pénurie

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Aujourd’hui 18 % des stations-service sont en difficulté. C’est dans le Sud-Est que se font ressentir les premiers signes d’une éventuelle pénurie totale.

La menace d’une pénurie totale de carburant se rapproche. Elle entraînerait la fermeture provisoire de certaines stations-service et une panique générale à la pompe. Peut-on encore éviter ce scénario ? Salomée Ruel, professeure de logistique à Kedge Business School et chercheuse, nous livre son expertise sur l’impact de nos comportements et les solutions à envisager.

« On va mettre le pays à l’arrêt », entend-on du côté des syndicats qui se positionnent contre la réforme des retraites. Et le meilleur moyen pour le faire ? Appeler au blocage de toutes les raffineries. Nous avons déjà pu le constater à l’automne 2022, c’est le type d’initiative qui inquiète le plus les gouvernements. « On ne retient pas les leçons. Dès que ça touche à l’essence, il faut se saisir du sujet à la seconde », expliquait l’an passé un conseiller ministériel à Franceinfo. Alors nos dirigeants feront-ils les mêmes erreurs ?

Mais comme toute bonne idée, il y a un revers à la médaille. Les automobilistes craignent une nouvelle pénurie et une énième hausse des prix du carburant en conséquence. Eux, qui ont déjà vécu la remontée des tarifs après la covid-19 et leur flambée depuis la guerre en Ukraine, craignent une nouvelle déconvenue.

Une prophétie auto-réalisatrice

Il y a comme un goût de déjà vu, presque une allégorie du mythe de Sisyphe. Des conducteurs condamnés à prendre leur mal en patience pour faire le plein à des tarifs hors de prix, c’était déjà le cas en octobre. Et alors qu’une petite éclaircie pointait le bout de son nez, elle a vite été rattrapée par le contexte politique du pays.

Pourtant, sans panique générale, cette crise aurait pu être évitée. « En octobre, peu de gens se sont retrouvés avec leur réservoir vide. La panique a subitement poussé tout le monde à aller à la pompe alors qu’ils n’en avaient pas besoin », pointe Salomée Ruel, professeure à Kedge Business School. Résultat ? Les coûts explosent. Déjà parce que tout ce qui est – ou devient – rare est cher, mais aussi car la pénurie coûte de l’argent aux stations ! « Ce sont des frais cachés, donc certains pensent qu’ils n’existent pas. Mais en cas de rupture, les livraisons d’urgence coûtent très cher aux entreprises », rappelle l’experte en logistique.

Alors, on pourrait se dire que c’est notre comportement – individualiste – qui causera cette nouvelle pénurie. Qu’avec un peu de rationalité et les enseignements tirés d’octobre 2022 on pourrait collectivement empêcher tout cela. Mais, selon Salomée Ruel la leçon est trop fraîche pour être apprise : « Généralement on apprend des crises, mais là c’est trop récent. Les zones les plus touchées en octobre sont encore les zones où les comportements sont les moins raisonnés aujourd’hui. Les gens ont voulu tourner la page et n’ont pas pris le temps de l’apprentissage ».

L’acheminement comme pièce manquante du puzzle

Ce temps d’apprentissage, l’exécutif non plus ne l’a pas pris. « Aujourd’hui le seul levier de redondance capacitaire imaginé par nos dirigeants, c’est d’avoir des stocks de sécurité. Mais ils n’ont aucun plan B pour l’acheminement, c’est pourtant ce qui leur a fait défaut en octobre », dénonce Salomée Ruel.

Oui, car d’un côté il y a des dépôts, remplis à ras bord d’un carburant prêt à l’emploi. De l’autre des stations-service en rupture. Et entre tout ça, une chaine d’acheminement complétement à l’arrêt. Rien de plus frustrant. « Il faut comprendre que les réquisitions, si elles ont lieu, ne viseront pas à produire du carburant, les stocks sont déjà là. Il faut simplement des gens qualifiés pour le livrer aux stations », affirme la professeure à Kedge Business School.

Quelles solutions pour le gouvernement ? La piste des pompes à essence au sein même des dépôts de carburant pourrait s’explorer. Selon notre spécialiste, on compte environ 90 points de stockage en France qui pourraient distribuer de l’essence et du diesel aux conducteurs. Ils couvriraient de larges zones certes, mais cela reste envisageable… Problème, cette solution – bien qu’intéressante – n’arrange en rien le problème d’acheminement.

Autre option, qui ne fera plaisir à personne. Certains militaires sont habilités à transporter du carburant, ils pourraient alors devenir les livreurs de demain. Une solution ultime, puisqu’elle n’a pas de quoi apaiser les tensions, bien au contraire.

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