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Prélèvement à la source, loi Pacte, réforme de l’assurance chômage… Petit résumé synthétique et décryptage des (grands) chantiers menés… « en même temps » que les entreprises devront intégrer coûte que coûte.
Pour Emmanuel Macron, c’est la rentrée de tous les dangers. Pour les chefs d’entreprise aussi. Sur fond d’affaire Benalla pour le président, en chute libre dans les sondages, sur fond de croissance revue à la baisse pour les entreprises en quête d’un second souffle.
Le prélèvement fiscal à la source : le choc sera psychologique
L’enjeu : ce serpent de mer fiscal qu’est la retenue à la source de l’impôt sur le revenu va abaisser « méchamment » le salaire net mensuel des Français/es, mais pas leur revenu annuel. Oui, bien sûr, la France était l’un des tout derniers pays à prélever par tiers et par solde annuels. OK, ça se passe « bien », ailleurs dans le monde, même quand l’entreprise se mue en perceptrice. Mais il n’empêche que cette année 1, à partir de janvier 2019, constituera un impact psychologique sur l’opinion.
Les acteurs : la réforme est portée par le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin et le Premier ministre Édouard Philippe qui en ont fait une affaire personnelle, face à un Emmanuel Macron hésitant au regard d’un tel dossier explosif. Il est vraisemblable que la technologie suivra avec son pourcentage minime de bogues.
Le calendrier : après moult tergiversations et velléités de report, l’application de la réforme sera finalement bien mise en œuvre en janvier 2019 !
Ce que vous devez déjà avoir fait : engrangé une information précise sur le sujet (lire ÉcoRéseau Business n° 53, page 20), vous être assuré que votre cabinet comptable vous présentera des bulletins de salaire ad hoc (TPE/PME).
Loi Pacte : tentaculaire
L’enjeu : booster d’un point le PIB français, c’est l’objectif très ambitieux de la loi Pacte (Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises) dont les 73 articles portent sur les tous les aspects de la vie des PME. Comme doper l’épargne salariale, supprimer le seuil d’effectifs de 20 salariés dans les entreprises pour alléger les obligations qui y sont associées ou encore protéger les intérêts tricolores en intégrant l’IA ou la cybersécurité dans la liste des secteurs relevant d’une procédure d’autorisation avant rachat par un groupe étranger.
Les acteurs : ardemment défendue par le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, la loi Pacte ancre, selon lui, « la politique du gouvernement dans la logique pro entreprise », défendue par Emmanuel Macron.
Le calendrier : examinée depuis septembre 2017 par une commission spéciale de l’Assemblée nationale, cette loi tentaculaire – casus belli pour l’opposition – devrait connaître moult amendements. L’essentiel des mesures prévues n’entrera pas en vigueur avant 2019.
Ce que vous devez déjà avoir fait : mis tous vos services en veille et pris langue avec les représentants syndicaux.
Vers l’assurance-chômage « universelle » ?
L’enjeu : c’est l’une des mesures phares de ce quinquennat : l’extension des indemnités chômage aux salariés démissionnaires et indépendants. Si le projet d’assurance chômage « universelle » relève, a priori, de l’agenda social du gouvernement, moult critères restrictifs s’imposent : durée d’affiliation minimale de cinq ans, poursuite d’un projet d’évolution professionnelle, de reconversion, de formation ou de création d’entreprise.
Les obstacles : le sujet hérisse déjà les syndicats qui voient venir une baisse des droits camouflée. Il divise aussi bon nombre d’experts qui décrient un régime d’assurance-chômage à « double vitesse » selon les profils de demandeurs d’emploi : très peu généreux envers les plus éloignés de l’emploi et très favorable aux plus qualifiés.
Le calendrier : pas de mise en œuvre prévue, les négociations débutent à peine. Syndicats et patronat ont eu leur premier rendez-vous fin août avec le cabinet de la ministre du Travail, Murielle Pénicaud.
Ce que vous devez déjà avoir fait : pas grand-chose, c’est trop tôt. Restez en veille.
Ce qui reste des plans impalpables à portée indirecte pour l’entreprise
Plan pauvreté ou pauvre plan ? Huit milliards d’euros pour « éradiquer le déterminisme de la pauvreté et les inégalités de destin ». Virage social très attendu du quinquennat, le plan pauvreté vise à passer d’une « logique de prestation monétaire » au développement de « l’accompagnement social » dans un pays qui compte 9 millions de « pauvres ». Et ce, via une kyrielle de mesures : fusion des aides sociales pour instaurer un seul et unique « revenu universel d’activité » (dans lequel Benoît Hamon, le tenant dudit revenu universel, dénonce un faux-semblant), formation obligatoire pour les 16-18 ans, création d’un nouveau service public de l’insertion, plus de places en crèches dans les communes pauvres… Le calendrier : si les premières mesures seraient appliquées dès 2019, l’exécutif ne prévoit qu’en 2020 l’adoption d’une loi sur le revenu universel d’activité, avec une concertation lancée dans les six mois pour choisir les allocations qui seraient concernées, selon Agnès Buzyn, ministre de la Santé et des Solidarités.
Le big bang de la santé : « Créer un nouveau système de santé pour les cinquante prochaines années ». Vocation du plan santé dévoilé par l’exécutif et structuré en 54 mesures destinées à en finir avec un modèle à bout de souffle qui mêle urgences saturées et malaise des soignants. Parmi les mesures phares : injecter 3,4 milliards d’euros d’ici à 2020, créer 4 000 postes d’assistants médicaux, réformer les études médicales via la suppression du numerus clausus ou encore changer le mode de paiement des actes. Le calendrier : l’examen de la loi Buzyn devrait avoir lieu début 2019.
Transformer la fonction publique : ne pas faire de la réduction de 120 000 postes de fonctionnaires ‒ promise par le président ‒ l’alpha et l’omega de la réforme actuelle de la fonction publique : une position d’équilibriste adoptée par le gouvernement qui souhaite une transformation en profondeur de l’action publique (dialogue social, recours élargi aux contractuels, mobilité, y compris vers le secteur privé). Avec toutefois un objectif très pragmatique à la clé : améliorer les comptes publics de 30 milliards d’euros d’ici à 2022 ! Les neuf fédérations syndicales du secteur ont exprimé leur désaccord face à une telle réforme propre à «casser le statut des fonctionnaires » et réduire leurs effectifs. Le calendrier : les concertations ont repris en septembre et seront suspendues lors des élections professionnelles dans la fonction publique, le 6 décembre. Le gouvernement ambitionne de présenter un projet de loi d’ici à la mi-2019.
Charles Cohen