, le terme « “tourisme” ne se trouve cité que quelquefois, […] d’autres mesures qui balaient d’autres volets comme le numérique aideront le tourisme à bénéficier – indirectement – de soutien, ce qui souligne ainsi la transversalité du secteur ».
Le cœur de saison, avec l’entrain – forcé ou non – des Français·es à séjourner sur le territoire national, aura évité le pire pour le secteur touristique. Seulement voilà, les vacances sont terminées et les professionnels du secteur s’inquiètent d’un retour extrêmement lent d’un tourisme d’affaires. D’abord parce que les entreprises affichent une réelle réticence à imposer des déplacements à leurs salarié·es. Et surtout parce que l’incertitude sanitaire nous guette encore. « Rien de pire pour un professionnel du tourisme de ne pas pouvoir se projeter », s’inquiète l’expert du secteur. Or le virus, lui, semble ne pas prendre de vacances…

Geoffrey Wetzel

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