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« Sport » de riches ? De notables ? De retraités ? Club élitaire de patrons à Breitling ? Que les clichés gardent leur part de péché originel gêne beaucoup les instances dirigeantes du golf en France. La fédération fait tout pour démystifier le practice et populariser la pratique. Oui, le golf est accessible et, non, il n’est pas forcément chronophage. État des lieux d’un sport en voie de démocratisation.
Il s’agit d’un événement qui marquera l’aboutissement d’un plan décennal. Ce mois de juin, à Toulouse, sera inauguré le Golf de la Garonne, un « neuf trous » à quelques encablures du Stade Ernest-Wallon et accessible en transports en commun pour les habitants de la ville rose. « C’est la dernière pierre de notre “plan des 100 petites structures” entamé il y a dix ans, se félicite Olivier Denis-Massé, directeur délégué de la Fédération française de golf. L’objectif, à l’origine, était de développer une offre de sites de golf de taille modeste, proche des centres-villes et accessibles dans tous les sens du terme. » Le projet s’inscrit bien dans la volonté générale de popularisation du sport visé par les instances fédérales. L’image du parcours 18 trous et ses quatre heures de circuit cède face à la part des formats courts et urbains qui, elle, grossit à vue d’œil dans le paysage golfique français. La preuve ? Plus de la moitié des équipements construits depuis la fin des années 2000 sont de type golf compact, pitch and putt ou practice. Pas d’abonnement, nulle barrière à l’entrée, du prêt de matériel à foison, tout est organisé pour que ces structures tentent néophytes et curieux. À convertir comme pratiquants à long terme. Si, sur la carte du golf mondial, la France reste un « petit », cette nouvelle offre présente au moins le mérite de s’adapter à une clientèle en demande d’une pratique plus souple et moins chronophage, davantage estampillée sport loisir que sport élitiste. De là à ce que la sortie golf ne devienne un « loisir one shot » à part entière au même titre que la virée au bowling n’est pas forcément acquis.
Dix nouveaux spots par an
En 2018, on a dénombré 800 000 pratiquants de golf, dont une moitié de joueurs occasionnels, non licenciés. Un chiffre qui ne demande qu’à monter. « Pour paraphraser un slogan connu, l’idée est de dire aux gens “venez comme vous êtes”. Le golf n’est pas si cher et praticable par tous, c’est le sport de toute une vie. Une récente étude suédoise montrait que les adeptes du golf bénéficiaient d’une espérance de vie supérieure à la moyenne », plaide Olivier Denis-Massé. Ce fameux plan des 100 petites structures porte désormais le nombre de spots de golf hexagonaux à près de 750. Plus de 70 % sont publics et gérés par les collectivités ou par des organismes en délégation de service public. Chaque année entre 2007 et 2017, dix nouveaux sites ont aménagé des terrains en moyenne, alors que l’investissement annuel des golfs entre 2012 et 2017 s’est élevé à 83 millions d’euros. De quoi mailler correctement le territoire : 45 % des structures golfiques sont situées dans des zones rurales. « L’impact économique du golf en France s’élève à 1,5 milliard d’euros et génère plus de 15 000 emplois non délocalisables, évalue Éric Douennelle, président de PGA France, l’association des joueurs professionnels et enseignants français, acteur majeur du golf, à la fois prestataire de services auprès de ses membres et organisateur d’événements sportifs. On évalue les retombées indirectes à 400 millions d’euros, alors que le tourisme golfique attire 335 000 adeptes dont 17 % d’étrangers. » Grâce à sa dimension touristique, la filière du golf connaît un impact considérable sur les secteurs variés des loisirs et de l’hôtellerie-restauration, d’autant qu’en moyenne un touriste « golfique » cumule 61 % de dépenses supplémentaires par rapport à un touriste traditionnel. Bien que la crise économique de 2008 ait stoppé la croissance du nombre de licenciés en Europe, le chiffre d’affaires de la filière a augmenté de 5 % au cours de la dernière décennie en France, création de 600 emplois à la clé.
L’entreprise, levier de développement
Pour autant, malgré tous ces efforts de démocratisation, force est de constater que les clichés ont la vie dure. « C’est une image qui nous colle à la peau comme le sparadrap du capitaine Haddock : le golf est catalogué comme un vieux sport de riches en pantalons à carreaux, accessible par cooptation », regrette Éric Douennelle. Ancien joueur professionnel devenu enseignant sur le site de Marcilly-en-Villette, à côté d’Orléans, Alexandre Kaleka abonde : « La majeure partie des pratiquants que je côtoie sont CSP +, voire ++, arborent la cinquantaine. Il est clair que c’est un sport auquel se dédient les personnes qui ont du temps, donc fatalement… Néanmoins, ceux qui découvrent le green pour la première fois sont généralement agréablement surpris par rapport aux préjugés. Il est possible de jouer régulièrement pour 60 euros par mois. C’est un budget, mais pas si éloigné que celui d’un abonnement en salle de sport. » L’autre avantage du golf, c’est qu’il peut se pratiquer à la carte selon ses besoins : en compétition, comme moyen de détente, dans une perspective d’amélioration de santé, car recommandé aux seniors. « 90 % des sites sont ouverts à tout le monde, il existe des formules adaptées à toutes les bourses, insiste Éric Douennelle. Et à défaut de vous lancer dans un “18 trous”, vous pouvez tâter d’un practice et vous amuser sans être membre de quelque club que ce soit. Il va vous en coûter trois euros le seau de balles. »
Et si, à l’heure où vie professionnelle et personnelle s’entremêlent plus que jamais, la clé de cette démocratisation venait du bureau ? « Avec la volonté de faire émerger un grand champion national qui drainerait des vocations dans son sillage, le golf en entreprise est effectivement l’un de nos principaux leviers de croissance », confirme le président de PGA France. Au-delà de l’accélérateur de business et du terreau fertile au développement du réseau qu’il incarne, le golf est depuis une vingtaine d’années plébiscité par les comités d’entreprise, trop heureux de prendre en charge une partie des coûts pour les salariés désireux de swinguer. Avantage : il développe et privilégie l’esprit d’équipe dans un sport individuel par nature.
Marc Hervez