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«La crise sanitaire et économique que nous connaissons aujourd’hui est l’occasion pour les chefs d’entreprise de sortir de la solitude du décideur et de transformer le doute en une formidable énergie de conquête. » Ces propos pour le moins optimistes et voulus tels sont tenus par Olivier de la Chevasnerie, président du réseau Entreprendre, soit près de 14 000 dirigeants dans l’hexagone. Presque deux mois « immobiles » pendant lesquels gouvernement et d’autres acteurs ont instauré des mesures d’aides et d’accompagnement pour les entreprises. Objectif : apporter des solutions concrètes et rapides. Pour rappel :
• Délais de paiement d’échéances sociales et/ou fiscales (Urssaf, impôts directs).
• Remises d’impôts directs décidées dans le cadre d’un examen individualisé des demandes.
• Report du paiement des loyers, des factures d’eau, de gaz et d’électricité pour les plus petites entreprises en difficulté.
• Aide jusqu’à 1 500 euros pour les très petites entreprises, les indépendants, les professions libérales et les micro-entrepreneurs les plus touchés grâce au fonds de solidarité financé par l’État et les régions.
• Mobilisation de l’État à hauteur de 300 milliards d’euros pour garantir des lignes de trésorerie bancaires dont les entreprises pourraient avoir besoin à cause de l’épidémie
• Soutien État-Banque de France (médiation du crédit) pour négocier avec sa banque un rééchelonnement des crédits bancaires.
• Maintien de l’emploi dans les entreprises par le dispositif de chômage partiel simplifié et renforcé (1 million d’entreprises pour presque 13 millions de salariés).
• Appui au traitement d’un conflit avec des clients ou fournisseurs par le Médiateur des entreprises.
• Reconnaissance par l’État et les collectivités locales du coronavirus comme un cas de force majeure pour les marchés publics. En conséquence, pour tous les marchés publics d’État et des collectivités locales, les pénalités de retards ne seront pas appliquées.
• Plan de soutien aux entreprises françaises exportatrices.

Fonds de solidarité jusqu’à 1 500 euros, qui est concerné ?

• TPE, indépendants, microentrepreneurs et professions libérales de 10 salariés au plus, moins d’1 million d’euros de chiffre d’affaires, au bénéfice annuel imposable inférieur à 60 000 euros et qui subissent une interdiction d’accueil du public selon l’article 8 du décret du 23 mars 2020, même si elles conservent une activité comme la vente à emporter, la livraison et les retraits de commandes.
• Bruno Le Maire, ministre de l’Économie et des Finances, a annoncé le 15 avril que les agriculteurs membres d’un groupement agricole d’exploitation en commun (GAEC), les artistes auteurs, et les entreprises en redressement judiciaire ou en procédure de sauvegarde pourront également bénéficier du fonds de solidarité.
• Pour les situations les plus difficiles, un soutien complémentaire d’un montant de 2 000 à 5 000 euros octroyé aux entreprises qui ont bénéficié du premier volet du fonds (l’aide jusqu’à 1 500 euros) et qui emploient, au 1er mars 2020, au moins un salarié en contrat à durée indéterminée ou déterminée, si elles se trouvent dans l’impossibilité de régler leurs dettes exigibles dans les trente jours et le montant de leurs charges fixes, y compris les loyers commerciaux ou professionnels. L’instruction des dossiers associe les services des régions et de l’État depuis le 15 avril (lire infra les aides des régions).

Panoramique des initiatives

• En prise directe avec les préoccupations des commerçants, artisans, les Chambres de commerce et d’industrie (CCI) sont très sollicitées. Des cellules de crise ont été rapidement mises en place pour informer et accompagner les entreprises. Plus de 400 000 appels ont été recensés en l’espace de quatre semaines. Les demandes des entrepreneurs ont d’abord été centrées sur l’accompagnement et les aides gouvernementales mises en place pour les soutenir. Des demandes plus personnalisées ont suivi. Désormais, affluent les demandes axées sur la reprise et l’après-virus. Un exemple : la CCI Aix-Marseille-Provence a créé une carte géolocalisée qui recense les commerçants, artisans, producteurs locaux ouverts pour que la clientèle les repère. Une initiative relayée par plus de 50 CCI. D’autres ont développé des plates-formes numériques locales, des bourses d’entraide, des webinaires pour assurer la continuité pédagogique des salariés.

• L’Ordre des experts-comptables et Bpifrance ont mis en place un Prêt rebond full digital de 10 000 à 50 000 euros, remboursable sur sept ans après deux ans de différé à taux zéro, sans garantie ni aucun frais de dossier, cumulable avec le PGE. Mais le montant cumulé des deux prêts ne pourra excéder 25 % du chiffre d’affaires. Ce prêt est disponible à partir depuis le mardi 5 mai pour les franciliens. Il sera prochainement étendu à d’autres régions. L’expert-comptable, mandaté expressément par son client, confirme certaines informations et dépose les justificatifs nécessaires à l’instruction du dossier sur la plate-forme de demande de prêt.
Plus généralement, les experts-comptables qui s’étaient numérisés avant la crise sont parvenus à assurer la continuité de la « production » comptable pour que leurs clients maintiennent leur activité. Un exemple, le cabinet-comptable AS Entreprises, spécialisé dans le domaine agricole et vinicole, a accéléré sa transformation numérique dès l’annonce du confinement. « Nous avons maintenu une continuité de service essentielle à l’activité de nos 3500 adhérents par la création d’un véritable lien alors même que nous n’étions plus en contact direct avec eux », explique Gilles Pellerin, directeur délégué AS Entreprises.

