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En 1972, paraît un album des dessins de Gébé, L’an 01, sous-titré On arrête tout, on réfléchit, et c’est pas triste que seul·es les plus de quarante ans ont pu à l’époque savourer, un peu dubitatif·ves. Gebé, cet ancien employé de la SNCF qui fit les grands jours de Hara-Kiri et Charlie Hebdo, avait mis en scène un monde d’après-crise (1968), très écolo, très économie circulaire, très libertaire (un film éponyme avait devancé l’album, signé Doillon, avec Coluche, Miou Miou, Depardieu…). Pour d’aucuns, les cinq ou six semaines off suscitées par un simple virus auraient pu constituer l’occasion d’arrêter tout – ce fut le cas –, de réfléchir – on a surtout blablaté et polémiqué – et ce fut triste.
La grande question de l’après-covid est d’actualité : il est l’heure des bilans (volet 1), du constat des changements (volet 2) et des projections (volet 3, la vision du sociologue Jean Viard). En gros, la société France et pratiquement toutes les autres sociétés vont reprendre leurs modèles, à quelques variantes près : la poussée d’un télétravail à encadrer et l’entrée nécessaire dans une transition écologique sociale et industrielle qui aurait de toute façon impacté des entreprises à l’invite, en France, de la loi Pacte. Pas de grandes révolutions, donc, mais peut-être, dans le meilleur des cas, « dix Glorieuses » prédites par notre sociologue optimiste : « Nous avons vécu une tragédie qui nous a fait grandir. Les cartes ont envahi nos écrans, les départs de la ville sont impressionnants, la question de la lutte contre le dérèglement climatique est partout. Et si, grâce à cette pandémie, après un siècle de montée vers la ville, après la société industrielle, après la lutte des classes, on assistait au grand retour des territoires et des lieux, de l’unicité des individus et du sens de la vie ? Et si nous avions basculé dans une nouvelle civilisation, numérique et écologique ? Et si la révolution que l’on attendait était finalement arrivée ? » Une certitude, après avoir rendu le monde instable, l’humanité devrait réfléchir à son devenir…
Olivier Magnan