La France : entre résilience et fragilité

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Étienne Gorgeon

TRIBUNE. Chaque jour, la France continue de fonctionner comme si rien n’était menacé. Les métros circulent, les hôpitaux soignent, les écoles ouvrent, les services publics répondent présents… Et pourtant, derrière cette apparente normalité, se cache une fragilité désormais structurelle. Avec plus de 43 % de son PIB prélevé sous forme d’impôts et de cotisations, le pays reste riche et protecteur, mais cette générosité fiscale pèse désormais fortement sur sa compétitivité et sa prospérité future. Par Étienne Gorgeon, responsable gestion obligataire chez Sanso Longchamp AM. 

Comme le dit la maxime : « Quand je me regarde, je me désole ; quand je me compare, je me console. » Jamais elle n’a été aussi vraie pour notre pays. À la différence des États-Unis, où un shutdown peut paralyser l’administration fédérale et suspendre le paiement de centaines de milliers de fonctionnaires, la France échappe à une interruption brutale.

Et elle n’est pas seule à connaître des tensions institutionnelles : il aura fallu attendre mardi 21 octobre avant d’avoir un premier ministre au Japon (Sanae Takaichi est devenue la première femme nommée à la tête du gouvernement japonais, ndlr), preuve que l’instabilité politique est un phénomène mondial, et non l’apanage de notre Ve République.

La pression fiscale, frein à l’avenir

La France porte en elle des fragilités qu’il devient urgent d’affronter. La pression fiscale reste parmi les plus élevées des pays développés, atteignant 43,8 % du PIB en 2023, contre 34 % en moyenne dans l’OCDE. Les dépenses publiques, à près de 57 % du PIB, témoignent d’un État-providence généreux… mais une générosité qui bride notre capacité à investir dans l’avenir.

La dette publique, autour de 113-115 % du PIB, continue de croître. Pourtant, la charge nette d’intérêts reste contenue à 3,8 % des recettes publiques, bien inférieure à celle des États-Unis (18 %) ou de l’Italie (9 %) et seulement légèrement au-dessus de l’Allemagne (2 %). La France n’est donc pas au bord du gouffre financier, mais sa marge de manœuvre s’érode lentement, et chaque renoncement économique devient plus contraignant. La suspension de la réforme des retraites illustre l’incapacité chronique du pays à assurer la soutenabilité de son modèle social, un renoncement de plus qui creuse le sillon du déclin.

Riche aujourd’hui, mais pour combien de temps ?

Le véritable enjeu n’est pas la crise immédiate, mais l’appauvrissement relatif à long terme. Faute d’investissements substantiels dans les secteurs stratégiques, éducation, innovation, transition énergétique, technologies de pointe, la France risque de décrocher dans la compétition mondiale.

Le ralentissement de notre compétitivité nous expose à un décrochage progressif face à nos voisins européens et aux puissances émergentes.

Pourtant, il y a de quoi se consoler… un peu. Le PIB par habitant (en parité de pouvoir d’achat) a progressé de plus de 20 % en dix ans, et notre rang international est resté globalement stable. Nous restons un pays riche. Mais la richesse actuelle ne garantit pas celle de demain. La France doit agir, réformer et investir, si elle veut rester une puissance influente et compétitive.

En somme, la France tient encore debout quand elle se compare… mais faute de réformes, elle pourrait devoir chercher sa consolation du côté du FMI.

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