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PANORAMA
Hexagone
n°3
Le pouvoir d’aller contre
Entre le compte en Suisse de Jérôme Cahuzac et le soupçon de virement d’argent libyen en faveur de Claude Guéant, ce printemps aura été la saison des affaires… mais aussi celle des contre-pouvoirs. Illustration avec ces deux figures en combat. Par Aymeric Marolleau
Daniel Lebègue,
Président de Transparency International France
Anti-corruption
«L
’affaire Cahuzac nous inquiète car elle contribue à la perte de confiance des citoyens dans leurs institutions et ceux qui sont au premier plan de la scène politique. Les mesures de transparence prises vont dans le bon sens, mais nous serons vigilants pour nous assurer que ce qui est annoncé sera bien traduit dans la loi. » Ces mots sont de Daniel Lebègue, le président de la branche française de l’ONG Transparency International (TI), qui lutte contre la corruption des gouvernements. Cet énarque né à Lyon en 1943, pur produit de l’administration française, a mené une brillante carrière comme haut fonctionnaire. Peu disert sur sa vie privée, il préfère mettre en avant son pedigree : le spén avril 2009, le G20 réuni à Londres pouvait sabler le champagne :
cialiste des questions financières a servi 18 ans au ministère de l’Economie et des Finances, où il est entré en 1969. Il en gravit les échelons jusqu’à prendre en 1984 la tête de la Direction du Trésor. Il revêt trois ans plus tard le costume de banquier, en devenant le Directeur général de la Banque nationale de Paris, plus connue sous les initiales « BNP » depuis sa privatisation en 1993. En 1997, il revient à ses premières amours, la fonction publique, pour y occuper un poste des plus prestigieux, celui de Directeur général de la Caisse des dépôts et consignations. « Ce fut un point d’orgue, car c’est un établissement qui allie de façon unique une mission d’intérêt général et un haut niveau d’expertise fi-
nancière. » En 2002, lorsqu’il quitte cette institution, Daniel Lebègue a 60 ans et tous les honneurs d’une carrière au service de l’Etat. Le bon moment pour s’acheter une canne à pêche ? Pas vraiment. Quinze années à exercer le métier de banquier lui ont notamment permis de faire une rencontre qui nourrira ses choix futurs : la corruption. « J’ai pu constater des dérives de la part de présidents et de directeurs généraux, en particulier anglo-saxons, que j’ai côtoyés. A cette époque, certaines banques, pourtant prestigieuses, ont favorisé le
blanchiment de l’argent de la drogue ou ont prêté la main à la fraude fiscale à grande échelle. » Au lieu d’une retraite au calme, ce sera donc une reconversion militante : « Je me suis consacré à l’engagement associatif sur trois axes qui pour moi forment un tout : bonne gouvernance, éthique, et responsabilité vis à vis de la société ». Ainsi, outre
“Nous dérangeons ”
des intérêts dans la politique et la finance
la branche française de TI, le septuagénaire préside l’Institut français des administrateurs (promotion des bonnes pratiques de gouvernance dans les entreprises), et l’Observatoire de la responsabilité sociétale des entreprises.