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Grand-duc du crowdfunding
Première au monde, la boutique Ulule soutient des campagnes de crowdfunding et vend ses prototypes. Bienvenue.
Nichée au cœur du Marais, quartier connu pour ses concept-stores, au 22 rue Saint-Paul précisément, dans le IVème arrondissement de Paris, la boutique Ulule a ouvert ses portes le 22 septembre dernier. S’y mêlent des curieux, des porteurs de projet, des membres de la communauté Ulule. Pour les non-initiés, Ulule est une plateforme de financement participatif (crowdfunding) et représente à ce jour 14700 projets financés, soit 62 millions d’euros récoltés depuis 2010. Non négligeable. Car en 2015, selon le Compinnov, 300 millions d’euros étaient levés via ce type de financement.
Point de vente en prolongement de l’incubateur virtuel
« Ulule se définit comme un incubateur virtuel. Nous sommes une plateforme et un outil web, comme tous les sites de crowdfunding, mais nous nous démarquons par l’ensemble des services dédiés à notre communauté », introduit Mathieu Maire du Poset, directeur général adjoint de la structure. Ce petit plus se traduit par un taux d’aboutissement des projets de 70%, tandis que la zone Europe plafonne à 15%. La recette ? « Accompagner les porteurs de projet passe par une phase de conseil en amont de la campagne. Une dizaine de jours en moyenne pour expliquer comment communiquer, relancer, accélérer sa campagne. Avec une moyenne de 45 jours en général. L’accompagnement est crucial car la mécanique d’une campagne est encore peu comprise », détaille son dirigeant. Dans la lignée de ce conseil et des formations qui participent à évangéliser le crowdfunding, Ulule a décidé d’ajouter une nouvelle corde à son arc en s’établissant « en dur ». « Une première mondiale pour le financement participatif », se réjouit le directeur général adjoint.
Nouvelle corde à l’arc de la communauté
45 mètres carrés nous font face. Avant ce nouveau concept-store ? Une ancienne boutique d’articles de sport vintage et haut de gamme s’y trouvait. D’ailleurs, la boutique Ulule propose toujours une partie de ces ballons vintage ronds ou ovales. Aujourd’hui, peu de choses ont bougé. Les étagères sont les mêmes. Le meuble de la caisse enregistreuse aussi. L’ambiance est feutrée, branchée, parisienne. Une atmosphère qui colle bien avec l’image du DG adjoint, Stan Smith aux pieds, les bras tatoués et un sweat gris avec Chirac en mode swag, en guise de costard. Plus d’une vingtaine de projets en campagne sont exposés avec un synopsis – détail du projet, but de la campagne, descriptif du porteur – écrit à la main pour que la boutique ne sente pas seulement l’esprit « branchouille » et retail. La programmation de la boutique sera renouvelée tous les deux mois à la faveur de la communauté Ulule, qui représente 1,2 million de personnes en Europe, et de la direction. « Nous laisserons nos membres choisir 70% de la programmation et nous choisirons le reste pour équilibrer. Nous donnerons le coup d’envoi de certaines campagnes. La boutique permettra de discuter avec les créateurs de projets. Hier soir nous annoncions le lancement d’une campagne pour une micro-brasserie installée à Neuilly, créatrice d’une nouvelle bière, « l’amour fou » avec dégustation à l’appui », relate Mathieu Maire du Poset. Si la boutique propose à la vente les produits d’entreprises, d’associations ou de designers, son aspect retail n’est pas le plus important à retenir du projet inédit. Juste une brique à l’édifice pour équilibrer le business model et légitimer davantage l’établissement en dur d’une entreprise dont le cœur de métier est de fait dématérialisé. Car Ulule est aussi un réseau social où des membres plus influents possèdent des followers. Cette communauté pyramidale classique trouve en la boutique un nouveau moyen de contribuer et d’échanger en complément de la plateforme numérique. « La boutique fonctionne comme une start-up en mode «test & learn». L’engouement est certain ; reste la réalité des chiffres pour entériner l’idée. Si cela fonctionne, pourquoi pas réitérer ailleurs en Europe ou en France ? », note le dirigeant.
Des conseillères pas comme les autres…
Aujourd’hui, la boutique tourne avec deux personnes : une responsable, Annika, designer mais aussi conseillère en accompagnement pour Ulule, qui pilote la politique produit de la boutique et Claire, conseillère, ancienne stagiaire chez Ulule. Les portes sont ouvertes du mercredi au dimanche de 11h à 19h. 20 à 30 références éclectiques ont ainsi pignon sur rue, parmi lesquelles nous retrouvons pour le moment : les jeans de Promotion 1083 (made in France), les chaussures homme-femme de Pied de biche, une veilleuse Little Sun en forme de fleur qui fonctionne à l’énergie solaire, le projet social et solidaire de gammes de thés Oh my tea, des marque de céréales Kokoji, des soins bio pour hommes Ho Karan, ou encore Les Ptits Doudous, opération menée par le CHU de Rennes pour dédramatiser l’opération auprès d’enfants en bas âge. Rehwind, une ligne de vêtements streetwear, ou encore Lunii, boîte créative pour développer l’imaginaire des enfants, sont aussi de la partie. « Aujourd’hui, la part des entrepreneurs grimpe dans les campagnes lancées. Et de nouvelles tendances se dessinent. Les projets mode et médias sont aujourd’hui très présents. Un vrai boom en deux ans », illustre Mathieu Maire du Poset, déambulant dans son cabinet de curiosités nées du crowdfunding.
Tendances secteurs
Les chiffres révélateurs d’Ulule
Un Français sur dix aurait déjà participé à une campagne de financement participatif. Ulule représente aujourd’hui 14700 projets financés pour 62 millions levés auprès de la communauté, qui représente 1,2 million de membres. La somme moyenne aujourd’hui d’un projet est fixée aux environs de 5000 euros avec un ticket moyen de 50 euros pour une centaine de personnes contre 6000 dollars sur Kickstarter. « Grosso modo, les sommes varient ainsi selon la nature du projet : 2000 euros pour les campagnes individuelles, 4500 euros pour une association et 10000 euros pour une entreprise. Notre ligne de conduite consiste à rester ouverts à tous les projets si tant est qu’ils possèdent une portée collective. Coté tendances, le culturel représente 50% de nos campagnes, 70% il y a trois ans. Mais cela s’explique par la montée en puissance du social et solidaire qui représente 25%, et les derniers 25% sont investis par l’entrepreneuriat également en plein essor », explique son dirigeant.
Geoffroy Framery