Nourrir sans dévaster : la proposition d’un duo iconoclaste

Nourrir sans dévaster
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Nourrir sans dévaster. Le titre de l’ouvrage d’Erik Orsenna et Julien Denormandie dit tout du vertigineux défi du siècle.

Comment nourrir toujours plus d’êtres humains avec un environnement éprouvé et menacé ? Voilà une équation qui semble à première vue impossible à résoudre. 

L’académicien Erik Orsenna est l’ami de tous les pouvoirs. Il est comme on dit du côté du manche, et la chose dure depuis l’ère Mitterrand. Cet écrivaillon est parvenu, à force de flatteries et de roueries, à se faire une place dans le tout-Paris littéraire. Le moustachu endolori, désormais âgé de 76 ans, avait remarqué dans la sphère macroniste un jeune profil qui semblait prometteur… Julien Denormandie.

Ce très proche du président Macron, qui fut tout récemment pressenti pour entrer en fanfare à Matignon, est aujourd’hui chief impact officer (CIO) de la start-up Sweep. Une structure qui aide les entreprises à réduire leur empreinte carbone. Mais il semble encore installé dans ses anciennes fonctions de ministre de l’Agriculture, institution qu’il quitta pourtant en 2022. Sur son profil LinkedIn, la mise à jour n’a pas été complètement faite. D’ailleurs, Julien Denormandie fut un négociateur de l’ombre durant la crise agricole, faisant constamment le lien entre le gouvernement et les syndicalistes.

L’académicien et l’entrepreneur se sont entendus pour écrire, aux éditions Flammarion, Nourrir sans dévaster. Un ouvrage qui prend place dans la longue série des Petits précis de mondialisation, chère à Erik Orsenna, qui fut longtemps un grand avocat de ce phénomène qui montre aujourd’hui, au-delà de ses limites, ses travers. Orsenna incarne en effet mieux qu’aucun autre la pensée convenue, répétant par exemple à qui mieux-mieux qu’il est un « européen convaincu », sans jamais préciser ce que cela veut dire. Les jeunes diraient qu’il incarne l’esprit boomer.

« La complainte du cordon bleu »

Notre duo étonnant est de toutes les émissions à la mode : 8 h 30 France Info, C à Vous, Télématin… L’occasion d’une réflexion collective sur notre modèle agricole. Ainsi, sur la radio publique tout-info, Julien Denormandie précise-t-il le constat initial de l’ouvrage : « Nous n’avons pas le choix, notre planète va passer de huit à dix milliards d’êtres humains, le réchauffement climatique vient impacter les terres arables, là où il est possible de cultiver ».

Si Julien Denormandie, en bon ingénieur agronome, mise principalement sur la « recherche agronomique » pour relever le défi, soulignant à raison qu’en France, « pays de Pasteur, on se méfie de la science », son camarade Orsenna se veut au contraire plus écolo’ dans l’âme : « L’idée d’une pause écologique serait une erreur grave. Il faut écologie et agriculture : c’est ça le vrai en même temps ».

Avec des chapitres drôlement intitulés « la complainte du cordon bleu » ou « la société du steak haché », Orsenna et Denormandie rappellent l’aberration d’un monde où l’alimentation a été mondialisée et ultra-transformée. Autant d’exemples qui illustrent, via des plats et des aliments concrets que nous dégustons tous (surtout Emmanuel Macron, qui raffole dudit cordon bleu), le danger sanitaire qui plane sur nos assiettes.

Un voyage inquiétant dans les fermes-usines

Loin d’une étude « en chambre », écrite depuis le premier étage du café de Flore, nos deux compères s’en vont visiter des usines géantes au Brésil, en Ukraine, en Chine. Ils sonnent l’alarme face à un système devenu fou.

Une phrase étonne lorsqu’on lit la quatrième de couverture : « Julien a été ministre de l’Agriculture. Erik aurait rêvé de l’être ». Si Orsenna semble avoir beaucoup d’avenir derrière lui et aura probablement peu de chance de réaliser son rêve, il est frappant de constater que Julien Denormandie lui, a eu entre les mains les leviers du pouvoir.

Pour quels résultats ? Le bilan fut certes moins mauvais que pour d’autres, mais nous sommes loin de la révolution tant annoncée. Mais quel est donc ce mal français qui fait que les ministres ont beaucoup d’idées avant d’arriver au pouvoir, davantage encore après l’avoir quitté, mais bien moins entre ces deux moments, dans le feu de l’action ? C’est vraiment dommage !

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