Anne-Charlotte Vuccino et sa méthode Yogist

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« Yoga Fire »

Comment développer une idée de niche sur le bien-être en entreprise grâce à une situation de handicap. Eléments de réponse avec Anne-Charlotte Vuccino, notre entrepreneure retenue pour ce numéro estival en vue des Trophées Optimistes.

«Derrière un avantage, il y a nécessairement une contrainte », martèle un adage chinois. Anne-Charlotte Vuccino fait partie de ces optimistes qui peuvent tordre voire retourner l’adage. Car au-delà de toute exhortation managériale de faire mieux avec moins, certains parcours nous remettent les pendules à l’heure en nous apprenant que rien n’est joué d’avance, même quand le sort semble s’acharner. Anne-Charlotte Vuccino fait donc partie de ces trajectoires où la résilience ouvre aux sentiers sauvages de l’entrepreneuriat. Ancienne consultante en stratégie et diplômée d’HEC, l’actuelle entrepreneure a lancé en septembre 2015 les ateliers et formations Yogist à destination des entreprises. Au premier regard, le parcours semble sans accrocs. Pas d’ombre au tableau. Pourtant, dès avant l’idée d’en vivre financièrement, le yoga a permis à la jeune femme de rebondir après un grave accident qui l’a handicapée à vie.

Accident avec la gendarmerie au Bénin

« Avant le yoga, j’étais allergique au sport. Après ma prépa lettres, je suis partie à HEC où je fus présidente de l’association Action pour le Bénin, une association humanitaire. J’ai passé trois mois au Bénin. Mon séjour s’est terminé lorsque j’ai été percutée par un véhicule de la gendarmerie », se remémore Anne-Charlotte Vuccino. S’ensuivent un court séjour dans un dispensaire local et un rapatriement en bonne et due forme à Paris. « Je pensais être tirée d’affaires une fois hospitalisée en France. Mais j’ai été victime de cinq infections nosocomiales consécutives. A 20 ans, on m’annonce une possible amputation. Mais c’est paradoxalement suite à cette annonce que mon état s’améliore », nous narre la jeune entrepreneure qui a séjourné à l’hôpital pendant moins d’un an. Aujourd’hui encore, sa jambe touchée par l’accident ne plie pas à plus de 90 degrés. Quelques rendez-vous plus tard, la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) reconnaît le handicap. « Après mon diplôme je choisis la voie du conseil en stratégie. Le travail se résume à du desk, j’évolue dans un événement à mobilité réduite. Mais c’est au même moment qu’une collègue me propose de venir à une initiation de yoga, ajoute Anne-Charlotte Vuccino. Une révélation. Le yoga bien que très éloigné de ma formation initiale a été la réponse concrète à toutes mes interrogations même métaphysiques. »

Devenir yogi et entrepreneur malgré le handicap

La jeune femme traînait les talons quatre fois par semaine pour des exercices de kiné. Mais très vite, la discipline de ce sport/mode de vie lui permet d’apprendre à doser la douleur et à adopter des postures plus saines. Fin de la kiné et départ pour l’Inde – Mysore précisément, sorte de lieu de pèlerinage pour tous ceux qui aspirent à devenir yogi – et la Thaïlande pour d’autres formations notamment dans le yoga thérapeutique. Le régime alimentaire suit également. Ce sera sans viande désormais… « A mon retour, je trouve un emploi chez Webedia. Je réalise qu’on est tous à peu près trentenaires et que tous vont chez l’ostéo ou font de la kiné à cause du stress et des postures que nous adoptons chaque jour au boulot. Je quitte alors mon boulot, persuadée que je peux adapter le yoga aux contraintes de l’entreprise malgré les préjugés inhérents à sa pratique. Quelques jours plus tard, EDF me demande de participer à un séminaire avec une centaine de participants. Je n’ai ni marque, ni statut, mais je saisis la balle au bond. Cette première expérience des plus concluantes me pousse à creuser cette idée », souligne Anne-Charlotte Vuccino.

Un « truc ésotérique pour les gonzesses et les hippies » qui cartonne en entreprise

Pour importer le concept en entreprise, ce dernier a subi sans en souffrir quelques modifications. « Il fallait prendre en compte les contraintes logistiques de l’entreprise. Comprendre que les personnes sont en tenue de travail sur leur lieu de travail. Il fallait se séparer du sanskrit et des chakras pour atteindre cette cible pleine de préjugés et de les convaincre que le yoga est un outil de santé et de management et pas seulement un truc ésotérique de gonzesses et de hippies », précise l’entrepreneure.

Contre le scepticisme, Yogist, conçu avec le concours de la recherche, de médecins du travail et d’ostéopathes, propose des ateliers d’initiation à effet immédiat. La solution se présente ce faisant comme un levier RSE pour limiter les troubles musculo-squelettiques, le stress des salariés voire les arrêts maladie. La solution est même prévue pour les collaborateurs nomades grâce à un partenariat développé avec 360° Learning, plateforme de formations à distance qui héberge des formations spécifiques de Yogist et qui se plie toujours à des agendas bien remplis. « Par exemple, la plateforme propose des ateliers de cinq minutes par zone du corps. Nous sommes dans une démarche de prévention. L’offre débute à 10 euros par mois par salarié. L’idée n’est pas tant de former une communauté mais de mobiliser les personnes pour que les entreprises y adhèrent », soutient Anne-Charlotte Vuccino. Aujourd’hui Yogist recense dix enseignants de yoga répartis sur le territoire français pour permettre une proximité des enseignements. Incubé à la station F au sein du dispositif de HEC, Yogist enclenchera sa phase d’accélération cet été pour s’exporter notamment à Sao Polo, au pays du football ainsi qu’à Londres. L’auteure de « Comme un Yogist », réédité cette année chez Solar Editions, ne manque ni d’ambition, ni de projets. Un centre de formation est d’ailleurs dans les tuyaux pour l’année 2018. Une façon de rebondir tout en souplesse.

Geoffroy Framery

 

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