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130 magistrats financiers viennent de publier une tribune dans Le Monde pour appeler à mieux budgéter la justice financière.
L’argument coule de source, pourtant, il semble avoir du mal à se faire entendre jusqu’au pouvoir exécutif. Selon les 130 magistrats signataires de la tribune publiée par Le Monde, la justice financière mériterait d’être mieux dotée puisque in fine, elle rapporte de l’argent aux comptes publics.
« La lutte contre la délinquance financière reste l’un des parents pauvres de la chaîne pénale », dénoncent d’ailleurs les signataires. Ils regrettent que leur justice financière ne soit pas aussi bien considérée que celle du grand banditisme ou de la lutte contre le trafic de stupéfiants.
Pourtant, de l’arnaque en ligne jusqu’à la fraude fiscale, ce sont bien les magistrats financiers et les enquêteurs attenants qui sont en charge de maintenir ces méfaits aux taux les plus bas. Ces mêmes méfaits qui ont une influence directe sur le niveau de vie des Français…
Une réforme qui a mis le feu aux poudres
L’heure est à la bronca. Et notamment depuis le 1er janvier 2024, avec l’entrée en vigueur de la réforme de la police judiciaire (PJ), entre autres. En bref, les 4 000 membres de la PJ ont fusionné avec les 14 000 enquêteurs de la sécurité publique. Ce qui dilue les compétences parfois très spécialisées des enquêteurs financiers qui se trouvent déployés sur des dossiers beaucoup plus généraux.
Quatre mois plus tard, les signataires de la tribune assurent que « ni les magistrats ni les policiers spécialisés ne se félicitent » de cette réforme.
Et pour cause, tous dénoncent depuis des « effectifs d’enquêtes spécialisés très faibles ». Mais aussi des « difficultés de recrutement amplifiées à un turnover élevé ». Le tout finit par pousser la justice financière à renoncer à certains dossiers.
Le PNF soutient la tribune
Le Parquet national financier – qui n’a pas fait partie des signataires – soutient lui aussi l’initiative. Interrogée par l’AFP, l’institution dit « partager le constat dressé par les magistrats ». Le PNF rappelle aussi que Jean-François Bohnert, le procureur de la République financier, a souvent pris la parole pour souligner ces difficultés. Il avait notamment constaté les effets négatifs de la réforme de la PJ très récemment.
Pour rappel, le PNF a pourtant rapporté 4 milliards d’euros dans les caisses de Bercy en sept ans. Le tout en s’attaquant directement à trois gangrènes : la fraude fiscale et son blanchiment ainsi que la corruption et le trafic d’influence. Comment est-il alors possible que cette institution soit, elle aussi, en manque de budget ?
« Le poids d’un manque durable de moyens »
Et bien les magistrats dénoncent en priorité « un manque durable de moyens » dans la lutte contre le crime financier qui, in fine, se ressent chez les Français.
En janvier dernier, Transparency International établissait le classement des pays selon leurs indices de perception de corruption. Pour la France, avec une triste stagnation d’une année à l’autre, l’association dénonce un « manque d’exemplarité du pouvoir exécutif » et un « manque d’indépendance de l’autorité judiciaire ».
Et alors que le nouveau plan anti-corruption du gouvernement prévoit l’arrivée de 1 500 magistrats et 1 800 greffiers d’ici à 2027, les juristes déjà en place craignent que cela ne suffise pas. Le seul moyen de renverser la vapeur ? Que la justice financière devienne « une grande cause nationale » et qu’elle soit propulsée par un nouvel élan des pouvoirs publics. Finalement, avec tout l’argent qu’elle rapporte, ne serait-ce pas une juste rétribution ?