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ArT DE ViVrE & PATriMOinE
L’Air du temps
n°4
Victoires à la Pyrrhus
Coupe du Monde de foot, Jeux Olympiques… Des événements planétaires dont les Etats s’arrachent l’organisation. Pourtant, accueillir de telles compétitions coûte extrêmement cher. Et pour un euro investi, il est très rare de récupérer sa mise.
uin 2013. Le Brésil s’enflamme. L’une des raisons évoquées par les manifestants ? Les sommes pharaoniques englouties dans l’organisation de la Coupe du Monde 2014. A première vue, en effet, on peut juger qu’il est plus urgent d’investir des milliards dans l’éducation ou le logement que dans des stades de foot. Mais c’est oublier le retour sur investissement de ce type d’événements. Pour autant, ceux-ci se révèlent-ils toujours rentables à long terme ? Pour des Jeux Olympiques ou une Coupe du Monde de football, les coûts se répartissent sur plusieurs phases. Très en amont, d’abord, celle de préparation du dossier de candidature. Les réunions, le lobbying, le recours à des cabinets d’expertise, les rendez-vous divers commencent à faire grimper la note de quelques millions d’euros. Une paille. C’est après que les choses se gâtent. « Une fois qu’un pays est sélectionné, il doit fixer les coûts d’organisation de l’événement, explique Anne Lavigne, professeur de sciences économiques à l’Université d’Orléans. Et là, c’est malédiction au vainqueur, car l’appel d’offres fonctionne sur un modèle similaire à celui des enchères. Pour éblouir le jury, les candidats font donc des propositions extraordinaires, dont ils sous-estiment les coûts. Et bien souvent, le vainqueur l’emporte pour un prix exorbitant par rapport à celui de ses principaux concurrents. » Pour autant, les villes organisatrices connaissent des fortunes diverses. Ainsi, pour les Jeux Olympiques de 1984, Los Angeles – seule ville candidate à l’organisation – parvient à être très légèrement bénéficiaire. En 2008, Pékin parvient à ne voir sa facture majorée que de 4%, après avoir rogné sur certaines dépenses, comme le toit du stade olympique. A l’arrivée, les Jeux coûteront 45 mil-
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liards d’euros à la Chine. A l’inverse, pour les JO de 2012, Londres voit sa note
passer initialement de 3,4 milliards de Livres, à… 11,6 milliards ! La majeure partie de ces sommes est allouée à deux postes. D’abord, les infrastructures lourdes, qui repré-
“Le principal intérêt de ces compétitions, c’est l’effet de signal ”
pement économique du pays. En effet, en pleine Guerre Froide, les JO seront un formidable vecteur d’image pour la Corée du Sud : celle d’un Etat ouvert au monde. En matière économique, ensuite,
conséquent. Autant d’investissements qui joueront un rôle central dans le dévelop-
cupérables, note Anne Lavigne. C’est le cas des patinoires et de la piste de bobs-
leigh dont s’est dotée la Savoie pour accueillir les jeux d’hiver d’Albertville en 1992. » Enfin, reste à financer la mise en place de l’événement en lui-même : recrutement de
explique Anne Lavigne. C’est à dire que pour un euro investi, on essaie de voir combien il a rapporté au plan macro-économique. » Et la plupart du temps, les résultats ne sont pas fameux. Seule la ville de Séoul, pour les raisons évoquées plus haut, parvient à un multiplicateur supérieur à 1. Pour les Etats développés au moment de l’accueil des Jeux ou d’une Coupe du Monde de foot, c’est l’inverse. En 1992, la France accueille les Jeux