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La France a d’abord subi un premier choc : la mort d’un jeune homme de 17 ans, Nahel, tué par un policier qui a fait usage de son arme après un refus d’obtempérer. Puis, un second choc : l’extrême violence qui sévit dans le pays depuis plusieurs jours. Le second semblant prendre l’ascendant sur le premier.
« Rien ne justifie la mort d’un jeune », a tout de suite déclaré le Président de la République Emmanuel Macron. Encore moins pour un refus d’obtempérer. Ce mardi 27 juin, place à une France endeuillée. Une France qui a le sentiment que ce drame aurait pu être évité. Les hommages fusent, de toute la société, la star du PSG Kylian Mbappé a rendu hommage à Nahel, « ce petit ange parti beaucoup trop tôt ». Qualificatif qui a fait parler.
Après l’émotion… la rébellion, la révolte, les émeutes. Difficile de qualifier le mouvement de violence qui s’est abattu aux quatre coins de la France ces derniers jours. Plus grave, plus fort, et plus étendu encore qu’en 2005. Villes moyennes et petites villes ne sont plus épargnées. Les très jeunes adolescents aussi sèment le chaos, dès 13 et 14 ans. Des mairies incendiées, des écoles brûlées, des centres commerciaux et fast-food pillés, des banques saccagées, des boutiques de luxe dévalisées, des supérettes, des armureries, des concessions de motos. Surtout, le domicile d’un maire pris pour cible à la voiture bélier. Des journalistes, pompiers, passants et propriétaires de véhicules agressés. Nahel fut l’étincelle, mais le malaise, lui, est bien plus profond.
L’on aime tant philosopher en France. Les plateaux télé et éditorialistes se succèdent : à quoi s’attaquent ces artisans du chaos ? Franchement, trouvez-vous un fil rouge entre une mairie, une école, un Lidl, une boutique Nike, un McDonald’s, un mémorial juif, une médiathèque ? Une volonté prime : « tout casser » ! Tout ce qui vient et se dresse devant eux. Nous passons notre temps à chercher les symboles de ces actions primaires, barbares. À la mort inexcusable du jeune Nahel a succédé une délinquance d’opportunité, d’une brutalité inouïe.
Chacun a un rôle à jouer. À la gauche de la gauche de cesser d’alimenter depuis hier ce que nous vivons aujourd’hui : le slogan mélenchoniste « la police tue » – ce sont des policiers qui tuent – ne participe en rien à l’apaisement, et la déclaration récente « ne pas toucher aux écoles, bibliothèques et gymnases », non plus. Car elle sous-entend qu’il y a davantage de légitimité à piller d’autres biens. À la droite de la droite d’arrêter d’instrumentaliser ce mouvement pour ressasser son discours caricatural anti-immigration, irresponsable dans une période où les Français sont à cran (Gilets jaunes, covid, réforme des retraites, inflation, etc.), et où il serait tentant de pointer du doigt des boucs-émissaires. La responsabilisation des politiques doit prendre le dessus sur la récupération, 2023 avant 2027. À tous les utilisateurs des réseaux sociaux aussi, est-il bien nécessaire d’amplifier l’horreur, en repartageant les vidéos de « sauvages » pris dans une course à la surenchère de la violence ? Aux parents enfin d’inculquer à leurs enfants tout ce qui n’est en théorie pas du ressort de l’école.
Aujourd’hui, tout doit être fait pour sortir de la violence, au plus vite. Ensuite seulement, j’ose croire que nous saurons tirer les enseignements de cette nouvelle crise. Et expliquer. Sans justifier. Comment est-ce possible qu’un ado de 14 ans soit aussi habité par un sentiment de haine qu’il décide, plusieurs nuits d’affilée, de mettre à feu et à sang le pays dans lequel il vit ? Au point de rendre ambiguë la frontière qui sépare le réel de la fiction. Face à tant de violence, gare à ce que l’on ne retienne pas de cette crise seulement tous les événements qui ont suivi cette journée du 27 juin, au détriment de ce pourquoi les « émeutiers » prétendent agir, la mort de Nahel.