Gestion et services généraux : les tendances entrepreneuriales pour 2018​

RGPD : êtes-vous prêts ?
RGPD : êtes-vous prêts ?

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Changements à tout va

Si la création d’entreprise est toujours forte – et encouragée –, l’année 2018 voit arriver nombre de changements, d’importances diverses, qui au final bousculent le paysage établi, tant pour la gestion que pour la création. Tour d’horizon des évolutions et des points à surveiller.

Préparez-vous au changement. En 2018, on ne va pas entreprendre comme en 2017… Le début de l’année voit entrer en vigueur non seulement les mesures résiduelles de la loi El Khomri, mais aussi celles voulues par le gouvernement Macron. La bonne nouvelle, c’est que la grande majorité cherche à favoriser la création et la pérennité de l’entreprise : baisse de l’impôt sur les sociétés, doublement des plafonds pour les micro-entrepreneurs (ex-auto-entrepreneurs), accès au compte personnel formation pour les indépendants, éligibilité accrue du portage salarial… Une façon pour le gouvernement d’encourager la dynamique actuelle de création d’entreprise – 2016 était déjà une année forte, avec une croissance de 6 %, et 2017 devrait au final faire mieux encore. Les réformes ouvrent également de grands chantiers, comme la négociation de certains accords au niveau des entreprises et des branches. D’une façon ou d’une autre, tout le monde sera impacté par un ou plusieurs changements cette année, que ce soit dans sa gestion RH ou dans sa comptabilité… Sans oublier la nécessité de plus en plus urgente d’effectuer sa transformation digitale, et l’arrivée de la RGDP en mai prochain. Et si, notamment pour les grandes entreprises, tout cela peut sembler contraignant, nombre des évolutions nécessaires représentent aussi des opportunités d’optimisation ou de digitalisation de ses processus.

1 – Les micro-entrepreneurs libérés

Depuis sa création en 2008, le régime micro-entrepreneur a connu un succès mitigé. S’ils sont plus d’un million en France à être inscrits sous ce régime, le revenu moyen dégagé par ceux qui se consacrent à temps plein à leur entreprise est, selon l’Insee, de 460 euros par mois. Si le régime est souvent critiqué pour mener à un salariat déguisé – et sans obligations sociales pour le client –, « il correspond à un désir croissant des Français vers plus d’autonomie, notamment chez les jeunes générations », rappelait récemment François Hurel, président de l’Union des auto-entrepreneurs.

Le gouvernement, cependant, croit à la simplicité et à l’accessibilité du dispositif, et depuis le 1er janvier dernier, le principal critère est devenu beaucoup moins contraignant : le plafond de chiffre d’affaire annuel (au-delà duquel la bascule doit être faite sur le régime de l’entreprise individuelle) a été doublé, à 66 400€ pour les services et 165 600€ pour les activités commerciales. Une bonne nouvelle pour ceux qui risquaient de devoir changer de statut, mais en revanche, les seuils pour l’exemption de TVA n’ont pas changé, ce qui va complexifier la comptabilité. L’autre bonne nouvelle, c’est que le gouvernement veut faire converger les protections sociales des micro-entrepreneurs vers celles des salariés. Ainsi, depuis le 1er janvier, les plateformes de type Uber doivent prendre en charge l’assurance volontaire acquittée par les travailleurs en cas d’accident du travail, ou leur proposer un contrat collectif.

2 – La (presque) disparition du RSI

C’était peut-être l’une des promesses de campagne de Macron les plus attendues par les indépendants : la fin du RSI, usine à gaz critiquée pour sa lenteur et son inefficacité – « une catastrophe industrielle », selon la Cour des Comptes… Et depuis le 1er janvier, c’est chose faite, ou presque… pas. Pour l’instant, seul le nom sur l’en-tête – la Sécurité Sociale des Indépendants – a changé, et tout le reste est identique. Les prestations ne changent pas, le régime ne change pas, les interlocuteurs ne changent pas… Et surtout, les cotisations et leur mode de calcul, pour l’instant, ne changent pas. La loi prévoit en fait une période de transition de deux ans, pendant laquelle la gestion des différentes missions du RSI (liquidation des retraites, assurance maladie, recouvrement des cotisations, etc.) sera reprise au fur et à mesure par les caisses du régime général (CPAM, CARSAT et URSSAF). Le vrai changement n’arrivera de fait qu’en 2020.