• Le Crédit Agricole et Onepoint, groupe spécialiste de la transformation numérique, ont tout récemment présenté le Copass, un badge numérique qui mesure la sensibilité au virus, appréciée à partir d’un questionnaire personnel de santé, dans le strict respect du secret médical. Au résultat correspond un QR code dont la couleur détermine un protocole de travail défini par l’entreprise : maintien du télétravail, retour sur site en horaire alterné, retour sur site mais dans une unité réduite, orientation vers un test de dépistage… « Nous voulions offrir à chaque salarié le même outil, la même sécurité et la même liberté retrouvée de se mouvoir, explique David Layani, président-fondateur de Onepoint, et mettre la technologie au service de l’humain ».
• Pour accompagner les entreprises et sortir de la crise, Bpifrance, avec l’appui des réseaux professionnels des banques membres de la Fédération bancaire française se mobilise. La « banque des entrepreneurs » a mis en place un dispositif inédit par lequel l’État garantit 300 milliards d’euros de prêts. Ce PGE – prêt garanti par l’État – pourra représenter jusqu’à 3 mois de chiffre d’affaires 2019 de l’entreprise ou deux années de masse salariale pour les entreprises innovantes ou créées depuis janvier 2019. Les entreprises ont jusqu’au 31 décembre 2020 pour se tourner vers leurs banques habituelles. Aucun remboursement ne sera exigé la première année. L’entreprise décidera si elle le souhaite d’amortir le prêt sur une durée maximale de 5 ans. Les entreprises qui font l’objet d’un plan de sauvegarde ou qui affrontent un redressement judiciaire au 24 mars 2020, comme celles qui mènent des procédures amiables (conciliation et mandat ad hoc) bénéficient elles aussi du prêt. En revanche, sont exclues du dispositif les entreprises en procédure collective (procédure de sauvegarde, redressement judiciaire et liquidation judiciaire ou redressement personnel) avant le 1er janvier 2020, tout comme les sociétés civiles immobilières, les établissements de crédit et les sociétés de financement.

Les aides en régions

Les régions ont mis en place des plateformes qui leur sont propres. Les dirigeants ont tout intérêt à aller consulter ces sites et à solliciter ces compléments d’aide. La procédure est très simple : l’entreprise n’est parfois pas même informée que le dossier est accepté et reçoit directement le montant de l’aide sur son compte par virement. En Île-de-France par exemple, le Fonds de solidarité conçu pour aider les entreprises franciliennes de 1 à 10 salariés s’est doté d’un 2e volet. Lequel prévoit une aide supplémentaire jusqu’à 5 000 euros pour les établissements menacés de faillite. Sont concernés par cette mesure : les très petites entreprises (TPE), micro-entrepreneurs, professionnels libéraux, associations et autres agents économiques implantés en Île-de-France qui réalisent moins de 1 million d’euros de chiffre d’affaires (CA) et qui ont fait l’objet d’une fermeture administrative ou enregistré une baisse de plus de 50 % de leur chiffre d’affaires en mars 2020, par rapport à mars 2019. De récentes annonces du gouvernement prévoient un élargissement du volet 2 (pour les entreprises de hôtellerie-restauration, du tourisme, de l’événementiel, du sport et de la culture, et, sous certaines conditions, aux entreprises sans salarié).

Les réseaux d’entrepreneurs

Bien sûr, les entrepreneurs soutiennent leurs collègues.
• L’Adie – Association pour le droit à l’initiative économique – par exemple, propose des prêts de relance à 0 % aux entreprises qu’elle accompagne tout au long de l’année et qui souffrent particulièrement de la crise. Plusieurs centaines d’entreprises vont bénéficier d’un prêt de relance à taux zéro de 3 000 euros. Un différé de remboursement de plusieurs mois sera également proposé aux entrepreneurs pour laisser le temps à l’activité de chacun de reprendre. « Au moins la moitié des entrepreneurs accompagnés par l’Adie pensent ne pas pouvoir relancer leur activité après le choc du confinement. La perspective d’un tel gâchis de talents est inacceptable moralement, socialement, économiquement. C’est pourquoi l’Adie plaide avec force pour une relance inclusive qui ne laisse de côté aucun entrepreneur et fait appel à l’appui de tous ses partenaires », a commenté Frédéric Lavenir, son président.
• Le Medef, outre sa présence médiatique, a publié sur son site un dossier spécial qui recense toutes les informations utiles.
• Pour ne pas laisser les projets de création ou reprise d’entreprise sans assistance, Réseau Entreprendre recueille les dossiers des candidats et en évalue la viabilité. À la clé, un prêt d’honneur de 30 000 euros.
• Le réseau France Active a mis en pause jusqu’en septembre le prélèvement des échéances des prêts à taux zéro octroyés. Il propose également le report en fin de prêt des échéances de remboursement pour les mois de mars, avril et mai.
• France Active prépare une solution de prêt à titre gratuit d’un montant moyen compris entre 50 000 et 70 000 euros sur 12 mois. Il vise à conforter la situation financière actuelle des entreprises en leur assurant le maintien des concours financiers existants.
• Les entrepreneurs peuvent toujours compter sur les business angels : les membres de Paris Business Angels et de Club Invest IDF, par exemple, ont investi la somme de 300 000 euros dans la société Biomère. Les business angels des Grandes Écoles ont, au plus fort de la crise, clôturé des investissements dans trois sociétés, Rheonova, Ma Formation Médicale et Carjager.

Pierre-Jean Lepagnot
et Jonathan Nahmany

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