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« Aujourd’hui, nous sommes 270 organisations signataires de #StOpE. C’est autant d’entreprises qui luttent concrètement contre le sexisme ordinaire au travail »
À l’occasion de la première journée nationale contre le sexisme, ÉcoRéseau Business s’est entretenu avec Anne-Sophie Beraud (cofondatrice de l’initiative #StOpE) et Hadja-Mantou Dramé (chargée de projet à l’Association française des managers de la diversité, AFMD) sur les solutions concrètes pour juguler le sexisme ordinaire au travail. Interview croisée.
L’initiative #StOpE fête ses cinq ans cette année, comment luttez-vous activement contre le sexisme depuis votre création ?
Anne-Sophie Beraud : Nous avons commencé à trois sociétés. Aujourd’hui, nous sommes 270 organisations signataires de l’initiative #StOpE. L’idée a toujours été de mutualiser nos bonnes pratiques en entreprise contre le sexisme ordinaire dans nos rangs. C’est pourquoi nous nous rassemblons tous les trois mois pour faire le point et partager toutes nos actions prises sur le sujet.
Aussi, très concrètement, les dirigeants des organisations qui nous rejoignent doivent signer un acte d’engagement sur huit thématiques (tolérance zéro, sensibilisation, communication, etc.). La première année, ils sont tenus de s’engager sur au moins un de ces huit préceptes.
Hadja-Mantou Dramé : Effectivement, l’idée de cette mutualisation des bonnes pratiques est la clé de l’initiative. Nous mettons aussi en place des groupes de travail à partir de problématiques rencontrées en entreprise. Ici, c’est vraiment le concret qui parle puisque l’on tente de solutionner un problème réel. Je pense notamment à la gender fatigue, qui est un sujet que l’on nous remonte beaucoup en ce moment et sur lequel nous nous penchons. Nous mettons aussi en place une base de données où toutes les entreprises peuvent par exemple partager leurs chartes, outils et ressources sur la question. De quoi inspirer d’autres organisations.
Le baromètre #StOpE 2023 fait à la fois état d’un sexisme ordinaire toujours très présent en entreprise mais aussi des progrès réalisés par vos organisations signataires. Comment interpréter ces chiffres ?
A-S.B : En 2023, quinze organisations de l’initiative #StOpE ont administré à leurs effectifs le baromètre que l’on a créé pour mesurer le sexisme ordinaire en entreprise. C’est intéressant parce que cela nous permet de connaître vraiment l’efficacité de nos actions, comparé à ce qu’il en ressort dans d’autres entreprises françaises, non signataires. Il en ressort que dans nos entreprises signataires, il y a une amélioration de dix points par rapport au diagnostic national. C’est plutôt encourageant. Et c’est finalement un appel à toutes les entreprises pour prendre en main ce sujet et sensibiliser leurs effectifs. Le baromètre prouve que leurs actions auront des conséquences positives.
H-M.D : Sur les huit engagements de #StOpE, le baromètre est formel : les organisations qui les respectent évoluent dans un environnement plus sain. Par exemple, environ 50 % des salariés des entreprises signataires se déclarent plus attentifs et attentives aux comportements sexistes sur leur lieu de travail. C’est deux fois plus que la moyenne nationale.
Comment peut-on aller encore plus loin ?
A-S.B : On veut mobiliser. On a 270 signataires aujourd’hui, ce qui est très bien. Mais il y a beaucoup plus d’entreprises, d’écoles et d’associations que cela en France.
Nous avons aussi l’ambition de mobiliser davantage autour du sexisme à l’international. Certaines des entreprises signataires sont des multinationales, comme Accor, qui exporte les bonnes pratiques mises en place en France dans ses autres succursales à l’étranger. On adapte, on traduit pour toucher plus loin.
H-M.D : Il faut noter que #StOpE grandit de façon exponentielle. Chaque année, on recrute toujours plus d’organisations. Et le but, c’est qu’elles soient toutes actives et motivées. C’est ainsi que l’on pourra aller plus loin dans nos actions.
Concernant l’international, nous avons récemment organisé une conférence internationale « Taking action against sexism in an international setting », qui prouve bien notre engagement et nos ambitions.
Un petit mot pour conclure ?
H-M.D : J’aimerais parler des jeunes générations. On travaille beaucoup sur cette question-là parce que l’on s’est rendu compte avec le baromètre qu’aucune génération n’est épargnée. On sait que 60 % des employées de moins de 35 ans mettent en place des stratégies d’évitement pour ne pas avoir à affronter des comportements et des propos sexistes. C’est l’un des sujets de nos groupes de travail.
A-S.B : Un mot plus général sur le sexisme. Nous, on le traite en entreprise, mais c’est peut-être trop tard. Il faudrait prendre le mal à la racine et parler à nos jeunes. Et surtout ne pas oublier les garçons. Donc, pour résumer, pour régler durablement le problème de sexisme en entreprise je dirais : éduquer dès l’enfance les filles et les garçons !