3 – Bulletin de paye simplifié pour tous

S’il est présent déjà dans les entreprises de plus de 300 salariés, le bulletin de paie simplifié –  aussi appelé clarifié – est maintenant obligatoire pour toutes les entreprises. Si, d’un point de vue technique, le changement n’est pas nécessairement complexe – les logiciels de bulletin de paie ont intégré le nouveau modèle depuis longtemps maintenant –, le changement pourra demander un accompagnement de la part des équipes RH ou de la communication. En effet, si le nouveau bulletin est plus simple à lire, il perd en niveaux de détails. Les cotisations sont désormais regroupées par risque : santé, accidents du travail-maladie professionnelle, retraite, famille, assurance chômage, etc., et les noms des organismes de collecte n’apparaissent plus.

4 – N’hésitez pas à vous former !

Décidément, 2018 est une année faste pour les indépendants. Depuis le 1er janvier, ils bénéficient de l’accès au Compte personnel d’activité (CPA), et plus spécifiquement au Compte personnel formation (CPF). Il suffit pour cela de s’acquitter de la contribution à la formation professionnelle. Les prestations sont les mêmes que celles offertes aux salariés : il est possible de cumuler 24 heures de formation pour une contribution correspondant à une année pleine d’activité, jusqu’à un plafond de 120 heures. Au-delà, 12 heures de formation pourront être ajoutées au CPF par année travaillée dans la limite de 150 heures. En pratique, il faudra créer un compte personnel d’activité pour pouvoir consulter ses droits acquis.

Le panel de formation est, là aussi, le même que celui proposé aux salariés : bilan de compétences, actions d’acquisition de compétences, actions d’accompagnement pour les créateurs d’entreprise ou encore validation des acquis de l’expérience (VAE). Les formations ouvertes sont déterminées par le fonds d’assurance-formation dont vous dépendez ou par les chambres de métiers ou d’artisanat ; c’est auprès d’eux donc qu’il faudra vérifier l’éligibilité des formations qui vous intéressent. Cerise sur le gâteau : il est même possible – sur accord exprès de l’organisme d’assurance-formation dont on dépend – de bénéficier d’une indemnité compensant la perte d’exploitation entraînée par le suivi de la formation. Par ailleurs, les Chambres et le fonds de formation des non-salariés financent des formations accessibles même au-delà du plafond du CPF. Alors, cette année, n’hésitez plus : formez-vous !

5 – Le Code du travail : des changements petits…

Au total, c’est bien plus d’une centaine de modifications au Code du travail qui sont entrées en effet au 1er janvier, combinant des mesures issues de la loi El Khomri et les ordonnances du gouvernement Macron. Les changements impactent tous le quotidien de la RH, y compris ceux qui semblent les plus anodins. Maintenant, un Compte personnel d’activité (CPA) rassemble le Compte personnel formation (CPF), le compte pénibilité et le Compte d’engagement citoyen (CEC), autre nouveau venu, qui permet d’inscrire jusqu’à 20 heures sur le CPF grâce à certaines activités de bénévolat ou de volontariat. Autres exemples : les salariés peuvent maintenant prendre les jours de congé au fur et à mesure de leur acquisition sans attendre la première année ; ou encore, en ce qui concerne les contrats saisonniers, d’une saison sur l’autre, la reconduction des contrats serait négociée et l’ancienneté permettrait l’obtention d’une prime… D’autres posent des questions auxquelles on ne sait pas encore répondre : les salariés ont maintenant un droit à la déconnexion, mais quid de la pratique ? Enfin, d’autres évolutions en cours d’année sont à prévoir ; par exemple, le gouvernement a affiché sa volonté d’harmoniser les conditions des congés maternité entre salariées et indépendantes, probablement de façon échelonnée.

6 – … Et d’autres plus grands

Mais les évolutions du Code du travail touchent aussi des questions plus fondamentales. Un des points les plus discutés l’année dernière était le fait que certains accords et négociations prévus par la branche se font désormais au niveau de l’entreprise. C’est, par exemple, le cas des primes. Il va falloir mener cette adaptation, sachant que, de façon parallèle, certains accords et négociations prévus auparavant par la loi se font désormais au niveau de la branche. C’est notamment le cas des CDD qui, restent néanmoins encore très encadrés : durée maximum, modalités de recours restreintes, nombre limité de renouvellements… Tout un planning de négociations qui devront être menées dans l’année. Par ailleurs, un nouveau type de contrat, mis en place au niveau de la branche, fait par ailleurs son apparition : le CDI de projet, aussi appelé contrat de projet, qui devrait être plus ou moins un décalque du CDI de chantier déjà existant.

