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Une autodidacte pur jus. Sans diplôme ni formation, Shanty Baehrel, grâce à une communication insolite et surtout beaucoup de travail, a réussi à faire croître son entreprise Shanty Biscuits année après année. Puis, en septembre 2022, même si l’entreprise est toujours rentable, l’électron libre décide de vendre ce qui l’a occupée pendant une décennie. Aujourd’hui, le chapitre est bien fermé, mais le livre entrepreneurial, lui, est encore long.
Je ne viens pas d’une famille où l’entrepreneuriat, le business, coulait de source », reconnait d’emblée l’Aixoise Shanty Baehrel. Mal dans sa peau à l’adolescence, perdue au lycée, la jeune femme ne s’est à aucun moment projetée dans le monde entrepreneurial. Après une inscription en fac de maths qu’elle ne suit que deux semaines, Shanty Baehrel commence des petits boulots : « J’ai rejoint une entreprise d’éclairage à 22 ans dans le Sud […] J’étais au Smic et sans grande ambition, ce que je faisais me suffisait. » Mais parfois, le déclic ne tient pas à grand-chose. Alors qu’elle fête son anniversaire, une de ses amies lui offre un kit d’accessoires de cuisine dans lequel se trouve un tampon à biscuits où il est inscrit « approuvé par le chef ». Pas assez décalé pour Shanty Baehrel, qui aurait aimé inscrire un message plus personnalisé. Un concept naissait : Shanty Biscuits, fin 2012.
Une ascension fulgurante… avant la vente
L’entrepreneure qui s’ignore encore passe quatre mois à tester ses recettes. Seule dans sa cuisine, le biscuit doit être à la fois bon et le message suffisamment visible. Plus que la cuisine, qui n’a jamais été sa grande passion, c’est toute la dimension créative qui la stimulait. Environ 6 000 euros de biscuits vendus la première année, parfois une ou deux commandes par semaine, c’était encore trop tôt pour quitter son job alimentaire, qu’elle exerçait alors à temps partiel. Une amie se marie et lui réclame des biscuits… Les mariages, voilà un bon créneau pour bien commencer ! En parallèle, utilisatrice précoce des réseaux sociaux, Shanty Baehrel s’amuse sur Instagram dès 2012, lorsque le réseau commence doucement à s’installer en France. Avec ses vidéos, une com’ décalée tout comme les messages inscrits sur ses biscuits – « Je te quitte con…d ! », entre autres – la marque a trouvé son identité, incarnée par le tempérament de sa créatrice.
LE COSTUME N’ÉTAIT FINALEMENT PAS TROP GRAND
D’une cuisine, Shanty Baehrel passe à un atelier de 170 m2, puis à une usine de plus de 800 m2. La banque ne croit pas assez dans le potentiel de croissance de son entreprise, alors la dirigeante se tourne vers des business angels pour financer son développement. À l’été 2022, elle pense à vendre son entreprise, qui a toujours été rentable. Se séparer d’une entreprise qui fonctionne, sans avoir la moindre idée de ce qu’elle fera ensuite… Shanty Baehrel ose et vend en septembre 2022. Elle en est persuadée, Shanty Biscuits peut vivre sans elle, notamment grâce au potentiel de la vente en b to b. « J’avais besoin de souffler et j’étais entrée dans une forme de routine qui ne me satisfaisait plus », explique-t-elle.
Et maintenant ?
Même si elle s’est longtemps considérée bien plus artiste qu’entrepreneure, « la gestion d’une entreprise n’était pas ce que je préférais […] Mais cela change peu à peu », Shanty Baehrel a laissé derrière elle son syndrome de l’imposteur. Son Prix Clémentine, décerné en 2018 par la maison Veuve Clicquot et qui récompense l’audace et le talent de cette cheffe d’entreprise, y a contribué. Non le costume n’était finalement pas trop grand. Devenue inspirante, elle donne des conseils aux aspirants entrepreneurs, et assure des conférences, comme ce sera le cas à Lyon fin octobre lors de l’Intelligence Marketing Day. Aujourd’hui, Shanty Baehrel pense à son futur projet : créer une nouvelle boîte ! Son idée doit encore mûrir mais dans les grandes lignes : ce ne sera pas en France, et ce ne sera pas dans le e-commerce ou lié aux réseaux sociaux ! « Je veux créer quelque chose pour que les gens lâchent leur smartphone et prennent vraiment du temps pour échanger et s’amuser […] Recréer du lien et se retrouver », précise Shanty Baehrel, décidément pas prête à retourner dans le monde salarié.
GEOFFREY WETZEL ET JEAN-BAPTISTE LEPRINCE