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Télétravail ou pas télétravail ? La question est évidemment plus compliquée que ça.
Après avoir été porté aux nues, le télétravail est désormais dans l’œil du cyclone, fustigé par un certain nombre de décideurs. Pour autant, si cette pratique doit être raisonnée, elle conserve sa légitimité.
Incroyables, ces mouvements moutonniers. Après le premier confinement, le télétravail était érigé en nouvelle normalité. C’était l’avenir, le branché, le nec plus ultra. Certains en venaient même à se demander s’il était encore pertinent, pour une entreprise, de posséder des locaux.
Le mythe du tout-télétravail s’est enfin effondré
Après tout, nous pourrions tous travailler depuis chez nous ou dans de grands halls de gare réaménagés. Zoom et autres Google Meet nous convoqueraient aux dernières réunions encore indispensables avec d’autres créatures étranges, appelées humains. Et puis demain, allez savoir, nous déléguerions peut-être ces tâches fastidieuses et pénibles à l’IA. Et l’on pourrait très bien vivre à Rome tout en ayant affaire au quotidien à des collègues de Singapour ou de Rio. Ou encore quitter Paris, les grandes agglomérations, et travailler depuis une cabane au fond des bois (à condition de disposer du réseau Wifi).
Et puis, et puis… Le temps a passé. Le virus a été remisé en dernière position des préoccupations, après avoir monopolisé les cerveaux pendant deux bonnes années. Désormais, alors que la conjoncture économique est moins rose, que l’argent du koikilenkoûte ne coule plus à flots, le retour au réel s’affirme chaque jour davantage. Dans les grandes californiennes de la tech’, cela fait déjà une bonne année, voire davantage, que le tout-télétravail a été enterré. Parfois, c’est même le télétravail tout court qui tire sa révérence, comme chez Elon Musk, qui préconise « d’arrêter avec cette connerie ».
La mise au point d’Arthur Sadoun
Récemment en France, c’est Arthur Sadoun, président du directoire de Publicis, qui a jeté un pavé dans la marre. « Toutes les boîtes qui innovent sont revenues au bureau », indique-t-il au micro d’Esprits d’Entreprise, l’émission du Figaro TV. « Les gens rentrent là maintenant. Les gens rentrent ! Et pourquoi ils rentrent ? Parce qu’aujourd’hui c’est démontré que de travailler trop à la maison, passer plus de trois jours en dehors du bureau, joue un peu sur la productivité, mais surtout sur l’innovation ».
« Je dois reconnaître que depuis cette annonce [sous-entendu, le retour au bureau, ndlr] je suis moins populaire […] Il ne faut pas vous tromper : dans des métiers comme les nôtres, si les gens ne sont pas ensemble, il n’y a pas d’innovation et plus important, les jeunes ne progressent pas. Parce que je ne sais pas pour vous, mais moi mon métier je l’ai appris dans les couloirs. Parce que j’étais là tard le soir, parce que je rencontrais les gens, parce que j’allais dans les réunions où je levais la main même pour dire une connerie mais on m’écoutait ».
Ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain
Arthur Sadoun parle d’or. Pour autant, faut-il mettre un terme définitif au télétravail ? Sans doute pas, car le mythe du présentéisme ne vaut pas mieux que celui du distancisme, nouveau mot que nous venons d’inventer. Remplacer une mode par une autre serait stupide. Comme souvent, tout est affaire de compromis, de modération et surtout de bon sens.
Octroyer un jour (éventuellement deux) de travail à distance par semaine est probablement très bénéfique à la viabilité d’une entreprise. Parce que si le bureau est évidemment le lieu essentiel de la vie professionnelle, il n’est pas toujours celui où l’on travaille le mieux. C’est une vérité.
Rappelons que dans le récent sondage Ifop pour Paris Workplace-SFL, les deux tiers des salariés franciliens interrogés estiment qu’ils seront obligés de télétravailler plusieurs jours par semaine dans dix ans. 59 % imaginent d’ailleurs un bureau « à la carte », disponible 24 heures sur 24.