Les règles de licenciement évoluent également. Les indemnités prud’homales en cas de licenciement abusif sont plafonnées, sauf en cas de harcèlement ou de discrimination ; il existe maintenant un « droit à l’erreur » pour les employeurs en cas de vice de procédures de bonne foi dans les TPE et PME ; les indemnités légales de licenciement augmentent… Et surtout, le recours au licenciement économique est plus facile, la période de temps prise en compte variant en fonction de la taille de l’entreprise.

7 – Petite embellie financière

Mesure annoncée pendant la campagne, et donc attendue, la baisse de l’impôt sur les sociétés a été enclenchée au 1er janvier. Si l’objectif est d’atteindre un taux de 25 % en 2022 pour toutes les entreprises, quels que soient les bénéfices, la mise en place se fait de façon progressive. Cette année, seules les entreprises réalisant entre 75 000 euros et 500 000 euros de chiffre d’affaires sont impactées, leur taux étant baissant à 28 % (contre 33 % auparavant).

En revanche, l’autre évolution majeure en matière fiscale impacte toutes les entreprises tout de suite : il s’agit de la disparition progressive des cotisations chômage et maladie payées par les salariés, qui représentent respectivement 2,4 % et 0,75 % du salaire. La baisse sera compensée, pour l’État, par une hausse de 1,7 point de la CSG. Si la mesure affecte négativement certaines retraites, elle est en revanche favorable aux salariés, qui devraient gagner une hausse estimée de 1,45 % de leur pouvoir d’achat, l’assiette de la CSG étant différente. Mais les indépendants en profitent aussi, puisque les cotisations sociales sont calculées sur le chiffre d’affaires mensuel hors taxes. Des nouvelles données à intégrer dans vos prévisions de l’année.

8 – L’affacturage se démocratise

Selon le cabinet d’étude Altarès, chaque trimestre, faute de trésorerie, 14 500 entreprises de toutes tailles disparaissent en France.

Pourtant, nombreux sont les acteurs de la finance à s’être penchés sur cette problématique: Abn Amro, BNP Factor, Crédit Agricole Leasing et Factoring, Solvafin, Finexkap,…L’écosystème y est dynamisée par les start-up, plateformes de benchmark et courtiers en tout genre.

Néanmoins, seulement 3 % des PME et 1 % des TPE françaises ont recours à une solution de financement de leur poste client. Or les avantages de l’affacturage pour ces entreprises sont nombreux. « Ce service leur permet de financer leur cycle d’exploitation tout en les protégeant contre les impayés et d’externaliser leur recouvrement », souligne Eugénie Aurange, directrice du développement des marchés et de la communication, Crédit Agricole Leasing & Factoring. En augmentation constante depuis plusieurs années déjà, le marché de l’affacturage a connu une croissance de +6,6 % sur les neuf premiers mois de l’année 2017, selon l’ASF. Cette tendance devrait vraisemblablement se poursuivre en 2018. « L’enjeu pour 2018 est de démocratiser l’affacturage, explique Eugénie Aurange. On constate aujourd’hui un changement dans les attentes de nos clients, notamment auprès des professionnels, TPE et PME. » Ces derniers sont à la recherche de solutions plus souples, rapides et sans engagement. « Avec Cash in Time, la nouvelle solution de financement de factures du Crédit Agricole, ils bénéficient d’un service 100 % digital, transparent et à la demande, continue Eugénie Aurange. Il suffit de quelques minutes pour ouvrir un compte en ligne, déposer une facture et savoir si elle est finançable. En moins de 24h, l’argent est viré sur le compte bancaire. »

9 – Le portage salarial de plus en plus attractif

Le secteur du portage salarial connaît depuis 2006 une forte croissance, de près de 20 % par an. Le dispositif permet à un salarié de travailler comme un indépendant – et surtout de facturer – tout en gardant son statut, ce qui limite considérablement les risques liés à la création d’une entreprise. La société de portage émet les factures, se charge des diverses démarches administratives, et peut même proposer de l’accompagnement et des conseils, tout cela contre rémunération. C’est encore le seul point noir du dispositif : les frais de gestions peuvent être élevés, de l’ordre de 15 %.

Mais tout laisse à penser que la tendance va s’accélérer : de 70 000 aujourd’hui, les freelances portés devraient être plus de 600 000 à l’horizon 2025… Il faut dire que le portage salarial a de quoi attirer, et les modifications apportées par la loi Travail, effective depuis le 1er janvier, ne font que renforcer cette attractivité. Ainsi, la convention collective – récente pourtant, car entrée en vigueur le 1er juillet dernier – va faire l’objet de nouvelles négociations au premier semestre 2018, notamment sur le temps de travail, les congés payés et la création d’un fond mutualisé consacré à la formation professionnelle. Mieux encore, mis à part quelques secteurs réglementés et les métiers de service à la personne, un nombre croissant d’activités sont éligibles au portage. Le dernier changement majeur concerne lui les sociétés de portage salarial, pour lesquelles le minimum de garanties financières exigée passe de 9 % à 10 % de la masse salariale, leur donnant ainsi un surcroît de crédibilité.

