George Forrest (Groupe Forrest International) : « L’Afrique doit devenir le continent de l’énergie solaire »

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Le groupe Forrest International, l’une des plus grandes entreprises de la RDC, mise sur l’énergie solaire pour accompagner la transition énergétique du pays. « Malgré son potentiel, le continent africain ne possède qu’un pour cent de la capacité de production solaire mondiale et reste encore trop éloigné des circuits de financement », explique George Forrest, son fondateur et président, à l’origine de plusieurs projets énergétiques renouvelables structurants dans le pays.

L’inépuisable potentiel africain…

Sur le papier, tous les signaux sont au vert. Le continent dispose de 40 % du potentiel solaire mondial et de 60 % des emplacements idéaux pour l’implantation de centrales photovoltaïques. Et surtout, l’énergie solaire apparaît parfaitement adaptée aux spécificités du continent. « Le solaire répond très bien aux besoins des populations rurales et éloignées des centres urbains, qui sont souvent les plus éloignées du réseau électrique », estime George Forrest. En effet, dans les grandes villes, les taux d’accès à l’électricité peuvent atteindre les 90 %. Là où, en moyenne, seuls 20 % des habitants des zones rurales sont équipés. Le groupe Forrest International qu’il a fondé et dirige encore aujourd’hui est d’ailleurs à l’origine de plusieurs projets solaires au Congo via sa filiale Congo Energy, comme la centrale de Manono d’une puissance de 1 MW, mais aussi d’autres chantiers dédiés aux énergies renouvelables, solaires et hydroélectriques.

Simple de fonctionnement et d’installation, adaptée à tous les terrains et activable hors des réseaux de transport et de distribution, elle cumule les avantages, selon plusieurs spécialistes. « (Le solaire) permet une couverture rapide des zones rurales et une augmentation rapide du taux d’électrification dans les zones les plus reculées », estime pour Jeune Afrique, Charaf Deen Wouinsou, directeur d’Africa Energy (Bénin). Son développement futur ne fait d’ailleurs guère de doute, souligne Sahele Fekede, responsable de programme à la Fondation africaine pour le climat, toujours pour Jeune Afrique : « Je vois cette technologie décoller sur le continent. La seule chose qui est discutable, c’est la vitesse et l’échelle à laquelle nous y parviendrons », explique-t-il dans les pages du magazine panafricain. L’optimisme est au rendez-vous.

… encore largement inexploité

Et pourtant. Malgré ce potentiel et ces avancées concrètes, l’Afrique ne dispose que d’un pour cent de la production solaire mondiale. Et, un rapide coup d’œil au mix électrique africain démontre que le continent reste encore très dépendant du triptyque pétrole – gaz naturel et charbon et que les énergies renouvelables n’y occupent qu’une place marginale. « L’exemple de l’énergie solaire est symptomatique des difficultés de l’Afrique : théoriquement riche, concrètement pauvre », souligne George Forrest. Petite note d’espoir : les projets sortent de terre et se multiplient sur le continent. Ils sont parfois pharaoniques, profitant notamment de la baisse continue du prix des équipements photovoltaïques et de la multiplication des subventions publiques à ces projets.

Au Maroc, après le projet Noor Ouarzazate d’une capacité installée de 580 MW, mis en exploitation entre 2015 et 2018, c’est le projet de station solaire Noor Midelt qui est en cours, avec des objectifs de production affichés de 1 600 MW. Au Sénégal, qui vise la couverture totale en électricité durable de son territoire d’ici 2050, les projets solaires se multiplient aussi. Un projet de financement de 84 millions d’euros a ainsi récemment été accordé à AXIAN Energy pour ce qui devrait, demain, être le principal projet énergétique solaire d’Afrique de l’Ouest. « Sous les radars, de nombreux gigawatts d’énergie solaire photovoltaïque ont été installés sur le continent », explique Sahele Fekede, soulignant ainsi la vivacité du marché solaire en Afrique. Rien qu’en 2023, ce sont 3 700 MW de capacité solaire qui ont été ajoutés sur le continent, très majoritairement des centrales en autoconsommation industrielles et commerciales, selon l’Association de l’industrie solaire africaine. Un chiffre qui ne représente pourtant seulement que 1 % du volume global raccordé dans le monde.

« Faire de l’Afrique le continent du solaire est un impératif mondial », selon George Forrest

« Pour accélérer le mouvement, des défis nous attendent dans le domaine du financement des infrastructures, des investissements, le déficit de main-d’œuvre qualifiée ou encore de la lourdeur bureaucratique », explique George Forrest. En effet, selon les données des Nations-Unies, seul 0,6 % des 434 milliards de dollars mondialement investis dans la production d’énergie renouvelable a été fléché vers l’Afrique en 2021. Manquent aussi très souvent des cadres réglementaires et législatifs adaptés aux énergies renouvelables ou encore le déploiement de mécanismes fiscaux incitatifs pour permettre au secteur privé de se mobiliser sur des projets, dont le retour sur investissement n’est attendu qu’au bout de plusieurs dizaines d’années. Des freins qu’il faut absolument réussir à combler, selon les experts. « L’Afrique doit devenir le continent du solaire. Et c’est un impératif mondial. L’augmentation démographique du continent fera croître mécaniquement les besoins en électrique. Il faut faire en sorte qu’elle soit le plus décarbonée possible pour en limiter l’impact sur l’environnement », explique George Forrest. À l’échelle du continent, les objectifs sont d’ores et déjà fixés. Dans une optique d’ailleurs souvent transnationale. La Banque africaine de développement (BAD) a ainsi lancé l’initiative « Desert to Power » autour de 11 pays de la ceinture sahélienne et qui prévoit, d’ici 2030, de fournir 10 gigawatts — soit 10 000 MW — d’énergie solaire à 250 millions d’habitants. Signe que la volonté politique est là. Et que les bailleurs de fonds internationaux sont enfin prêts à suivre ?

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