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ART DE VIVRE & PATRIMOInE
L’Air du temps
n°4
Meunier, tu dors ? Ton Moulin va très fort !
De La Goulue aux revues, en passant par Mistinguett et Aznavour, le Moulin Rouge s’est forgé une marque mondialement connue qu’il entretient savamment.
ébut de soirée, boulevard de Clichy, dans le XVIIIe arrondissement de Paris, un car de touristes fait une halte. Les visiteurs descendent, dégainent leurs appareils photos, autour d’eux les badauds s’émerveillent, les flashs crépitent, on s’interpelle et on se pousse du coude. « Fantastic ! », entend-t-on s’extasier, ici et là. Mais quel est l’objet de tant de passion ? Un monument ? Une vedette ? Un peu les deux : le Moulin Rouge. « A une époque, il était surtout connu pour les personnalités qui s’y produisaient. Aujourd’hui, c’est le cabaret lui-même qui est devenu un mythe », constate Fanny Rabasse, l’attachée de presse de l’établissement. Et comme toute célébrité, le Moulin Rouge peut se permettre quelques caprices : « Notre notoriété ne dépend plus de l’éventuelle présence de têtes d’affiches. Il y a deux ans, nous avons même refusé d’accueillir un concert de Madonna alors que toutes les salles de spectacle se l’arrachaient. Son projet ne nous correspondait pas », commente-t-elle.
D
C’est donc l’établissement, et son histoire, qui tiennent aujourd’hui le devant de la scène. Pas question, en effet, d’oublier que c’est en partie à son passé que le Moulin Rouge doit sa notoriété. Aussitôt franchies les grandes portes de verre, l’histoire du lieu est palpable. Velours rouge, lustres immenses et éventails à plumes aident le visiteur à laisser derrière lui le bruit et l’agitation du quartier Pigalle, et le transportent tantôt à la Belle Epoque, tantôt dans les années 1960. Dans le petit salon près de l’entrée, ambiance fin XIXe siècle : des affiches du peintre Toulouse-Lautrec rappellent le premier Moulin Rouge, crée en 1889 par Charles Oller et Gilles Zilder, et nommé d’après le « vrai » Moulin de Montmartre et un restau-
La GouLue et La BeLLe époque
rant parisien homonyme. L’établissement est alors pensé comme un lieu dédié au Quadrille – rebaptisé plus tard « French Cancan » – où l’on venait s’encanailler. L’entrée se faisait par le jardin, près du fameux éléphant de l’exposition universelle dont la patte était un fumoir. Point de scène comme aujourd’hui, les spectacles sont donnés par terre au milieu du public. Et si aujourd’hui le cabaret propose des tarifs pour les familles, c’est surtout par son coté sulfureux qu’il s’est fait connaître. En 1891, une affiche de Toulouse-Lautrec, dont le cabaret expose fièrement un des deux seuls originaux disponibles, fait scandale : elle représente La Goulue, célèbre égérie au nom évocateur, soulevant sa jupe pour laisser voir sa longue culotte de dentelles. Deux ans plus tard, c’est le Bal des Quat’z’Art qui provoquera l’esclandre, avec sa Cléopâtre et ses danseuses en tenue d’Eve. « Mais c’est également la mixité qui a fait le succès du Moulin Rouge : au sein de l’établissement, hommes et femmes étaient mélangés, et l’on pouvait y croiser à la fois des ouvriers et le futur Edouard VII », explique Fanny Rabasse.
changé. C’est la célèbre Mistinguett qui mène la danse et lance la période Music-hall. Le succès est au rendez-vous
tecte en vogue. Il remet également à l’honneur le Cancan, longtemps oublié par le Moulin alors qu’il avait fait sa