Pour sauver/créer sa boîte, des ruptures inéluctables !

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Les entreprises vont devoir se « métamorphoser »

Tout de suite pour certaines, dans un an pour la vôtre, dans dix, vingt ou trente pour la plupart, les entreprises se métamorphoseront. Non pas à cause de la crise sanitaire mondiale, le processus était déjà à l’œuvre. Mais elle accélère forcément le mouvement. Organisations, entreprises, personnes, se remettent en cause. Et c’est très stimulant.

Bruno Latour, dans son historique Où suis-je ? (publié chez Les empêcheurs de penser en rond), nous donne la trame d’un changement de paradigme accéléré sous l’effet d’un virus qui n’est autre que le « répétiteur » d’une crise autrement plus profonde, celle du « nouveau régime climatique ». Le monde entier va se métamorphoser. Nos activités les premières. « C’est bien la transformation des individus qui la composent, leurs comportements individuels, les relations qu’ils tissent les uns avec les autres, leur comportement en tant que groupe, qui vont induire et guider la transformation de la société elle-même », écrit l’historienne Irène Dupoux-Couturier, cofondatrice en 1973 du Cefri (Centre de formation aux réalités internationales) destiné à accompagner les organisations privées et publiques à mieux comprendre les grandes transformations de notre monde.

Elle en appelle à l’organisation apprenante, née des travaux de Peter Senge, professeur au MIT et spécialiste des organisations : le concept recouvre l’ensemble des pratiques et des dispositions que met en œuvre l’organisation afin de rester en phase avec son écosystème pour tenir cinq objectifs : le développement personnel, le travail en équipe, celui sur les modèles mentaux, la vision partagée, la pensée systémique.

Le cri d’alarme

Nous en sommes-là à des abstractions. Deux économistes français entendent rester dans le concret. Mais alors, leur « leçon » est rude. Il s’agit de Patrick Artus et d’Olivier Pastré qui ont publié en septembre 2020 – c’est déjà loin ! – L’économie post-covid, les huit ruptures qui nous feront sortir de la crise (Fayard). Pour eux, l’acte II, le monde de l’après-covid, débarrassé de ce virus (peut-être pas des suivants) pourrait, Olivier Pastré ose le diagnostiquer, n’advenir que dans dix ans ! Ce professeur d’économie à l’université Paris-VIII et président d’IMB Bank à Tunis ne l’envoie pas dire : on n’échappera pas au « bain de sang » des TPE/PME aujourd’hui sous perfusion du chômage partiel, sous peu livrées à un monde hostile, concurrentiel à outrance, où banques et assurances peu impactées par le choc covid – beaucoup moins que par la crise des subprimes il y a dix ans – ne vont pas forcément prendre l’initiative d’une politique de soutien et de mutation du prêt garanti par l’État en quasi-fonds propres, clé indispensable.

Pour limiter, à défaut de le juguler, ce « bain de sang » annoncé, Artus et Pastré listent huit ruptures que nos dirigeants politiques et nos capitaines d’industrie devraient déjà programmer, préparer, anticiper, à l’échelle de l’Europe qui plus est. « Non pas des réformes », insistent les économistes de l’après-covid, des révolutions.
Lesquelles ?

Les huit ruptures

  • Le soutien des individus les plus fragiles par un revenu minimum.
  • Une réforme profonde des retraites.
  • La révolution des formations, rupture essentielle, d’autant plus vitale en France que formateurs et formations, dans tous les domaines de la vie professionnelle, ne sont déjà plus, et depuis longtemps, à la hauteur des défis. L’après-covid va générer « un choc de compétences », prévient Pastré. Nos enseignements et leurs enseignants ne sont plus adaptés. Les banques vont devoir former ces fameux spécialistes en fonds propres qui seront les pivots d’une nouvelle économie de l’entreprise…
  • Les relations États-entreprises, aujourd’hui plutôt étrangers les uns envers les autres, nécessairement partenaires dans l’après-covid, quand la planification exigée par nos deux visionnaires placera en tête à tête des gouvernements riches de projets, prêts à participer à des chantiers, et le secteur privé, prêt à les mettre en œuvre.
  • L’élargissement significatif des réglementations type Bâle III et Solvabilité II (exigences de ratios de fonds propres face aux encours), pour les banques et assurances, corsetées dans leurs engagements auprès des entreprises.
  • La mise en place d’une taxe carbone sans laquelle l’immense édifice industriel ne changerait pas de trajectoire.
  • Une décentralisation effective, le schéma inversé d’un pouvoir issu du local où s’ancre l’activité, vers un pouvoir fédéralisé et non l’inverse, comme aujourd’hui.
  • Et enfin, aussi surprenant qu’apparaisse la huitième rupture, celle du financement de syndicats érigés en partenaires responsables, clés des financements publics-privés, pour en finir avec les banderoles non représentatives d’idéologies syndicales éclatées et politisées.

Artus et Pastré exposent là des « politiques offensives » où intelligence artificielle et transitions énergétiques supposent des compétences.

Ce sont ces compétences politiques et visionnaires, génératrices des compétences nouvelles vitales pour l’après-covid, que les démocraties aujourd’hui contaminées devront élire pour rebondir vraiment sur cette 6e pandémie régénératrice d’un autre développement, nouvellement pensé.

Olivier Magnan

Au Sommaire du dossier 

1. Entrepreneuriat et aides à la création, paire gagnante

2. L’art et la manière de sauver son entreprise

3. Paur sauver/créer sa boîte, des ruptures inéluctables

4. Entreprises en danger, régions à réaction

5. Comment les États tentent-ils de sauver leurs entreprises ?

 

 

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