10 – Transformation digitale

Difficile de parler d’entreprendre en 2018 sans évoquer la question de la transformation digitale des entreprises, que ce soit pour les créateurs ou pour des sociétés déjà existantes. La percée des logiciels internes – CRM, GED, SIRH… – en mode Saas devrait faciliter certaines évolutions évoquées dans les points précédents, du moins d’un point de vue technique.

Par ailleurs, les tendances majeures de la fin 2017 vont perdurer en 2018, avec une accélération probable à prévoir : émergence de l’intelligence artificielle, et son apparition à petite dose dans des domaines de plus en plus variés, développement de la blockchain et des smart contrats, attention accrue portée à la cybersécurité, expansion des fonctionnalités liées au big data… Le choix des solutions reste donc toujours aussi crucial, sachant que l’accent va de plus en plus porter sur la flexibilité et les questions de compatibilité (en partie à cause de la RGDP). Mais comme d’habitude, le diable se niche dans les détails. Par exemple, l’utilisation d’un logiciel de caisse certifié est obligatoire depuis le 1er janvier pour toutes les entreprises qui manipulent des sommes en liquide. Une évolution qui impacte tout de même nombre de PME et TPE. Si, dans la plupart des cas, une simple mise à jour suffit, il faut néanmoins s’en assurer.

11 – L’arrivée de la RGDP

L’évolution majeure qui attend le digital en 2018 est sans conteste l’entrée en vigueur de la RGDP, la nouvelle réglementation européenne sur la protection et la manipulation des données personnelles, en vigueur à partir du 25 mai prochain. Une mise à jour nécessaire à l’heure du big data, des réseaux sociaux, du Cloud et de la publicité ciblée… Et tout le monde est concerné : tout le monde manipule au moins les données de ses salariés et les données de ses clients. Si, techniquement, les textes de loi français ne sont pas encore connus, ils devraient suivre de très près, avec quelques ajustements à la marge, les mesures présentées par le texte européen.

Et les changements à venir vont demander des ajustements majeurs. Les personnes vont ainsi bénéficier de trois nouveaux droits, qui impactent fortement la gestion des données : le premier, une évolution d’un concept déjà familier, est de pouvoir consentir ou s’opposer à tout ou partie d’un traitement en toute connaissance de cause. Le deuxième est un véritable droit à l’oubli, c’est-à-dire à l’effacement définitif des données personnelles du système de l’entreprise, et le troisième est un droit à la portabilité des données, c’est-à-dire de pouvoir changer d’opérateur en récupérant, sous un format exploitable, ses données. Ces deux derniers points notamment demandent encore du travail pour être mis au point. Si, d’un point de vue technique, ce sont surtout les éditeurs de logiciel du secteur qui planchent sur le sujet, toutes ces évolutions demanderont des optimisations voire révisions de processus en place dans l’entreprise. Une opportunité également pour les assurances dont les acteurs ne semblent pas faire preuve du même stade de maturité. Si Axa et Oddo BHF ont déjà explicité médiatiquement leur feuille de route sur ce sujet dès l’été dernier, d’autres acteurs semblent particulièrement préparés à cette mise en conformité à l’image par exemple de Generali.

Les évolutions de la RGDP ne concernent pas que les particuliers. Pour les entreprises, le changement est aussi d’envergure : plutôt qu’un système déclaratif et de contrôle, les entreprises sont maintenant elles-mêmes responsables du respect des nouvelles règles. En pratique, par exemple, cela voudra dire qu’il n’y a plus besoin de faire de déclaration préalable à la CNIL… mais il faudra être en mesure, à tout moment et sur demande, d’apporter la preuve que les processus de traitement des données sont conformes aux exigences législatives. Autrement dit, les entreprises devront, dès la création d’un fichier, s’assurer que les données collectées sont uniquement celles nécessaires à la finalité du traitement envisagé, ne sont pas exploitées dans d’autres buts et sont conservées uniquement le temps nécessaire à la réalisation de cette finalité. Elles devront également tenir un registre de traitement des données, et réaliser des études d’impact dans les cas de traitement de données sensibles.

Jean-Marie Benoist

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