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L’émergence du greenblaming marque une mutation du débat politique autour de l’écologie.
Alors que la prise de conscience avec une nécessité d’agir pour lutter contre le changement climatique et l’effondrement de la biodiversité commence à susciter des politiques ambitieuses, certains pointent ces progrès, en rendant responsable l’écologie de tous les maux.
Une récente note du collectif « Construire l’écologie » propose une définition de ce phénomène appelé le greenblaming. C’est l’utilisation d’arguments trompeurs ou partiels imputant à une politique de transformation écologique des préjudices qui en légitimeraient l’arrêt. Ainsi celle-ci tend à devenir un bouc-émissaire dans les discours de certains acteurs politiques et économiques qui rejettent toute évolution, par crainte, ou par intérêt.
Tout peut se régler sans réglementations !
La montée du greenblaming favorise l’inaction et menace la transition écologique et sociale. Cette critique insidieuse des réformes environnementales envahit l’espace public et on la retrouve dans des débats concernant l’agriculture, l’énergie ou la mobilité. Les arguments trompeurs et les affirmations approximatives pleuvent ! On accuse les pompes à chaleur de ne pouvoir remplacer les chaudières à gaz ! On impute à la décarbonation la montée du prix des voitures neuves !
Pourtant cette hausse du prix est à 85 % due à l’augmentation recherchée de la marge des constructeurs. Ou encore l’affirmation inexacte relatant que l’interdiction progressive de la location des passoires thermiques pénalise les plus pauvres ! Or d’autres facteurs expliquent la pénurie locative, bien au-delà de l’interdiction de la location de passoires thermiques. Et rappelons-nous aussi de la dernière colère manifestée par les agriculteurs qui faisait croire que la crise du secteur est causée par un trop plein de normes environnementales. Et tout peut se régler magiquement par la suppression de ces réglementations !
Faire échouer une transformation juste
L’émergence du greenblaming marque une mutation du débat politique autour de l’écologie. Les adeptes de ce concept déploient une subtilité qui consiste à ne pas nier en bloc la réalité des crises environnementales. Ne pas remettre en cause la nécessité en théorie de la transformation écologique mais s’en prendre aux moyens et au calendrier d’y contribuer. Ce qui est inquiétant dans ce phénomène, ce sont les attaques systématiques contre toute politique publique. Pour cette opposante anti-écologie qui ne présente jamais de contrepropositions crédibles, l’objectif est de faire échouer une transformation juste, équitable et durable de notre mode de vie, vue comme trop contraignante et trop onéreuse. L’étude du collectif « Construire l’écologie » distingue dans ce mouvement en construction, trois catégories d’acteurs : « les droites et extrêmes droites politiques européennes, aux manettes de l’instrumentalisation du mécontentement environnemental, la galaxie des presses et médias conservateurs, et en coulisse, des regroupements industriels ou corporatistes qui ont tout intérêt à ralentir le processus de transformation écologique. »
Aujourd’hui, il est urgent de répondre efficacement aux arguments relevant du greenblaming, en comprenant ses mécanismes tout en construisant une politique écologique efficace, sociale et juste. Neutraliser ce discours défaitiste et à charge sur la transformation écologique qui présente le risque d’un renoncement collectif devant l’effort à réaliser pour réparer notre planète. Le principal défi de l’humanité pour les années à venir serait la démonstration, par une vision planétaire et une responsabilité politique, de la possibilité d’une transition écologique émancipatrice, soutenant ceux qui en ont besoin et le vivant.