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Après une décennie de guerre commerciale, Pékin et Canberra jettent la rancune à la rivière. Au moins en apparence…
Pour illustrer cette phase de détente, deux pandas géants vont être prêtés par la Chine au zoo d’Adélaïde.
Oui, il y a un endroit dans le monde où « ça va mieux », où les rivalités s’apaisent. Et cela se passe à côté de chez nous, dans le Pacifique. Le nouveau centre du monde est aussi – rappelons-le – un océan français, grâce à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie et à Wallis et Futuna.
La fin d’une décennie de discorde
Les relations commerciales entre la Chine et l’Australie viennent ainsi de s’apaiser, à l’occasion de la visite du Premier ministre chinois Li Qiang à Canberra. Il s’agit du plus haut responsable chinois à se rendre sur l’île-continent depuis 2017. Il y rencontra son homologue australien, le travailliste Anthony Albanese. Les deux hommes purent sceller un accord qui met fin à une décennie de discorde durant laquelle Pékin tenta d’étrangler économiquement son principal rival occidental dans la zone. Et vice versa.
« En moins d’un an, M. Albanese et moi-même nous sommes rencontrés à de multiples reprises et avons effectué des visites dans nos pays respectifs (…) Cela montre que nos pays attachent une grande importance à nos relations et que celles-ci sont sur la bonne voie, celle d’une amélioration et d’un développement constants », déclare ainsi Li Qiang, tout sourire lors de la cérémonie de bienvenue au parlement australien. Cette nouvelle donne est également l’occasion pour Canberra d’abandonner la plainte qu’elle avait émise devant l’OMC.
Divers systèmes de surtaxes vont être levés
Concrètement, divers dispositifs de surtaxes vont être levés par Pékin. Trois secteurs stratégiques pour l’économie australienne sont notamment concernés : le bois, l’orge et le vin. La viticulture australienne – en plein essor comme on le sait – s’était retrouvée en grande difficulté à partir de 2018, devenant la victime du courroux chinois. Une bouteille australienne se retrouvait ainsi taxée de 116 % à 218 % à son arrivée en Chine, son premier marché à l’export. Le chiffre d’affaires de la filière dans le pays s’était ainsi effondré, passant d’1,1 milliard de dollars en 2018 à moins de 10 millions aujourd’hui.
En réaction, l’Australie avait été, dès 2018, le premier pays occidental à exclure Huawei de son réseau 5G. L’Australie, alors dirigée par le conservateur Scott Morrison, très hostile à Pékin, avait également pris des mesures pour limiter les achats immobiliers par des investisseurs chinois.
La méfiance mutuelle reste de mise
Symbole paroxystique de cette réconciliation : la Chine va prêter à l’Australie deux pandas géants qui séjourneront ainsi au zoo d’Adélaïde, dans le sud du pays. Ils succèderont ainsi à l’actuel couple, appelé à rentrer au pays. Li Qiang l’affirme : « Ce que je peux vous dire, c’est que nous fournirons dès que possible un nouveau couple de pandas tout aussi beaux, charmants et adorables. » Cette illustration nouvelle de la désormais fameuse « diplomatie du panda » permet à Pékin de se présenter sous un jour favorable et sympathique.
Notons qu’avant ce voyage de quatre jours en Australie, Li Qiang avait effectué une visite éclair en Nouvelle-Zélande, autre pivot anglo-saxon de la zone. Cette décrispation sino-australienne n’est toutefois pas complète et la naïveté n’est pas de mise. L’Australie et la Nouvelle-Zélande participent activement au « Five Eyes », vaste alliance de renseignement où ils avancent aux côtés des États-Unis, du Canada et du Royaume-Uni. L’alliance de défense Aukus (rassemblant Washington, Londres et Canberra) suscite également l’ire de la Cité interdite.
Afin de ne pas trop effrayer ses petits voisins, la Chine serait-elle tentée d’amadouer les uns et les autres, à la manière du loup qui se déguise en agneau ? Nous savons que Pékin manœuvre – comme l’Azerbaïdjan – contre la souveraineté française en Nouvelle-Calédonie. La Chine a récemment prouvé aux Îles Salomon – micro-état archipel – qu’elle n’avait pas de scrupule à écarter un gouvernement pour en placer un autre, plus favorable à ses intérêts directs.